|| Chapitre 1: Maël ||

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" - Dégage.

Si tu reviens encore une fois, j'avale une boîte de clou.

Tu auras ma mort sur la conscience.

Et celles de tes enfants aussi. Je préfère qu'ils meurent plutôt qu'ils soient mêlés à tes histoires étranges.

Ils n'ont pas besoin d'un père comme toi.

Calme-toi ! S'il te plaît...

L'homme supplie, brisé comme un automate fragile.

La femme lui faisant face n'en peut plus, les larmes coulent sur son visage, brouillant ses traits. Son visage est dissimulé par les pleurs.

Lui, il se rassure. Il se dit que tout est sauvé. Que la tempête est calmée.

Bien sur que c'est vrai. Mais c'est un tsunami meurtrier qui agite désormais la mère.

Les traits de l'ombre se clarifient, s'amplifient tandis qu'elle relève doucement la tête. Sa colère grandit.

Sans un bruit, elle finit par se jeter sur lui, elle enlace son cou de ses longs doigts, elle l'étrangle ! Et moi, je veux hurler mais les mots ne sortent pas.

- Maël, réveille toi !

Elle va le tuer, si je ne fais rien, c'en est fini pour l'homme"

- Arrête !

Le cri a franchi mes lèvres , enfin.

- Du calme bibiche !

La voix explosa, un peu trop fortement dans mes tympans.

- J'y crois pas, tu dors comme un bébé alors que j'me tape des insomnies. La vie est injuste.

La voix était plus loin désormais, ou disons plus étouffée tellement elle était hargneuse.

- Une putain de sieste, nan mais mec... Une sieste !

J'ouvris enfin les yeux. Le soleil passant par la fenêtre entra violemment dans ma rétine, et la silhouette penchée sur moi m'apparut d'abord comme nimbée de lumière et de songes.

Mais une brusque tape sur le haut de mon crâne vint me sortir des bras de Morphée pour de bon.

- Bouge ton lard Maël, c'est injuste que tu dormes si bien.

Dans un grognement et un geste las, je fis valser un coussin vers l'apparition, ma soeur Abygaëlle.

Aby.

Sans surprise, il manqua sa cible et s'écrasa mollement sur ma bibliothèque dans un bruit amusant.

- Tentative de meurtre ! Je note que en plus de bien dormir, tu te payes l'insolence d'être ronchon au réveil.

Je souris malgré moi, amusé par les hyperboles constantes de ma frangine.

- Dégage, ou je te tue pour de bon.

C'étaient des paroles dans le vent, aussi sages soient-elles. Aby était déjà immergée dans le matelas à mes côtés, et son silence marquait l'idée d'une phrase prochaine plutôt intrusive.

- Maël... Ce cauchemar ? Tu l'as refait ?

Un soupir ricocha sur mon palais. Bingo. Touché coulé. Jackpot. La question pénétrait dans les tréfonds de mon jardin secret.

Sujet aux cauchemars depuis l'enfance, je n'avais jamais vu une utilité à m'en plaindre.

Mais un, plus particulièrement, revenait dans ma tête comme une mélodie entêtante. Le genre de musique qui ne te lâche pas et que tu fredonnes d'un air blasé.

Bêtement, j'en avais parlé à ma sœur entre deux insultes bienveillantes, et elle avait réagi au quart de tour, créant un lien farfelu entre l'accent de vérité de ses rêves et la teneur du mien.

Notre famille n'était pas poussé vers le spirituel, mais force était de constater que les songes de ma sœur étaient particuliers.

Particulièrement tristes.

Particulièrement sanglants.

Et particulièrement réalistes.

- Aby...

Elle tourna lentement la tête vers moi, et accrocha ses yeux aux miens. Elle était inquiète

Larguez les amarres et les excuses en vitesse.

- Je suis désolée pépette, mais j'ai toujours aucune envie d'en parler.

Ses yeux bleus ne quittèrent pas les miens. Attendant que je parle, que je me livre, en vain.

J'ébouriffai ses cheveux bruns et elle finit par esquisser un sourire volontairement forcé du plus bel effet.

- Tu te rappelles quand j'étais persuadée qu'être dans le même bahut que toi serait cool ?

Piqué au vif dans mon égo, j'attendis la suite,, le regard noir.

- Et maintenant, on traîne avec moi pour prendre contact avec toi. C'est épuisant.

- Épuisant ?

-Épuisant d'être la petite sœur du "beau gosse du lycée". Celui que tout le monde veut se taper, et qui repousse les plus beaux spécimens.

- Tu as hérité des gènes de la beauté aussi, arrête de te plaindre. C'est juste que t'es plus ouverte et accueillante que moi. Les gens viennent vers toi parce que tu es chaleureuse.

- Si être ouverte signifie, laisser sa chance aux gens et avoir une vie amoureuse...

Je l'interrompis.

- C'est exactement ce que ça signifie.

- Si tu en connais si bien la définition, peut être que tu pourrais pratiquer. Tu sais, embrasser des gens, donner de l'affection...

Je connaissais la liste par coeur, et décidait de couper court :

- Je sais Aby. Mais même si tout ça m'intéressait tu sais très bien que maman...

- Veut que tu restes puceau toute ta vie, merci je suis au courant, ironisa-t-elle en roulant des yeux.

Glissant tout près de moi, elle me saisit le bras et me tira hors du lit difficilement.

- Aller viens, on va courir avant le repas ! Il faut entretenir tout ce tas de muscle ! fit-elle en frappant mon ventre.

Un craquement s'ensuivit et je me préparai déjà à ses grands cris et ses tirades endiablées.

Bingo.

Touché coulé.

Jackpot.

Kazukos 1. Prophétie (En Cours De Réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant