Le trajet

196 37 5
                                    

Quand le nuage de poussière se dissipe et que l'affaire se rapproche, je comprends que c'est le bus dont parlait Niyol. En fait, ce sont trois bus, l'un derrière l'autre. Chacun vient se placer devant l'entrée d'une des Tours. Les élèves y montent rapidement.

- Il y aura jamais assez d'espace pour tout le monde.

- T'as vraiment rien lu des documents qu'ils y avant dans le globe, me reproche Choga. Ça explique que les bus passent à toutes les demi-heures le matin pis le soir.

- Pis vous feriez mieux de monter tout de suite, prévient Niyol, sinon, vous devrez attendre le prochain. Nous, on va faire le voyage en volant.

On écoute son conseil tandis qu'elle est Choga s'envolent. Je pousse quelques personnes pour réussir à monter dans l'autobus, puis je me cherche un banc vide. Ils sont tous pris, sauf un au fond où est assis quelqu'un que je connais.

- Maya Boubekri! s'exclame Octavien.

- Hum, allô... marmonné-je.

Léa me lance un regard surpris, se demandant sûrement comment ça se fait que je le connaisse. Octavien est encore accompagné par Calypso, Hugo et Antoine.

- À ce que je vois, on s'est retrouvés dans le Clan de l'Air tous les cinq, dit-il.

- Ouais. Dommage.

Je me retourne et regarde à nouveau l'autobus à la recherche de places vides que je n'avais peut-être pas remarquer... mais il semble que les seules soient à côté d'Octavien. Léa s'installe du côté de la fenêtre, alors je suis obligé de m'assoir à la place la plus proche de lui. Octavien et Calypso sont à notre droite, et Hugo et Antoine sont sur celui en avant, retournés pour faire face à eux.

- Alors, c'est quoi vos animaux totems? demande Octavien pour engager la conversation.

L'autobus démarre à ce moment.

- Corbeau pis chouette.

- Moi, c'est un paon, dit Octavient avec fierté.

- J'ai un signe, répond Calypso en faisant de nouveau revoler ses cheveux.

- Pis on a tous les deux des aigles, dit Hugo en parlant d'Antoine et lui.

La chaleur insupportable de l'été devient encore plus pénible dans ce bus bondé d'élèves. Léa ouvre la fenêtre, mais ça ne change pratiquement rien. Durant tout le trajet, Octavien essaye d'engager la conversation avec moi, mais je lui réponds le plus brièvement possible pour essayer de lui faire comprendre que j'ai juste envie qu'il me laisse tranquille. Calypso, elle, se contente de me lancer des regards énervés de temps en temps.

Au bout d'environ un quart d'heure, l'autobus s'arrête devant une grande arche en pierre décoré par deux statues de chouettes à chaque côté. Je me dépêche de m'en aller, tannée d'écouter Octavien parler de sa famille de Sang-Purs haut placée dans le ministère de la Magie.

- On mange ensemble, ce midi! me lance-t-il tandis que je cours à travers l'amas d'élèves, suivie par Léa.

Je sens un poids sur mon épaule. C'est sûrement Choga, mais je préfère m'éloigné le plus possible d'Octavien avant toute chose. Je m'arrête devant les portes ouvertes de Wakanda pour reprendre mon souffle. Les oiseaux qui volent dans le ciel descendent tous en même temps vers les élèves. Ça me prend du temps, mais je finis par réaliser que tous les élèves du Clan de l'Air ont des animaux totems volant.

- C'est ton ami? me demande Léa en voulant parler d'Octavien.

- Non.

- Mais on dirait que lui en est persuadé.

- Il est juste obsédé par la pureté du sang, dis-je en essuyant la sueur sur mon front.

Léa penche la tête sur le côté et fronce les sourcils pour montrer qu'elle ne comprend pas de quoi je parle.

- Comment le sang peut être pur ou impur?

- C'est juste par rapport à la magie... Si dans ta famille, il y a juste des sorciers, on t'appelle un Sang-Pur. Si t'as des Moldus pis des sorcier, t'es un Sang-Mêlé.

- Pis moi?

- Sara te l'a déjà dit dans le Vent du nord. T'es une Née-Moldue.

En haut des grandes portes de Wakanda, il y a une horloge qui indique huit heures vingt-sept. Les cours commencent à neuf heures, alors il nous reste encore trente-trois minutes pour faire ce qu'on veut. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression qu'il me manque quelque chose d'important... Quelque chose de vraiment très important... Sara!

Durant les deux mois que dure l'été, on s'est vu à chaque minute de chaque jour. On faisait toujours les choses ensemble : on déjeunait ensemble, on niaisait ensemble, on parlait ensemble, on dînait ensemble, on regardait la télé ensemble, on faisait du vélo ou du roller ensemble, on soupait ensemble, on passait nous soirée ensemble et on dormait dans des chambres en face l'une de l'autre. Pis on a développé depuis longtemps un lien étrange qui existe seulement avec les sœurs jumelles. Maintenant, j'ai l'impression de n'avoir personne pour m'épauler... ni pour surveiller mes moindre faits et gestes, ce qui n'est pas si pire.

Malgré ça, je pars quand même à la recherche de Sara. J'essaye de me faire une image mentale de Wakanda : je sais que le Clan de l'Eau est au sud-ouest parce qu'on est passé par son lac, celui du Feu est au sud-est, puisque j'ai vu un grand feu de joie quand je suis arrivé, et le mien, le Clan de l'Air, est au nord-ouest. On peut donc dire avec certitude que le Clan de la Terre est au nord-est, donc que j'ai juste à marcher tout droit pour trouver Sara.

- Où est-ce que tu vas? demande Léa en me rattrapant.

- Chercher ma sœur.

Elle hoche la tête et me suis sans rient dire d'autre. Juste quand j'arrive aux portes du Clan de la Terre, j'aperçois Sara en train de sortir d'un autobus, un écureuil perché sur l'épaule. Elle passe par une arche en pierre qui ressemble à celle que j'avais traversée plus tôt, mais celle-là est ornée de deux statues de biches.

- Sassou! lui crié-je.

Sara tourne la tête vers moi et me fait un signe de la main.

- Allô, dit-elle. Tu peux même pas survivre une nuit sans moi?

- Bien sûr que je peux. Je voulais juste vérifier si t'étais encore vivante après avoir passé dix heures séparée de moi.

On rigole un peu, puis on vagabonde ensemble dans les couloirs de Wakanda.

- C'est quoi ton premier cours de la journée? lui demandé-je.

- Potions. Toi?

- Soin aux créatures magiques.

- Moi aussi! intervient Léa.

J'avais pratiquement oublié sa présence.

- Vous devez sûrement être dans la même classe.

Le son de la cloche vient interrompre notre conversation.

- Bye, Sassou.

- Bye, pis arrête de m'appeler « Sassou ».

- Ok, Sassounette.

Je ne sais vraiment pas comment les gens qui n'ont pas de jumeaux font pour survivre. C'est tellement plus pratique et amusant d'en avoir un.

Maya Boubekri et la Coupe de FeuWhere stories live. Discover now