Chapitre Final : Cosmos

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- Racontes-moi ton histoire.

Momo secoua négativement la tête.

- C'est absurde, je te l'ai déjà dit.

- TOUTE ton histoire.

La fille au kimono ramena une vivement mèche de cheveux sur son cou, cherchant à dissimuler l'évidence.

- Cette blessure... qui te l'a faite ? Et pourquoi ? Comment t'es tu retrouvée ici ? Pourquoi restes-tu dans ce jardin ?

Accoudée à la fenêtre de sa chambre, Kyoka n'en finissait pas avec ses questions, déterminée à tout savoir de l'histoire de sa princesse, depuis les mois où elles se connaissaient vraiment, maintenant. L'air de la nuit ne lui faisait pas peur : ce n'était pas quelques petits frissons qui allaient l'arrêter.

- Pourquoi tu ne veux rien me dire ? interrogea t-elle une nouvelle fois.

- Tu trouveras cela... absurde.

- Aussi absurde que de tomber amoureuse d'un fantôme habitant dans un pêcher ?

La noiraude ria légèrement, avant de venir poser ses mains froides sur celles de la musicienne.

- Oui, au moins aussi absurde que ça.

Le silence se fit un bref instant, jusqu'à ce que l'esprit ne reprenne la parole d'un air plus grave.

- Je... Je vivais il y a très très longtemps, dans une famille noble. C'était...

Elle s'interrompit quelques secondes, serrant inconsciemment sa prise contre les doigts de Kyoka, qui ne broncha pas, et préféra caresser du pouce le dos de sa main, l'encouragement muettement à continuer.

- C'était... plutôt une belle vie. J'allais me marier, comme c'était le cas à l'époque, et j'étais prête à honorer ma famille comme il se le devait, pour lui apporter honneur et prospérité. Seulement... les temps changent, et... il y a eu une révolution paysanne contre l'empire et les nobles de l'époque. Les paysans... Ils...

Elle souffla, baissant la tête, commençant à trembler, mais ce n'était pas à cause du froid.

- Ils étaient de... de vrais fous furieux... des bêtes sauvages, à peine humains ! Quand ils ont prit notre maison dans un assaut, le jour de mon mariage, ils ont mit le feu, tué tout le monde...

La noiraude secoua sa tête, comme si elle tentait de chasser certaines images de son esprit.

- J'ai réussie à m'échapper, loin, très loin... jusqu'au pêcher où j'aimais grimper pour observer le ciel, et quelques fois les étoiles, quand j'arrivais à sortir de ma chambre sans me faire attraper. Mais on m'a rattrapée, et...

Elle releva la tête, dévoilant des débuts de larmes aux coins de ses jolis yeux.

-  Ils m'ont égorgée comme du bétail.

Kyoka stoppa tout mouvement, pétrifiée.

- Je n'ai pas pu accéder à l'Au-delà, parce que je n'ai reçut aucune bénédiction mortuaire, ni funérailles. J'ai hantée cette arbre jusqu'à ce qu'il pourrisse, et ne laisse dans son sillage qu'une pêche, réceptacle de mon esprit. Un voyageur affamé passait par là, a dévoré le fruit, mais à garder les pépins pour les planter dans son jardin...

Elle conclut, dans un souffle :

- Ça a duré des centaines d'années, avec des schémas différents... jusqu'à ce que j'arrive ici.

Un silence se fit entre les deux adolescentes, la musicienne n'arrivant toujours pas à y croire, et pourtant, ce n'était pas la seule chose incroyable qu'elle avait vu ou entendu.

La Princesse des PêchesWhere stories live. Discover now