Danse !

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La jeune fille marchait dans un couloir qui lui semblait sans fin. Son souffle irregulier était le seul son qui lui resonnait dans les oreilles. Elle ne connaissait pas encore cette sensation mais n'allait pas tarder à la connaitre que trop bien : le stress.Elle s'enferma dans une salle. Peu importe qu'il fasse sombre ou lumineux, que la pièce soit spacieuse ou étroite. Elle s'était remémorer le trajet par cœur.

Elle se souvint de ses chaussons posés sur la table, les attrapa d'un geste de la main maladroit les trempa dans le bac de talc après plusieurs tentatives ratées, les enfila, noua adroitement les rubans.

Elle prit sa robe pendante à un cintre et l'effleura imaginant chaque détail. Elle toucha d'une main précieuse la dentelle, la tule. Une voix forte lui signifia que les rideaux n'allaient pas tarder à s'ouvrir, signe que le stress n'allait pas tarder à monter en hausse chez certaines. Quelqu'un toqua lui indiquant qu'elle devait sortir et se préparer à entrer sur scène.

Elle descendit des escaliers entendant des murmures sur son passage mais elle s'en fichait royalement. Au contraire, ces murmures racontaient en quelque sorte le chemin parcouru. Ses yeux devenus bleus brillaient de fierté. Elle s'arrêta en bas de l'escalier une main l'arrêta et des bras l'étreignirent de façon chaleureuse. Elle réfléchit puis trouva la propriétaire de ce câlin. Après tout elle la reconnaitrait entre mille. Elle passa à son tour les bras autour de la taille de sa sœur jumelle et enfouie sa tête dans son cou en esquissant un sourire. Sa sœur était la seule à savoir réellement qui elle était.Elle lui reprocha son manque de maquillage, que la jeune fille balaya de la main. Elle voulait que le public admire sa prestation pas son visage orné de multiples cicatrices dû à un accident de la route où ses parents perdirent la vie. Mais à présent, elle s'apprêtait à rentrer sur scène pour son premier solo. On la pressa vers les coulisses. Elle entendait le public s'installer, débattre sur le livret qu'on leur avait donné à l'accueil. Elle souffla un bon coup, essaya tant bien que mal de calmer sa respiration irrégulière et ses doigts tremblants. Une main se posa sur son épaule, ce qui signifiait qu'elle allait bientôt rentrer sur scène.

Le rideau se leva, l'orchestre se mit à jouer et elle respira une derniere fois puis s'élança vers son destin, son rêve. La musique la guidait, lui disait quel pas faire à quel moment.Elle dansa avec une telle passion que le public cru à un ange. Elle ne sautait plus elle volait, ne tournait plus mais flottait. Elle sentait le public approbateur retenir son souffle, se demanda qui était cette fée. Puis la musique s'arrêta, et le charme fut rompu. Le public garda d'abord le silence apprenant enfin l'identité de la danseuse en face de lui puis un déchaînement d'applaudissements à n'en plus finir éclata en l'honneur de cette fée. La jeune fille souriait de toutes ses dents, les larmes dégoulinant sur ses joues et ses cicatrices sans s'arrêter. Elle l'avait fait.

Elle, la première danseuse démunie de la vue, avait reussi.

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