Chapitre 13

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« Allez Sherazi. C'est l'heure de descendre. »

J'ouvre à peine les yeux, incapable de concentrer mon attention sur un point fixe. Quelqu'un poussa ma civière hors de du van.

Au-dessus de moi le ciel est teinté de rose. Je lutte pour garder les yeux ouverts. Des agents de STRIKE surveillent le périmètre, arme à la main. Ils m'emmènent à l'intérieur d'un grand garage dans lequel un jet aux ailes repliées a commencé à faire tourner ses moteurs. Une file de véhicules noirs nous suivent au pas pour ne pas soulever trop de poussière. Les SUV  se garent contre le mur et plusieurs soldats en descendent. Le claquement des portières me fait sursauter. Ils grimpent à l'intérieur de l'avion et prennent place sur les sièges répartis contre les parois et en deux rangées au milieu.

Les deux derniers soulèvent la civière et la fixent contre le mur. La passerelle se soulève et ferme la cabine hermétiquement. Des ordres sont lancés, les conversations commencent à voix basse. Je ferme les yeux au moment où le jet s'élance dans les airs.

« Rumlow, elle va se vider de son sang si nous ne faisons rien, entends-je comme à travers du coton.

- Ne touche à rien, la colonne est atteinte. Elle survivra encore une heure jusqu'à la base, fais-moi confiance. Elle est solide. »

Une balle dans la colonne vertébrale. Merde. Je sais ce que ça veut dire : soit je ne me relève plus jamais et je profite de la retraite du SHIELD, dans un petit appartement avec une infirmière, ou les médecins parviennent à sauver ce qui peut l'être mais la rééducation prendra toute ma vie. Je ne travaillerai plus jamais sur le terrain. À cet instant, malgré la torpeur dans laquelle je suis plongée, mon monde vole en éclats. Quoiqu'il arrive, c'est fini. Je finis ma carrière handicapée à vingt-trois ans, à cause d'une balle, une seule balle, tirée dans le noir.

Au bout d'un long moment le jet se pose à nouveau sur le sol. Les agents de STRIKE se lèvent tous en même temps ; certains récupèrent les armes et d'autres abaissent la passerelle tandis que deux d'entre eux tirent mon brancard hors de l'avion. La forte lumière blanche me force à garder les yeux fermés, mais j'arrive, à l'odeur d'éther, à deviner que je suis dans un hôpital.

J'entends des conversations étouffées. Je cligne rapidement des paupières, le temps d'apercevoir au-dessus de moi deux chirurgiens, un homme et une femme. La civière roule en avant, emportée par les médecins qui crient des directives. Nous passons en trombe devant des chambres vitrées, dont l'intérieur est masqué par des rideaux blancs, jusqu'à entrer dans une salle de bloc opératoire.

Des mains me soulèvent et me retournent sur le ventre. Je n'ai même plus assez de forces pour protester. Mon tee-shirt déjà amoché est déchiré en deux et un liquide froid gicle sur mon dos. Un chirurgien s'accroupit pour mettre sa bouche contre mon oreille et dit d'une voix douce :

« Loïs, je vais avoir besoin que tu bouges tes orteils s'il te plaît. Je veux que tu les bouges sans arrêt, d'accord ? Ne t'arrête pas. »

Alors que je commence à remuer faiblement des orteils, une aiguille s'enfonce dans mon dos. Après ça, tout n'est que flashs flous de lumière et éclats de voix.

Quand je rouvre les yeux, je suis dans une chambre de l'hôpital. Des murs aux draps, tout est blanc. Ma tête commence à tourner et je referme les yeux, préférant m'appuyer sur mes autres sens. Curieusement, je ne suis pas allongée sur le dos mais sur le ventre, la tête tournée vers la gauche. Les draps sont frais contre ma peau brûlante. Je commence à remuer les doigts, mais ils sont pris dans de lourdes pinces. Je rouvre les yeux, toujours groggy, et constate qu'ils sont quasiment tous enfermés dans des instruments médicaux à l'exception de mon index, prisonnier d'un carcan métallique pour en guérir les fractures. Ma tête finit par tourner. Plus j'essaie de me concentrer, moins j'y parviens. Je me force à fermer les yeux jusqu'à me rendormir, sans prêter attention à la chaleur de ma peau ou à ma gorge asséchée.

CerberusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant