Quarts d'heure

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   Le lendemain matin, je suis à peine habillée que des coups martèlent la porte d'entrée de la chambre. Clarke étant encore dans la salle de bains, je vais ouvrir la porte tout en finissant de tresser ma deuxième natte.

- Salut, Ava, dit Bellamy en rentrant sans plus de cérémonies. Clarke est là?

- J'arrive, s'exclame cette derrière au-dessus du bruit du sèche-cheveux qu'elle vient d'allumer.

    Je me rassieds sur le bord de mon lit et fais signe à Bellamy de prendre place sur ma chaise de bureau, mais il préfère visiblement rester debout. Tandis que je suis en train de défaire les dernières boucles de ma natte, qui sont, à cause de toute cette agitation, complètement asymétriques, je remarque que Bellamy est encore plus tendu que d'habitude. Les bras croisés devant la poitrine, il soupire et passe nerveusement d'un pied à l'autre. Je n'ose pas lui demander ce qu'il ne va pas: après notre altercation de la veille, je préfère rester sur mes gardes. 

   Clarke prend tellement de temps pour se sécher les cheveux que j'aurais eu le temps de faire et de défaire mes deux tresses au moins trois fois chacune. Au moment où celle-ci sort finalement de la salle de bain, des nouveaux coups retentissent contre la porte d'entrée.

- On ferait mieux d'investir dans une sonnette, murmure Clarke en faisant demi-tour pour aller ouvrir la porte. Salut, Bellamy, lance-t-elle au passage à celui qui l'attend depuis une bonne vingtaine de minutes. Et salut à toi aussi,... Murphy?

- Salut, Clarke, répond ce dernier, visiblement surpris d'un accueil aussi chaleureux. Est-ce qu'Ava est là?

- Qu'est-ce que tu fais ici?

   Avant que j'ai eu le temps de comprendre quoi que ce soit, Bellamy a traversé la chambre en deux enjambées et se tient désormais derrière Clarke, qui fait visiblement tout son possible pour lui barrer le passage. Son ton est tranchant, mais Murphy ne se laisse pas démonter.

-  Excuse-moi, mais, dis-moi si je me trompe, il me semble que ça ne te concerne pas. Du tout.

   Bellamy s'apprête à lui balancer une remarque tout aussi offensive, mais c'est sans compter sur ma superbe intervention de détournement d'attention. En trois secondes chrono, j'ai enfilé ma veste, mis mon bonnet, attrapé mon sac à dos et me suis faufilée à coté de Clarke et Bellamy. J'empoigne Murphy par le bras et le tire vers le couloir.

- Oh tiens, salut Murphy. Quelle belle journée, n'est-ce pas? Viens, on va prendre l'air. Maintenant. Tout de suite.

   Pendant de longues secondes, Murphy (et Clarke et Bellamy) me regardent comme si je venais de leur annoncer que la Terre était plate. Puis, aussi doucement que c'est probablement possible, il recule et s'exécute. J'adresse un dernier regard désolé à Clarke, qu'elle balaye d'un mouvement de tête, avant de refermer la porte sur nous. Je reste quelques instants immobile sur place, hébétée, à me demander s'il existe vraiment un moyen pour régler cette situation une fois pour toutes. Une fois revenue à la réalité, je dois pratiquement courir pour rattraper Murphy, qui ne m'a pas attendu.

   Lorsque je suis finalement revenue à sa hauteur, il me lance un regard que je traduis comme un «oh, tu étais partie? j'avais pas remarqué». Je le gratifie d'un regard perplexe en haussant un sourcil, tandis qu'il pose négligemment un bras autour de mes épaules.

- Heureusement que t'es mignonne, Ava.

* * *

   Nous n'avons rien dit de plus sur le trajet qui nous a menés à nos salles de cours respectives, la 204 au deuxième pour lui et la 301 au troisième étage pour ma part. J'ai bien vu que notre passage n'est pas passé inaperçu, mais curieusement, cela ne m'a pas plus dérangé que ça.

John Murphy » The 100 AUWhere stories live. Discover now