Chapitre 21

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J'ai été réveillée par le hurlement des sirènes. Je n'ai pas cherché à comprendre et me suis enfuie en vitesse, encore tout embrumée. Tout se mélangeait dans ma tête, les souvenirs s'entrechoquaient pareils à des plaques tectoniques, créant des séismes dans mon esprit. Mon instinct me soufflait que je devais déguerpir le plus vite possible mais mon cerveau ne voulait pas m'avouer pourquoi. C'était terriblement frustrant comme sensation. Comme si j'avais toutes les images à portée de main mais que j'étais aveugle. Un brouillard impénétrable, voilà tout ce que je voyais. Cependant j'ai continué à courir, poussée par une force invisible. Il ne fallait pas qu'on me voie. Je devais me fondre dans la nature telle la mousse sur le sol.

C'était inquiétant. Que faisaient ces voitures de police devant chez Franklin ?

Franklin... Oui... Oui c'est ça ! Non. Non non non. Ça ne pouvait pas être cela. Si ? Non. Oh que si.

Les photos ont déferlé méchamment contre les rives de ma raison, détruisant la digue de protection. Ça allait trop vite, c'était trop fort. J'ai été submergée. Je me suis laissée engloutir par le flot. Je n'arrivais plus à respirer, j'étais en train de me noyer. À L'AIDE ! Ohé ! Je hoquetais, l'horreur s'infiltrant par tous les pores de ma peau.

《 La porte de la maison est ouverte. Je suis devant parce que le jour commence à se lever et que je n'ai nulle part où aller. Je ne peux pas rester dans la rue, surtout pas après ce que j'ai fait. Et je ne sais pas où habites Evan. La lumière du salon filtre par la fenêtre. Il y a quelqu'un. Sentiment de peur. 》

《 Franklin est debout dans la cuisine. Il est de dos, ne me voit pas. Je ne comprends pas. Où était-il ? Est-ce vraiment lui d'ailleurs ? Peut-être même que j'hallucine. Cependant je sais que c'est lui. Je le sens.  Sentiment de soulagement. 》

《 À présent il est tourné vers moi et me sourit. D'un rictus mauvais. Sentiment d'incompréhension. 》

《 Je percute. Sentiment de révolte 》

Je luttais de toutes mes forces pour arrêter le diaporama de l'horreur. Je ne voulais pas voir ça, j'avais besoin de respirer. Juste une bouffée d'air frais. Mais à quoi bon tenter de remonter à la surface lorsqu'une trombe d'eau vous tombe en permanence sur la tête ? Je me suis abandonnée à mes souvenirs.

《 C'est lui. Oui c'est lui qui a tué ces gens. C'est lui qui m'a fait passer pour une personne que je n'étais pas. Étais. Parce que maintenant c'est trop tard. C'est de sa faute si j'en suis là maintenant. J'aurais dû comprendre dès le début. Comment ai-je pu être aussi naïve ? Comment peut-on faire confiance à quelqu'un qui entasse des carcasses d'animaux torturés dans son jardin ? Dieu ce que j'ai pu être stupide. Mais pourquoi il les a tués ? Et comment a-t-il fait pour me rendre coupable ? 》

《 - Alors ? C'était comment ? m'a-t-il demandé d'un ton beaucoup trop avide de détails  à mon goût.
- De quoi tu parles ? ai-je répondu d'un air plein de menaces.
- De ton passage à l'acte voyons ! s'est-il étonné.

Voyant que je ne répondais pas, il a continué. Il n'aurait pas dû. Sans le savoir il était en train de signer son arrêt de mort. Je l'ai écouté parlé tout en mettant au point un plan machiavélique.

- Je savais que tu y arriverais. Je savais que tu étais taillée pour ça. C'est ta raison d'être. Divincontrôlable.

Plus de sauvagerie. La pression était retombée. Je n'avais plus qu'un profond besoin de vengeance. Profond, pas puissant. Mais assez brûlant pour me donner envie de l'éradiquer.

- Sans toi je ne serais jamais passé à l'acte tu sais ? J'ai toujours été trop peureux pour ça. Je me suis toujours pissé dessus à l'idée de me faire choper. Je n'assume pas ma différence. Mais maintenant tu es là. Tu t'assumes pleinement. Et tout le monde pense que tu es l'auteur des récents massacres. Merci Lucie, merci. Tu m'as permis de me libérer.

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