Chapitre 2

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Viktor regardait le village d'un air morne avant de tourner le dos à l'endroit où il avait séjourné depuis dix ans maintenant. Il ne ressentait rien, hormis un léger regret à l'idée de laisser le manoir. Ce genre de bicoque confortable était rare de nos jours, il se demandait s'il parviendrait à se trouver un tel refuge dans son prochain village.

Il marcha pendant quelques temps à l'écart des villes, tout simplement errant. Il n'avait pas vraiment d'endroit où aller, et se contenter de l'ombre familière de la pénombre pour avancer. Il longeait les fôret, suivait l'obscurité presque comme s'il marchait aux côtés d'une vieille amie.

Et peut-être était-ce le cas.

Un craquement se fit entendre derrière lui, et Viktor se redressa légèrement. Il tendit l'oreille en songeant qu'une bête avait peut-être pris la fuite en l'entendant. Seulement la forêt resta silencieuse, et il crut simplement que sa folie prenait le dessus. Alors il continua à faire quelques pas, ne prenant même pas la peine d'écarter les branches qui lui barraient le chemin et menaçaient de le faire chuter.

C'est alors qu'il l'entendit. Le grognement.

Pour la première fois depuis longtemps, Viktor se sentit traqué. Il tourna quelques secondes sur lui-même, tentant d'apercevoir ne serait-ce qu'une ombre. Son instinct lui criait de prendre la fuite, mais le garçon resta immobile, tendant l'oreille. Le silence se faisait oppressant autour de lui et il sourit en se disant que deux cents ans plus tôt, son coeur aurait battu la chamade comme jamais.

Seulement, son coeur était gelé et la seule trace de frayeur qu'on pouvait lire sur le visage du garçon, c'étaient ses lèvres retroussées, comme s'il était prêt à planter ses canines dès que le danger se montrerait.

C'est alors qu'un éclat de rire tonitruant retentit vers sa gauche et Viktor n'eut pas le temps d'esquisser un mouvement qu'il se retrouvait plaqué contre l'arbre le plus proche. Il regretta pendant un moment d'avoir voulu s'enfuir par la forêt. Peut-être qu'il aurait dû attendre la nuit et traverser la ville. Peut-être que cela lui aurait évité des ennuies.

Car assurément, une créature capable de le pousser ainsi devait représenter un sacré paquet d'embrouilles. Il releva le regard vers la chose qui le tenait prisonnière, et fut surpris de découvrir un être semblable à lui.

Un homme qui n'en était pas un.

Viktor n'avait jamais vraiment songé que d'autres personnes comme lui, comme elle, puissent exister. Il avait toujours pensé qu'ils étaient seuls, frappés par une malédiction sordide. Cependant, cette homme aux cheveux sombre attachés en une queue de cheval et les yeux pétillants ne pouvait être un simple mortel. Ces habits sortaient d'une époque totalement étrangère, même pour le jeune garçon. Autant dire qu'il devait dater de quelques siècles.

-Quel jeune poulain nous avons là, ricana l'homme en se reculant légèrement, comme pour mieux l'observer.

Viktor fut tenter de montrer les crocs une nouvelle fois, mais le vampire l'en empêcha d'un regard noir.

-Tu ne veux pas jouer à ce jeu-là, gamin, le mit-il en garde et c'est alors que Viktor remarqua le cache-œil qui camouflait une partie de son regard.
-Qui êtes-vous?
-Un vieil homme, se contenta de répondre l'autre et le garçon avait envie de répliquer.

Il tenta d'envisager une fuite, se demanda si cela valait la peine d'essayer. Deux cents ans avait été suffisant pour lui apprendre à réfléchir mûrement ses décisions, et il était bien moins intrépide qu'autrefois. Il finit par conclure que l'homme le rattraperait avant qu'il ne puisse réellement aller loin, et il décida de rester là pour le moment.

Entre nos crocsKde žijí příběhy. Začni objevovat