Chapitre 17

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« Les voyageurs sont très nombreux à parcourir le Monde, qu'ils arpentent leur propre Royaume ou d'autres territoires. Il existe donc nombre de migrants choisissant d'élire domicile sur une autre planète pour diverses raisons, qu'elles soient purement professionnelles ou un peut plus personnelles. Bien évidemment, chaque immigrant se voit imposé les lois spécifiques du Royaume qui l'héberge, mais il possède également certains droits tout aussi spéciaux en ce qui concerne la communication avec ses Terres d'origine : les envois de messages par le biais de Stales publiques sont gratuits et certains voyages interplanétaires prioritaires peuvent être aménagés en cas d'urgence. Il est bien évidemment naturel de permettre à un veuf ou tout autre endeuillé d'assister aux funérailles d'un proche ou bien, plus heureusement, de permettre à une femme enceinte de regagner son Royaume pour mettre au monde son enfant, rituel très important que de respecter les racines d'un être prêt à commencer sa vie, ou bien à la terminer... »

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       Darïu sourit doucement et répondit :

— Ces armures faisaient partie de la collection de Madame. Je ne pense pas qu'elle voie d'inconvénient à ce que je vous en fasse cadeau pour faciliter votre fuite. Il nous suffira d'en acheter d'autres, s'il n'y a que cela qui puisse vous gêner.

       Win scruta longuement le casque que le domestique lui avait donné et l'enfila en haussant imperceptiblement les épaules. Sol, quelques pas derrière lui, essayait tant bien que mal de comprendre comment fonctionnait le mécanisme de dégaine et de rengaine des griffes cachées dans ses brassards : on lui avait confié tout un attirail de Lame, quoiqu'un peu trop petit pour elle mais parfait pour maintenir l'illusion. Une domestique l'avait d'ailleurs coiffée d'une queue de cheval haute, coiffure typique des guerrières du Royaume, et lui avait donné un set de petits couteaux à cacher dans son équipement. En conclusion : rien pour la rassurer.

— Vous devriez partir d'ici peu, les encouragea Darïu en tendant un morceau de papier scellé à ses deux hôtes. Je vous ai réservé un créneau de seulement quelques heures et il serait terriblement dommage que vous le ratiez...

       Win acquiesça et s'empara du papier. Il invita sa compagne forcée à le suivre jusqu'au écuries où les attendaient charrette, matériel et camarades criminels. En effet, le domestique n'avait pas menti : les deux daims cornus rattachés à la charrette étaient en pleine forme et, à l'arrière, Eyomi et Maazul peinaient presque à trouver une place au milieu des sacs de vêtements, de vivres et de matériel divers. Ils étaient vêtus de vêtements typiques d'Okthem, tels deux voyageurs sur le point de retrouver leur Terre originelle ; ou plutôt un couple attendant un enfant, vu la façon presque comique dont le ventre de la criminelle avait été gonflé... Inutile de décrire à quel point elle était heureuse de jouer le rôle de la compagne de Maazul, ni à quel point ce dernier la dévorait des yeux.

— Merci beaucoup, Darïu ! s'exclama Win en s'inclinant légèrement. J'espère trouver un jour le moyen de vous remercier, vous et Madame...

— Restez en vie et vous ferez de moi le plus heureux des hommes, répondit le domestique. Et il en est de même pour Madame. Faites-nous donc cet honneur, Monsieur.

       Darïu s'inclina et laissa Win grimper sur le banc du cocher. Le voyageur aida Sol à s'installer à ses côtés puis, adressant un dernier sourire reconnaissant au majordome, fit claquer les rênes.

       Ils traversèrent le quartier noble, le centre de la ville, passèrent les murailles et se retrouvèrent sur la route. Chose inédite, Win laissa tomber l'idée de couper à travers les sentiers forestiers et décida de suivre un chemin banal, assez fréquenté pour que le petit groupe se retrouve rarement seul. La fausse Lame ne s'en montra pas vraiment rassurée et chercha à calmer son angoisse en engageant la conversation :

L'épopée de SolWhere stories live. Discover now