Condamnée

44 - Souffrant

Cher Rê,

Pourquoi? Pourquoi suis-je incapable? Incapable d'exprimer cette douceur si douloureuse?

Je t'en parle à toi mais n'est-ce pas à elle que je devrais en parler? N'est-elle pas la première concernée par ce que je ressens? Concernée elle l'est, c'est certain. Mais ne serait-elle pas fautive également? N'est-elle pas responsable de la douleur qui me déchire? N'est-elle pas coupable de me faire souffrir?

Elle est fautive sûrement. Mais je l'en remercie. Car cette douleur m'indique bien ce que j'avais tenté de renier. Elle me prouve que je ne suis plus en état de refouler mes sentiments.

Son départ si amer, si soudain, m'a détruit. Il me semblait que je ne le supporterai pas. En voyant son avion décoller et l'emporter si loin de moi, j'ai compris que je ne la laisserai plus jamais me quitter.

Si seulement tu avais vu la douleur sur son visage. Je savais que cette douleur était adressée à son père. Ce qu'elle ne savait pas, c'est que la mienne lui était adressée à elle. Peut-être l'a-t-elle vue. Peut-être l'a-t-elle seulement ignorer.

En tout cas, j'ai jugé plus prudent de ne pas lui parler de mes sentiments avant son départ. Je ne voulais pas la laisser emporter mes confessions avec elle, me laissant seul.

Cette douceur que j'avais finalement éprouvé à ses côtés, après tout ce que nous avions traversé, a hélas dû se transformer en douleur. La voir partir au loin pour affronter seule ces malheurs.

Comme une voleuse, elle a emporté cette chaleur qu'elle m'avait procurée lorsqu'elle était à mes côtés. Mais je ne lui en veut pas, pas le moins du monde. Au contraire, cela ne fait que me réjouir encore plus du moment où nous nous retrouverons. Dès que j'aurais fini ici, Rê, soit assuré que je la rejoindrai.

Lorsque nous nous retrouverons, ma douleur se dissipera. La sienne restera mais je serais là pour l'aider à soutenir cette peine. Je serais là pour la prendre dans mes bras et lui exposer une épaule sur laquelle pleurer si elle en aura besoin. Si elle aura besoin de moi, en général.

C'est ce que je lui reproche le plus: m'avoir laisser la peur. La peur de ne plus la revoir, la peur qu'elle n'ait plus besoin de moi, qu'elle ne veuille plus de moi.

Comment puis-je tant lui reprocher et pourtant l'aimer? Car oui, je l'aime. J'en suis certain à présent. Me prendras-tu pour un fou ou un imbécile? Si tu émettras ce jugement, sache que je respecterai tes paroles. Car je sais que tu ne l'as pas rencontrée. Si seulement tu l'avais vue, Rê, si seulement tu l'avais aperçue.

Tu aurais sûrement agi mieux que moi dès le début. Tu l'aurais traitée comme il se devait. Tu l'aurais couverte de douceur, d'amabilité et de bonheur. Tu lui aurais donné dès le début ce qu'elle méritait. J'ai commis des erreurs, beaucoup d'erreurs mais je peux te promettre que dès que je la retrouverai, je ferais d'elle la femme la plus heureuse qui soit.

Garde cette promesse bien au chaud et tu verras que je l'accomplirai du mieux que je puisse.

Osiris