La Fugue

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« Samedi 20 mars 1867 :

Non ! J'écris non ! Je ne me laisserai pas faire, j'ai le droit à ma liberté, rester toute ma vie enfermée avec cet homme répugnant à mes côtés ? Il n'en est pas question. Je refuse cet avenir qu'on veut m'imposer. Ce monsieur n'aura pas ma dot, je ne suis pas un objet tout de même ! Je ne veux pas d'une vie pareille, essayez de m'enfermer dans une prison dorée et je m'échapperai. Me contraindre à un futur qui me rendrait malheureuse pour la seule satisfaction de mon père ? Ce n'est pas dans mon caractère. Je vais enfin prendre ma vie en main, et il était grand temps. Demain, je suis censée me marier avec ce duc, alors il faut que j'agisse rapidement...

Tout compte fait, je sais déjà où aller et comment. Il ne me reste plus qu'à préparer mes affaires et à partir. De plus, j'ai déjà trouvé une carte de France dans les affaires de père !

Courage Jeanne ! »

C'est ainsi que débuta mon expédition, et résolue, telle que tu me connais, j'aurais pu franchir des montagnes pour échapper à mon mariage forcé, arrangé par notre père alors que je me trouvais être un tout petit enfant. Père était encore tout secoué du récent décès de notre mère, qui me fit le don de sa vie, et, par conséquent, il était influençable. Un jour que je cherchais dans les affaires de père un papier qu'il m'avait demandé de lui apporter, j'ai trouvé plusieurs lettres de grand-mère destinées à père et quelques unes aussi pour nous, ses petites-filles ; alors que selon les dires de père, notre grand-mère était décédée il y a de là plusieurs années. Par curiosité, bien que je sache que je n'aurais pas du, je les ai prises et je les ai lues. Cela m'a fait un grand choc de découvrir tout ce qu'il s'était, pendant des années, obligé à nous cacher. C'est ainsi que j'ai su qu'elle s'était installée à Saint-Malo et qu'elle s'était aussi catégoriquement opposée à ce mariage ; qu'elle m'avait défendue corps et âme, mais qu'il avait refusé de l'écouter. Dépitée et chassée, elle eut à se résoudre de partir loin de nous, à son plus grand malheur, père la laissant en proie à une grande inquiétude. C'est de là qu'il m'est venu l'idée de la rejoindre pour fuir mon mariage, car je savais qu'elle m'aiderait.

Avec le temps j'ai aussi compris qu'il avait eu peur pour mon avenir, ce qui m'a permis de le lui pardonner.

Le cœur lourd de te laisser là, à la colère de père, sans te prévenir, je partis à la tombée de la nuit. Bien heureusement, le courage ne me m'abandonna point du chemin.


Le vélo, c'est bon pour la santé!Donde viven las historias. Descúbrelo ahora