Bonus 3 : Baiser piégé.

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Quelques jours avant que les Surnaturels ne partent à la rescousse de Tessia à Ataraxia...


J'ai hâte. Tellement hâte qu'il s'endorme. Si impatiente que mon cœur tient à peine en place dans ma poitrine. Si tant est que j'en ai réellement un. Ces derniers mois, on m'a souvent fait comprendre que je n'étais qu'un monstre. Un monstre sans cœur, dépourvu de toute humanité, annonciateur de souffrances et de morts. Ces mots m'ont été répétés tellement de fois que j'ai fini par m'y faire. Par les croire. Par me persuader qu'un monstre n'a pas de cœur. Il ne peut pas en avoir. Les battements que j'entends résonner à l'intérieur de moi ne sont autres que le fruit de ma propre imagination, et rien d'autre.

-Toujours aussi ponctuelle, résonne sa voix.

-Toujours, murmuré-je.

Je lisse les rares petits plis de ma robe noire agrémentée de dentelle et me rapproche doucement de lui, un sourire naissant au bord de mes lèvres rouge sang. C'est fou comme il me ressemble. Il me dépasse un peu niveau taille, mais niveau ressemblance faciale, il n'y a pas photo. Cela m'étonne qu'aujourd'hui encore, personne ne l'ait compris. Pas même lui.

Je suis prête à parier qu'au fond de lui, il doit s'en douter. Il ne peut pas nier cette ressemblance, ni ce besoin qu'il a de répondre à l'appel de l'instrument précieux détenu actuellement par mes mains.

-Prêt à entendre la vérité, mon cher Isaac ?

-Je n'ai pas vraiment le choix, cingle ce dernier.

Ses yeux marron me transpercent du regard avec toute la haine que j'ai désormais pris l'habitude de voir dans chaque personne osant poser les yeux sur moi. Je sais qu'il concentre toute son attention sur moi pour éviter de regarder la fourche. Il croit peut-être que cela fonctionne, mais ce qu'il ignore, c'est que l'appel deviendra de plus en plus fort à mesure qu'il osera le repousser. Et tôt ou tard, il y succombera.

-Je te promets que je ne lui ferai aucun mal, tu as ma parole.

-Encore faudrait-il que la parole d'une Démone vaille quelque chose.

Il est clair que d'ordinaire, je tiens rarement ma parole. Mais parfois, il m'arrive d'y parvenir. Tout dépend des événements à venir.

-De toute façon, comme tu l'as si bien dit, tu n'as pas le choix.

Je souris un peu plus afin de le provoquer.

-Dis-le moi, qu'on en finisse.

Je ferme les yeux afin de faire apparaître, derrière lui, un tabouret noir. Je ne me lasserai jamais des effractions de rêve. Pouvoir tout contrôler est quelque chose de difficile à atteindre. Or, dans une effraction de rêve, il n'y a rien de plus simple. Je peux faire apparaître ce qu'il me chante. C'est moi qui détermine le début et la fin du rêve. Moi, et personne d'autre.

Les tabourets noirs sont devenus ma signature. Je me souviendrai toujours de ces maudit tabourets noirs dans les centres d'accueil à l'orphelinat. Partout. C'étaient tous les mêmes. Des tabourets noirs, sur lesquels je devais attendre qu'une famille vienne me chercher, avant de finalement se restreindre et de déposer son dévolu sur un autre gamin. Pourtant, on m'assurait presque à chaque fois que cette fois-ci serait la bonne. Que je m'en irai une bonne fois pour toutes de l'orphelinat. C'est à croire qu'ils voyaient en moi une bête affreuse, pour se restreindre au dernier moment. J'étais condamnée à attendre, perpétuellement, sur ces tabourets noirs.

Je n'avais jamais compris pourquoi tout le monde se restreignait à m'adopter. Je faisais pourtant tout ce qu'il fallait. Je suivais les consignes. Je ne faisais pas de bêtises. Et, malgré tout, ça ne m'a mené nul part. Et cela m'aurait toujours mené à nul part. Seulement, je ne m'en suis rendue compte que trop tard. Tout ça, c'est la faute d'Évalina.

Surnaturels Tome 1 : Mystères. [Publié chez INCEPTIO EDITIONS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant