|| Chapitre 5: Audrey ||

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En média Audrey.

Avec un sourire, j'écoutai mon frère, Driss, finir son histoire et les gamins qui buvaient ses paroles avec admiration, l'applaudir bruyamment, encore un peu sonnés.

Je ne me lassai pas de l'entendre parler, il avait un réel don pour ça. Un talent si reconnu que désormais, il avait monté son propre bussisness. Et il avait un réel succès ! A tel point que désormais, l'école privée la plus luxueuse de la ville , celle que mes parents adotpifs n'avaient pas réussi à nous offrir, l'embauchait pour des lectures qui les faisaient voyager. Une belle revanche sur le temps.

Aujourd'hui, Driss avait raconté l'histoire des femmes, les coutumes les concernant, variant d'un pays à l'autre. Sa douce voix avait fait frémir les gosses quand il avait décrit les conditions dans lesquelles elles vivaient et vivent encore. Les droits qu'elles n'avaient pas, les viols, la violence perpétuelle, le dédain irrespectueux qu'elles subissent, la difficulté pour trouver un métier, les insultes, les clichés et tout ce qui les concernaient. Mais aussi l'importance qu'elles représentaient, les sorcières, les chamanes... Toute cette atmosphère mystérieuse qui les entouraient parfois.

Enfin, les parents arrivèrent pour chercher leurs enfants. Je me levai et comme à mon habitude, installai une petite pancarte devant ma chaise. Pendant toute la prestation de Driss, les enfants avaient affichés des mines tantôt ébahies, tantôt horrifiées, quelquefois hilares. Et croquer leurs petites bouilles d'anges en deux trois coups de crayons avait toujours été un de mes plus grand plaisir. Mélangeant plaisir et travail, je vendais les plus réussis aux parents qui le voulaient bien quand ils venaient chercher leurs gosses à la fin des contes de mon frère.

Driss était conteur de contes, le plus doué qu'on puisse imaginer. Sa voix envoûtait, et nous transportait loin, très loin de ce quartier gris de pollution, noir de rage et de haine... Parents et enfants étaient subjugués : ils se réveillaient les yeux embrumés, la tête encore pleine des récits de mon frère.

Une légère secousse me sortit de mes pensées. Un petit tirait sur ma manche avec ardeur. Je le regardai et il me sourit en dévoilant quelques dents manquantes :

- Puis-je voir vos dessins, s'il vous plait ?

Surprise par sa voix qui sonnait plus mature que je ne l'avais imaginée, je plongeai mon regard dans le sien. Le gamin devait avoir huit ans, pas plus. Ses cheveux étaient un peu longs, bouclés et bruns, ils retombaient sur son sa jolie frimousse pâle avec élégance. Des lunettes rondes, aux montures très fines encadraient des yeux bruns mélancoliques. Le tout contrastait avec son sourire enfantin et dégageait un charme angélique apaisant. Quel étrange mélange que ce gosse !

Je me penchai pour attraper les croquis que j'avais fait et remarquai avec surprise, que le seul sur lequel il figurait était le plus réussi à mes yeux. Sa bouille concentrée, ses yeux noirs brillants d'intelligence, une main aidait son cou frêle à retenir sa tête bouclée et quelques mèches brunes éparses tombées sur son front blanc : une étrange mélancolie se dégageait du dessin.

Quand je relevai les yeux, le petit garçon fixait le dessin avec concentration, et finit par dire sans relever la tête :

- C'est très joli... Vous avez du talent !

Je souris, amusée par ce gosse qui faisait des phrases d'adultes avec une voix enfantine.

- Merci mon grand... Dis moi, c'est quoi ton nom ? m'enquis-je d'une voix douce.

- Crystal m'appelle Théo mais mon nom est Théophile.

- Et tu préfères quoi toi ? demandai-je avec un sourire.

- Il n'y a que Crystal qui peut mappeler Théo alors pour les autres c'est Théophile !

Je secouai la tête doucement : ce gosse était fascinant !

- Qui est Crystal ?

Une main se posa sur l'épaule de Théophile qui tressaillit et perdit son sourire mais ne se retourna pas. Je levai les yeux et tombai nez à nez avec un bonhomme blond, musclé, aux traits fins mais au nez un peu fort. Il m'adressa un sourire faux :

- Crystal est la mère de Théo, ma compagne, m'indiqua-t-il.

Théophile pâlit. Il n'avait pas l'air de porter le blond dans son cur.

- Je suis désolé qu'il vous est importuné. Allez viens Théo, on s'en va, lâcha-t-il en tirant sur l'épaule du petit garçon qui grimaça de douleur.

- On peut acheter le dessin ? cria celui ci en s'échappant de sa poigne et en désignant la pancarte des prix d'une main tremblante.

Le bonhomme se retourna et lui lança un regard noir :

- Non. Tu arrêtes d'embêter la jeune fille et tu viens avec moi où tu sais ce qu'il va se passer ! vociféra-t-il d'une voix glaciale.

Théophile vacilla comme s'il avait reçu une gifle et ses yeux bruns se remplirent de larmes.

- Monsieur, intervins-je d'une voix calme, Théophile ne me gêne pas, et je peux même vous donner le dessin si ça vous dérange de payer.

Le blond me fusilla du regard et attrapa Théophile par le bras d'un geste brusque.

- C'est aimable à vous mais il ne le mérite pas.

Sans rien écouter de ce qu'il me disait, j'avais déjà tranché la page du carnet à l'aide de mon rasoir et la roulai précautionneusement. Je m'agenouillai près du petit garçon qui tremblait tant qu'il pouvait et lui glissai le croquis dans la poche sous le regard désapprobateur de son beau-père.

Théophile me regarda avec un sourire tremblotant et tandis que je déposai un léger baiser sur sa joue, me glissa à l'oreille :

- Ce fut un plaisir de faire votre connaissance.J'espère avoir l'opportunité de vous revoir bientôt. Et merci pour le dessin, il est magnifique.

- Avec plaisir mon grand...

Ses joues s'allumèrent quelques peu d'une douce lumière rosée, comme si elles étaient éclairées de l'intérieur.

Mais déjà, le blond l'arrachait de devant moi et le tirai vers la sortie en lui criant dessus.

Je soupirai... Que le monde pouvait être bête parfois !

Kazukos 1. Prophétie (En Cours De Réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant