Chapitre 8: Keryna.

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Depuis que les legios étaient venus, nous avions repris une vie tout à fait normale. Cette vérification des papiers avait été une véritable épreuve, mais nous nous attendions à cela un jour. J'espérais simplement avoir fait bonne figure. Pourtant, je savais pertinemment que je ne savais pas contrôler mes émotions, j'étais quelqu'un de direct, qui disait ce qui lui passait par la tête sans réfléchir aux conséquences. 

Alors que je combattais avec Suran cet après-midi là, celui-ci ayant finalement accepté que je me serve de mon épée, je vis au loin une silhouette sombre avancer vers nous. Je baissai alors mon arme contre l'herbe sèche, tout en mettant ma main en visière afin de mieux voir. J'ordonnai à mon frère de rester tandis que je partais à la rencontre de cette personne. Plus je m'avançais, plus je me doutais que c'était un legio grâce à son uniforme si sombre. Lorsque je pus enfin voir son visage, je fronçai les sourcils en signe d'incompréhension. Demyan, le fils de Rioz, se tenait à quelques pas de moi. Sans que je sache pourquoi. Mon dégout pour lui et son peuple s'empara de moi et je le toisais de haut en bas.

— Qu'est-ce que tu veux? lui lançai-je en tentant de ne pas paraître trop agressive. 

— En fait, je ne viens pas là en tant que legio. Je voulais m'excuser aussi pour l'autre jour, je sais qu'on a un peu exagéré. 

— Que tu viennes en tant que legio ou non, je n'en ai rien faire. Je n'ai aucune envie de te parler. 

— Quelle franchise! Je n'ai pas l'habitude que l'on me parle de la sorte, s'exclama-t-il. 

— Forcement, les gens respectent le petit prince. Il ne faudrait tout de même pas l'offusquer. 

Je savais pertinemment que je ne devais pas tenir ce genre de propos, pourtant je ne pouvais pas m'en empêcher. Néanmoins, sa moue faussement offusquée me rassura. 

— Sois gentille, je te prie, n'oublie pas que je pourrais ordonner de t'exécuter dès ce soir si je le voulais.

— Je ne pense pas que tu ferais une chose pareille. Mais fais-le si ça te chante. Je ne vois pas ce que tu y gagnerais, mais c'est ton problème. 

Il me sourit alors franchement, ce qui me laissa perplexe. Malgré cela, je n'avais aucune envie de parler avec lui une seule seconde de plus. 

— Si tu pouvais partir maintenant, cela m'arrangerait. 

— C'est bien la première fois que quelqu'un me vire de chez lui, et même si je ne te connais pas, ça ne m'étonne pas de toi, me dit-il en rigolant, commençant à faire demi-tour. Tu sais où me trouver si tu changes d'avis!

Je le regardai s'éloigner puis, avec un haussement des sourcils, rejoignis Suran. Il voyait que je ne courrais pas de danger, ce qui expliquait qu'il ne soit pas venu. 

— Que voulait ce legio?

Je lui expliquai alors que je ne savais pas pourquoi moi même. Et c'était bien vrai. Il n'avait pas clairement répondu à ma question. Cela m'étonnerait vraiment qu'il vienne s'excuser chaque fois qu'il fouillait une maison. Non, il avait l'air de vouloir me voir moi et personne d'autre. Peut-être n'aurais-je pas dû le renvoyer. 

Le soir, alors que je révisais ma leçon de politique, un Scintillant vint chez nous. Allongée sur mon lit, un crayon au bord de mes lèvres, je tendis l'oreille. De ma chambre, je n'arrivais pas voir qui cela pouvait bien être. A pas de loup, je sortis donc et m'assit sur la première marche des escaliers de bois. J'entendis des éclats de voix, et je sus de suite à quelle personne elle appartenait. Il s'agissait de Hox, un homme à la personnalité bien affirmée avec qui je n'étais pas très à l'aise; ce qui était rare. Réalisant qu'il se dirigeait vers moi, je me levai d'un bond et regagnai mon lit. Il frappa à la porte comme un forcené puis scanda mon nom.

— Keryna! Sors d'ici je suis certain que tu ne dors pas, s'écria-t-il.

Je me levai d'un pas décidé, ébouriffant mes cheveux afin de prouver que je dormais. Je me retrouvai alors face à lui et ses quatre-vingt-dix kilos de muscles. Etonnement, sa barbe grisonnante était bien rasée pour une fois. 

— Quand quelqu'un vient frapper à la porte de ma chambre, en faisant trembler tous les murs, ce n'est pas facile pour moi de continuer de dormir. J'espère que tu es satisfait d'avoir troublé mon sommeil, Hox.

— Arrête de faire ta victime, Keryna, au pire je t'ai réveillé, et alors? T'en verras d'autre. Suran est là? me demanda-t-il en s'adoucissant. 

— Non, il devait voir quelqu'un. Il n'y a que moi aujourd'hui, et je suppose qu'Yla te l'a dit. Bon, tu voulais nous voir? 

— Ouais, et tu sais bien pourquoi. C'est toujours pour la même chose, mais personne m'écoute ici. Je veux que la petite princesse se décide à attaquer le château. Ca fait dix-huit ans qu'on attend ça, alors il est temps qu'elle se décide. Je t'assure que je serais allez la chercher depuis bien longtemps si je savais où vous la gardez. 

Je levai les yeux au plafond, exaspérée d'avoir cette discussion encore une fois. La petite princesse, c'était moi, mais cela personne ne le savait à par ma famille. Je jetai alors un coup d'œil à Yla, tentant de se faire une place derrière la carrure imposante de Hox. 

— Ecoute, tu sais très bien que ça ne sert à rien de venir faire un scandale tous les mois. On souffre tous depuis des années, et on n'est pas les plus à plaindre. Je sais que ta femme et tes enfants sont sur Tawy, et ce n'est en rien de ma faute alors arrête de me harceler. La princesse sera bientôt prête. Je te promets que nous attaquerons le château avant la fin de l'année. Tu as ma parole. 

Il resta planté là durant quelques instants puis partit finalement sans un mot de plus. Yla avait l'air de vouloir m'étriper, mais j'étais satisfaite de ce que j'avais dit à Hox. Grâce à cette promesse, elle ne pouvait plus me refuser ce que je souhaitais tant. Je mènerais mon peuple à la victoire, ou du moins je ferais tout pour. 

Diadème de cendresWhere stories live. Discover now