Chapitre 22

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Mes paupières tremblèrent, dérangées par les rayons lumineux qui passaient par la fenêtre en face, et venaient réchauffer ma peau. Des doigts effleuraient tendrement le long de mon dos. Un doux frisson parcourut mon échine.

Quand un soupir d'aise m'échappa, le rire matinal de Keith s'éleva, et je le sentis déposer un baiser entre mes omoplates. Allongé près de moi, un bras laissé sur ma taille, sa respiration caressait le bas de ma nuque.

C'était une matinée incroyablement tranquille.

Loin de mes réveils agités habituels. Sans souvenirs amers ou sensations désagréables.

Et après la nuit que nous venions de passer, je m'attendais au moins à ressentir cet agacement fréquent qui ponctuait chacun de mes ébats. Cette envie de solitude. Mais non. Il n'y avait aujourd'hui que le plaisir de sentir son corps contre le mien. De profiter de la tendresse qu'il daignait bien m'accorder. De sourire en vivant ces niaiseries qui me braquaient tant auparavant.

C'était nouveau. Agréable. Ça me donnait une impression de sûreté. J'espérai inconsciemment que ce moment dure, encore et encore, car j'ignorais quand serait la prochaine fois dans un tel instant de plénitude. Et comme s'il partageait les mêmes pensées, Keith garda le silence, se contentant de poser quelques bisous, ici et là. Passant le bout de ses doigts sur mon dos. Je devinais à leurs mouvements qu'ils traçaient aléatoirement les lignes des dessins d'encre qui recouvraient mon épiderme.

Je me tournai enfin vers lui, et souris intérieurement face au regard doux et endormi qu'il posait sur moi. J'ignorais ce qui me valait tant d'affection de sa part mais je l'appréciais. Sa main quitta mon dos pour venir sur ma joue, et j'embrassai sa paume, les yeux clos. Il pouffa discrètement, me couvant du regard tout le long.

— Tu vas bien ? dit-il enfin, sa voix enrouée, et chargée de sommeil.
— C'est plutôt à moi de te poser la question, répliquai-je, amusé, avec cette même voix rauque.

Un grand sourire étira ses commissures.

— Je prends ça pour un oui, fis-je, amusé.

Je n'irai pas jusqu'à dire que je doutais de mes capacités dans ce domaine. Keith était peut-être mon premier homme, mais il n'était pas ma première expérience anale. Cependant, pour une raison inconnue, je me demandais un peu s'il le regretterait à son réveil.

Plusieurs de mes partenaires avant lui l'avaient été. Parce qu'elles s'attendaient à je ne savais quelle affection de ma part. Sans doute celle que je vivais avec Keith à cet instant mais que je n'avais eu l'envie de vivre avec elles. Et se trouvaient souvent déçues lorsque je ne répondais pas à leurs attentes. Et bien que mon comportement aujourd'hui s'était adouci, j'ignorais ce qu'attendait Keith de moi. Je continuais à agir comme bon me semblait mais rien ne m'assurait qu'il y trouverait son compte.

Notre calme ne dura malheureusement pas ; il fut très vite interrompu par mon portable. Pour la énième fois depuis hier soir, je le laissai vibrer, ignorant Helen qui ne cessait de me joindre. Je pouvais deviner son inquiétude mais je n'eus aucune volonté de la subir. Encore moins alors qu'il ne s'était rien passé. Et pour cause ! Je n'y étais allé qu'en tant que cavalier de Keith, pas comme un orphelin en quête de réponse sur son identité ! Ce que je devais connaître à mon sujet, Helen m'en avait déjà fait part, et je n'avais aucun désir à en savoir plus.

Je n'avais donc rien à lui rapporter sur ma situation. Ah si... Je pouvais lui révéler l'absence de lien de parenté entre Keith et moi. Que cet homme – à qui je ressemblais étrangement – soit mon père ou non, Keith et moi ne serions jamais frères.

J'observais mon petit bâtard s'extirper du lit, complétement nu, pour partir à la recherche de son portable sonnant à son tour. Il avait été laissé à l'abandon dans un coin de la pièce la veille, et, trop occupés à autre chose, nous n'avions pas pris la peine de les récupérer. Il décrocha dès l'instant où il vit qui l'appelait. Je râlai, prenant conscience de l'identité de son interlocuteur à sa façon de lui répondre... Helen devrait réellement arrêter de passer par Keith pour me fliquer, et Keith de coopérer aussi aisément, consciemment ou inconsciemment. Il mentit sur la raison de mon silence, prétextant que je dormais encore. Helen savait pertinemment comment je fonctionnais ; je ne la crus pas assez dupe pour croire à ce mensonge. Elle s'était certainement dite qu'insister ne mènerait à rien, et s'en était tenu à l'explication de Keith avant de raccrocher.

Be Careful [Réécriture ET Correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant