Chapitre 1

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Ceci est mon histoire, celle d'une fille de scientifique qui du haut de ses seize ans n'aurait jamais imaginé qu'elle prendrait un jour une si importante place dans ce monde. Mais écoutez plutôt, entendez-vous ce battement ? C'est la gravité qui avance, elle est là.


Bon pour commencer voyons le contexte, 10 juillet 2024, c'est ce jour que mon père a finalisé la cryogénisation. Bien entendu on peut penser qu'utiliser sa fille pour tester une telle machine est un crime paternel d'une ampleur extraordinaire. Mais il n'en ai rien. Mon père m'a demandé si j'étais sûre, de vouloir être la première personne à entrer dans cette machine, qui n'avait jamais été testée sur un être humain. On m'a crue folle quand j'ai dit que oui, que je l'avais attendu toute ma vie, ce moment où "elle" me dirait d'y aller. Quand on me demandait qui elle était je répondais " elle est tout, elle résume le fait que vous teniez debout, que vous ne pouvez pas lancer une balle au ciel sans qu'inévitablement elle retombe. Elle s'appelle Gravity." On m'avait dit que personnaliser une entité physique aussi exceptionnelle que la gravité était un blasphème envers la science, que j'étais folle. Je m'en fichais, après tout quoi ? Ces scientifiques n'avaient juste pas la chance de parler avec elle.
Un mois après la finalisation de son invention, mon père me mît en garde, il ne savait pas exactement quand je me réveillerai, il ne savait même pas si je me réveillerai un jour. Je ne saurais dire la suite, j'ai passé plusieurs années de ma "vie" dans une cabine de froid à -196 °C. Et c'est aujourd'hui que je me réveille.
Je déteste le froid et je me retrouve en plein dedans. Je lève doucement ma main pendant que l'eau chaude termine de réchauffer ma peau, ma main est la même qu'avant, celle d'une fille de seize ans.
—Mon dieu elle est réveillée !! C'est incroyable ! Venez vite, apportez moi de quoi vérifier son état de santé !
Je me lève, mes jambes chavirent, en même temps ca doit faire longtemps qu'elles n'ont pas fonctionné. Les scientifiques ne ressemblent pas le moins du monde à ceux qui m'ont faite entrer dans cette machine, ils sont tous habillés de bleu, leurs vêtements ne ressemblent à rien que j'ai vu, ils ont tous l'air jeunes.
—Ca fait combien de temps que je dors ?
—76 ans, 40 jours et 15 heures mademoiselle.
—Pardon ?
—C'est le choc mademoiselle, ca va aller.
Le professeur prend ma tension et prélève mon sang.
J'ai envie de pleurer, mais ca veut dire que je suis en l'an 2100 !
—Mon père ! Le professeur est-il encore en vie ?...
—Je suis désolé mademoiselle, nos élixirs de jeunesses ne rallongent pas la vie, ils changent juste l'apparence. Votre père repose au sanctuaire blanc.
Mais pourquoi, papa pourquoi ? Pourquoi tu m'a laissée là-dedans plus d'un demi-siècle ? Pour quoi faire ? Tu seras toujours seule, c'est ca de jouer avec le temps.
—Tais-toi Gravity !
J'ai hurlé devant les yeux ébahis des scientifiques. Ceux-là aussi vont me croire folle.
—J'ai... Faim...
—Oh c'est normal ! Je vais vous conduire à votre chambre !
Je me sens seule, ce n'est pas mon époque, pas ma ville, elle est si grande. Napolis.
Je ne comprend pas ce que Gravity veut dire, c'est quoi Napolis ? Vas là-bas sauver le monde. Tu le dois Alyss.
Paris ne ressemble plus du tout au Paris que j'ai connu, je traverse un pont fait de briques blanches, le sanctuaire blanc est dédié au chercheurs qui ont marqués l'histoire. Je me penche sur la tombe de mon père, j'ai tellement besoin de le pleurer.
—Tu l'a entendue hein ? Gravity papa, tu l'avais entendue, elle t'a dit que tu devais me cryogeniser...
Je tape sur la tombe.
—Et toi imbecile tu l'a écoutée !
Je pleure toute la nuit durant, sur cette tombe blanche.
Je me suis renseignée, Napolis est une ville du sud de l'Angleterre, il me faudra sans doute plusieurs jours pour l'atteindre à pied, mais il y a le train, le train de dessous la terre.
La gare de Paris est reliée à plusieurs trains souterrains tous à destinations différentes. Les scientifiques m'ont donné l'argent que mon père avait mît de côté pour moi, ils voulaient que la presse s'empare du scoop qu'est mon réveil mais je me suis enfuie. Je n'ai aucune envie de finir comme cobaye dans un laboratoire, je tiens à ma liberté, et puis visiblement j'ai des choses à accomplir qui me dépassent et de loin. Je les aies dans ma poche, le billes gravitationnelles que j'ai élaborées, elles permettent de diminuer la gravité effectuée sur le corps une fois absorbées et diluées dans le  sang. Avant que je rentre dans la cabine de cryogenisation mon père m'a dit qu'il les mettais de côté pour moi. Mais pourquoi ? La gare est immense, elle ne ressemble plus du tout à celle d'il y a 76 ans. Un couple est assis sur un banc, la femme paraît avoir la vingtaine, les cheveux courts et l'homme le même âge avec des cheveux en bataille, quel âge réel ont ils ? Ils portent tous des bracelets de couleur blanche. Je me tourne vers un homme réellement âgé qui me sourit.
—Monsieur c'est quoi ces bracelets que vous portez tous ?
—Oh ça ! Ce sont des bracelets de maintien gravitationnel. Tu n'es pas d'ici ? Tu n'en as pas ? Mais tu dois vite en trouver un !
—Disons simplement que je ne suis pas de cette époque. Mais pourquoi vous avez ça ?
—La gravité, elle a dangereusement augmenté ces dernières années, de plus de 50% selon les scientifiques. Les gens riches portent des exo-squelettes, les gens pauvres comme nous portons des bracelets élaborés par le professeur Latollah, ils ne sont pas extrêmement efficaces mais en ces temps de crise on fait avec ce qu'on a.
Soudain son regard change il regarde terrifié derrière moi. Je me retourne violemment et j'aperçois une masse noire qui avance. Les choses à ses alentours s'effondrent, comme si c'était la gravité qui la contrôlait. Les gens hurlent, j'entraîne le vieil homme avec moi. Si cette chose est réellement la gravité alors ceux qui se feront engloutir verront leurs os se casser, leurs chair se déchiqueter. J'aperçois déjà le couple affolé se faire avaler par la gravité, à l'intérieur c'est le vide absolu, où seule une puissance de gravité infini persiste. Pourquoi ? Pourquoi Gravity deviendrait ainsi ?
Elle avance si rapidement, le train automatique s'apprête à partir, je pousse le vieil homme dans un wagon et me dépêche de le suivre, la masse noire commence à engloutir le côté du wagon d'acier trempé, comme une affreuse bête qui plante ses crocs dans le metal. La gravité me touche, c'est la fin, ma seule amie va me détruire. Je m'évanouie.
Je suis dans un espace blanc éblouissant, une femme qui me ressemble avec des signes bleus et des yeux blancs me regarde en souriant.
—Gravity ?...
—En quelque sorte.
Sa voix résonne dans la salle.
—Gravity n'a jamais existé, il n'y a que moi, je t'ai laissée m'appeler ainsi depuis tout ce temps. Mon vrai nom est Alyss... Je suis la toi du futur, je suis toi en l'an 3000. Tu vas mener des guerres planétaires Alyss, indéfiniment. La gravité n'est pas une entité, tu ne peux pas la personnaliser. Tu as un don.
—Mais je viens de me faire avaler par la gravité.
—Justement, tu es née le jour où l'astéroïde Cassiopée est tombée sur la terre, exactement le même jour, à la même seconde. Ce don vient de là et te protégera.
—Mais qu'est-ce que ça fait ? Et puis pourquoi il y a cette masse ?
—Pour ce qui est de ton don, patiente, tu comprendra un jour. Pour ce qui est de la gravité, les scientifiques ont fait des expériences trop dangereuses et cela a déréglé trop de choses. Bats-toi Alyss, ne reproduit pas mes erreurs, je ne peux plus te guider à présent, tu le dois Alyss. Je suis toi et tu es moi.
—Ca veut dire que j'ai toujours été seule ?...
—Bientôt tu ne le seras plus.

Centre de gravité Where stories live. Discover now