Chapitre Sixième

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La fois suivante, je me réveille dans un lit d'hôpital, en métal, dur. Je me sens bizarre. J'ai l'impression que ma tête flotte sur un nuage, que tout ce que je vois et entend est filtré. Ma bouche est pâteuse, et j'ai mal au crane. Je me glisse hors du lit, et essaye de me mettre debout. J'avais complètement oublié que je m'étais fait tirer dessus ! Ma jambe me lâche aussitôt, et je m'étale sur le carrelage blanc, dans un bruit mou. Je me retourne sur le dos, pour mieux voir sur quoi m'appuyer pour me redresser. Ma jambe tire énormément. Je m'accroche à la table de nuit et me soulève. Je m'assieds sur le lit, et aperçois une paire de béquilles posées contre le mur, apparemment destinées à moi. Je m'en empare donc, et me dirige difficilement vers la porte de la salle.

À la sortie, un jeune attend, piqué là comme un soldat. En me voyant arriver, il me regarde et me dit :

- Logan t'attend. Suis-moi.

Il avance, et se faufile dans de petits couloirs. Je le suis du plus vite que je peux, car il ne semble pas prêt à ralentir le rythme pour moi. Nous finissons par déboucher à l'extérieur du bâtiment. Un hôpital. Nous traversons la route, direction la maison d'en face. Ma tête tourne toujours, et marcher autant que ça n'arrange pas les choses. Arrivé devant le perron de la maison, je m'arrête un moment. J'ai du mal à voir devant moi et je me sens à deux doigts de craquer. Je rentre dans la maison, les larmes troublant plus encore ma vue. Je me laisse conduire jusqu'à une petite salle carrée, avec une simple table basse pour tout meuble. La table est couverte de petits sachets remplis. Un jeune homme, yeux clairs, cheveux blonds coupés courts, est assis sur une petite chaise. Il pourrait être beau, s'il n'avait pas ce sourire sadique et cruel d'imprimé sur son visage.

- Ah ! Le nouveau ! viens par là. Comment va ta jambe ? Les points de suture ont pas encore lâchés ? Non ? Tant mieux pour toi. Comment tu te sens ? Un peu dans les vapes ?

Je fais oui de la tête. Il scrute la table pendant quelques secondes, et attrape un sachet étiqueté, contenant trois gélules. Il me dit en me le tendant :

- Tiens, c'est de la bonne. Ça te remettra les neurones dans le bon sens pour quelques heures. Si t'as du mal à la prendre, demande à Marc de t'aider. Tu lui demanderas aussi de te donner des fringues appropriées, on s'habille pas n'importe comment ici. Il t'aidera, le nain, il m'a dit qu'il t'avait trouvé très impressionnant. C'est grâce à lui que t'es encore vivant d'ailleurs. Tu ferais bien de le remercier. Je pensais te buter, ou te laisser crever, vu que tu m'as tué un de mes meilleurs sergents, mais Marc s'est amusé à me décrire la scène et à m'expliquer pourquoi t'es intervenu, et je dois dire que s'il a pas raconté que de la merde, t'as du courage. Allez, dégage maintenant, et va prendre ta came.

Choqué, je glisse inconsciemment le petit sac de plastique dans ma poche, et rebrousse chemin. Arrivé devant la porte, je l'entends qui dit à mon attention :

- Hé, au fait Machin, cherche pas ton gun, je te l'ai taxé ! Je peux pas me permettre de te laisser un truc qui peut faire mal alors que je te connais pas !

Mon « guide » m'amène à Marc. Le petit est justement en train de prendre une dose de drogue. Il me regarde avec des yeux plus fous que jamais. Il n'arrive pas à me regarder en face en me parlant, et pas non plus à calmer ses mains qui s'agitent dans tous les sens. Son visage est transi de tics nerveux, il cligne des yeux à presque toutes les secondes. Il m'explique que tous les jeunes qui obéissent à Logan sont drogués. Le chef force tous ses soldats à prendre une première dose pour qu'ils dépendent de lui. Il s'assure comme ça fidélité et richesse. Marc m'explique aussi que beaucoup de gangs voisins sont sous son joug, car il arrive à s'approvisionner de tout type de drogues, et qu'il marchande avec eux pour obtenir des armes, des œuvres d'art, et des pièces de valeur. Alors que Marc me raconte les plans machiavéliques de Logan, il prend tout à coup un visage très sérieux, que les tics ne font que décrédibiliser, et me dit gravement :

- Prends ta dose maintenant. N'importe qui dans le gang tuerait pour avoir une pilule de plus. Surtout un nouveau. Dans tous les cas, il t'en a déjà balancé dans le sang, donc plus tu attends plus tu vas péter un câble. Tu pourras pas tenir. Crois-moi, je parle d'expérience. Apres la première dose, qu'ils m'avaient dissous dans un verre d'eau sans me le dire, j'ai essayé de pas en reprendre. Laisse tomber c'est impossible. J'ai tenu à peine huit heures. Et j'avais envie de mourir à la fin. Même si tu veux pas, prend la. En plus la sensation est pas mal. Ca détend.

Il me tend une bouteille remplie de moitié. A contrecœur, je prends la bouteille, attrape la première pilule, et je l'avale. J'ai du mal à me dire que je suis en train de me droguer. Pour moi, les drogués étaient surtout de grosses brutes qui voulaient juste montrer à leurs amis qu'ils n'avaient peur de rien. Apparemment, une de ces brutes a réfléchi un peu trop loin, et a créé un procédé abominable en détruisant la vie d'innocents.

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