26) Bâton dans le carré

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Il y a toujours des messages subliminaux dans mes textes. Je n'écris pas pour les poules.
Bonjour et bienvenue aux nouveaux Ninjas furtifs que j'aperçois dans mes notifs, j'espère que vous n'êtes pas trop effrayés par les délurés qui trainent par là.

Mettez vos snaps ici :

Au passage, merci à ma petite RoxaneMida qui a fait preuve d'une immense patience. Ma gratitude est infinie, tu m'as fait découvrir un nouveau monde.

Bonne lecture !

Je n'ai pas allumé mon téléphone depuis que je suis arrivée chez ma grand-mère. C'était il y a 3 jours.
J'ai trop peur qu'il n'ait pas essayé de me joindre.

Il est toujours plus agréable de vivre dans l'illusion que l'on est aimé que d'affronter la vérité et de réaliser qu'en vérité, on est seul.
J'ai toujours préféré me bercer d'incertitudes, certains appellent ça de la lâcheté.

Il ne connaît pas la maison perdue dans la campagne où je réside actuellement.
Je voulais l'emmener ici pour lui présenter l'un des lieux où je me permets d'être pleinement moi, sans masque ni faux semblant.
L'endroit qui a accueilli mes premiers pas et mes dernières peines. Qui a été mon berceau, est mon refuge et sera ma tombe.
Heureusement que je ne lui ai pas dévoilé ce petit bout de liberté, au moins je suis sûr d'y être tranquille.

Mamie m'a levé à l'aube et m'a obligée à traire les vaches.
Ça faisait une éternité que je n'avais pas aidé quelqu'un sans attendre une quelconque contrepartie.
Juste rendre service bénévolement. Le regard attendri et le sourire reconnaissant de mon aïeule furent ma seule récompense.
Amplement suffisante à y bien penser.
Je suis entrain de remettre en question mes habitudes, ma mentalité, ma façon de vivre, moi tout entier. Je change, j'évolue, je grandis. Et ça me fait peur.

Ce n'est pas comme ça que j'avais imaginé ma vie.
Quand j'avais cinq ans, je rêvais de châteaux géants et de princesses à délivrer.
Il faut croire qu'aider c'est bien aussi. Au moins ça donne un sens à ma putain de vie.
Je dois arrêter de courir après Harry. Je dois cesser de vivre dans son ombre, me prendre en main et devenir quelqu'un par moi-même.

J'avais réellement besoin de prendre ce moment de réflexion. L'éloignement et le temps m'ont ouvert les yeux.

Je me suis rendue compte que la chose qui pouvait être la plus dangereuse pour moi-même était seulement mon propre reflet. A trop me regarder dans la glace, je me perds dans les limbes de l'infini.

Je ne peux pas rester ici plus longtemps, ma vie réelle ne se trouve pas là.
Il est temps d'affronter la réalité, une bonne fois pour toutes.

***

Je suis dans un bar.
Seul.
Un samedi soir.
Avec trois verres vides devant moi.
Et le pire, c'est que j'ai conscience de faire pitié.

Évidemment que je ne suis pas allé demander des comptes à Harry. Je suis trop peureux pour l'affronter.
Ne voulant pas connaître la déception, je lui préfère l'incertitude.

Quelques notes de musique retentissent. Les murmures s'effacent peu à peu. Et une voix que j'évite soigneusement d'entendre depuis plus d'une semaine emplit toute la pièce.

Suave. Puissante. Grave. Réconfortante.

Chaleureuse. Agréable. Mélodieuse. Reconnaissable. Soyeuse. Ardente.

Attirante. Délicieuse. Troublante. Lascive. Captivante. Profonde.

Je me laisse glisser dans un état second, comme porté par lui tout entier.
Il ne peut pas être là alors que je suis bourré. Mais mon cœur s'en moque, il s'emballe sans mon accord.
Une minute après, je suis debout, m'approchant quasi inconsciemment de la scène de fortune où il se trouve. J'ai la sensation d'halluciner, je vais finir par me réveiller. Cela ne peut pas être la réalité. Ceci ne peut pas se passer alors que je ne suis pas en pleine possession de mes moyens.

Sa voix prend tout l'espace disponible :

Dis moi si tu aimes nos paresses et nos matins d'amoureux.
Dis moi que c'est un début mais que tu vois déjà la suite à deux.
Dis moi que je suis le seul que tu n'aies jamais autant désiré.

Avec toi c'est évident, je suis prêt à oublier mon passé.
J'ai toujours aimé charmer mais peu importe s'il n'y a qu'à toi que je plais.

Je me dis que c'est toi, et je sais que tu y crois.

Tu es celui qui rythme mes bonheurs, qui rythme mes humeurs juste comme ça.

Pardonne moi mes doutes et mes colères, le temps fera l'affaire.

J'aime les airs assurés que tu empruntes aux plus beaux monuments,
ton regard doux comme un secret et tes caresses aux limites de l'indécent.

Tu comprends tous mes silences, chacun de mes petits moments d'absence.
Si je vais au paradis, je ne suis pas sur de voir la différence.
Je me dis : prenons des risques. Et de toute façon c'est trop tard !
Au pire on aura des souvenirs, des jolis moments dans les tiroirs

J'ai peur de ta gentillesse, elle promet tant de bonheur.

Toi et moi, ça ira.

À la fin de sa chanson, il descend de l'estrade et s'avance dans ma direction. Je ne lui laisse pas le temps de parler.
A fleur de peau, je lui lance agressivement :
- Tu croyais quoi ? Qu'il te suffirait de revenir la bouche en cœur avec une jolie chanson d'amour pour que tout recommence ? Ce n'est pas aussi simple et...

Il m'embrasse pour me faire taire.
Sans prévenir.
Avec une passion dévorante qui enflamme tout mon être.
Je ne pense même pas à me dégager de son emprise.
Je ne comprends pas vraiment pourquoi il me donne un si beau baiser.
C'est si soudain, et totalement incompréhensible. Mon cerveau, embrumé par l'alcool, ne parvient pas à assembler des pensées cohérentes.

L'arrière gout est amer, comme s'il me faisait passer un message déchirant mais inévitable.
Dès lors, la vérité s'impose à moi : c'est un adieu.

Réalisant la situation, je le repousse violemment et tourne les talons sans un regard de plus.
Je reste sourd à ses supplications et me mets à courir du plus vite que je peux. Il ne tente pas de me rattraper.

Une larme solitaire coule le long de ma joue.
Évidemment que je ne suis pas resté de marbre devant sa petite mise en scène et son baiser brulant. L'insensibilité n'est pas ma plus grande qualité.

***

Je n'ai pas revu Harry les jours qui ont suivi. J'ai supprimé tous ses messages sans les lire et j'ai bloqué son numéro.

Pour autant, je ne me sens pas plus libre.

Alors j'ai décidé de lui écrire une lettre. Il mérite de savoir ce qui se passe dans ma tete.

Harry,
Ce pourquoi tu m'aimais avant, à savoir mon caractère, te fait me haïr maintenant.
Mon inconstance t'épuise. Elle me fatigue aussi.

Je sais que je devrais faire un travail sur moi-même. Mais je ne veux pas le réaliser. Et tu ne peux pas m'y obliger.

Tu ne peux pas sauver quelqu'un qui ne veut pas l'être.
Je te demande donc de tracer ton chemin, je ne me fais pas de soucis pour toi. Tu es une personne formidable, d'autres le remarqueront également.

Il faut se rendre à l'évidence, nous ne sommes pas fait l'un pour l'autre.

Merci pour tout ce que tu as pu m'offrir.
Je t'aimerais toujours.
Louis

***

Mon mari dépose un immense gateau avec bon nombre de bougies plantées dessus.
- Joyeux anniversaire chéri. Alors ça te fait quel âge ?
Je fais semblant de grogner :
- Je sais que je suis vieux, pas besoin de me le rappeler.
Il m'embrasse dans le cou en gloussant :
- Ca ne te fait que 38 ans, ne dramatise pas non plus. Tu restes jeune dans ta tête Lou.
- Mais plus dans mon corps ?

Il lève les yeux au ciel, amusé :

- Il est hors de question que l'on ait encore une fois cette discussion.

- Ok ok. Allez Roy , on le mange ce dessert ?

OS Larry Où les histoires vivent. Découvrez maintenant