Ses draps

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Je bouge les yeux sous mes paupières.

Mhhh... mal de tête. Étonnant.

J'ai la bouche pâteuse, et toujours un arrière goût d'alcool dans celle-ci. Je sens même une ou deux courbatures.
Il n'y a aucun bruit, mis à part celui du tic-tac régulier émanant de la pendule accrochée au dessus de la télé. Il parviendrait presque à me rendormir.

Tic. Tac. Tic. Tac. Tic. Tac.
Si seulement je pouvais m'endormir et me réveiller l'année prochaine.
Tic. Tac. Tic. Tac. Tic. Tac.

J'y suis presque. Pourtant, quelque chose me dérange.

Comment j'ai froid...

J'ouvre les yeux. Je suis en boule sur le canapé, en train de tenter inconsciemment et en vain de me réchauffer. Je me relève et ramène mes jambes vers moi.
Ils n'ont même pas pris la peine de me laisser ne serait-ce qu'un drap pour me couvrir. J'inspecte l'appartement faiblement illuminé par la lumière de l'aube, en plissant les yeux, mais n'aperçois rien qui pourrait me servir de couverture. J'ai encore besoin de sommeil mais je sais très bien que je n'y arriverai pas si je reste frigorifiée ainsi. Je songe déjà à me faufiler dans les draps de l'un des deux garçons par pure survie, sans m'avouer que ce serait en fait une bonne excuse pour me blottir contre Orel.

Comme si j'allais trouver le courage de faire un truc pareil.

J'entends tout à coup quelqu'un marcher dans le couloir. Je me rallonge précipitamment et m'applique à donner l'impression d'être plongée dans un profond sommeil. Gringe ou Orel, je ne sais pas lequel des deux, passe à côté du canapé pour aller faire je ne sais quoi vers le placard. J'entends le bruit d'un paquet de céréales et essaye de tendre l'oreille pour déceler un indice sur l'identité de la personne. Celle-ci se met alors à bailler et sans savoir comment, je la reconnais.

Orel.

Je devine qu'il est en train de se servir ses céréales dans un bol grâce au tintement pas vraiment discret qui résonne dans la pièce. Quand il a fini, je l'entends prendre une bouchée et se planter devant moi. À ce moment-même, je n'ai pas bougé d'un poil, et suis toujours en boule pour garder un maximum de chaleur.
Il soupire. Le bruit en face de moi me fait comprendre qu'il vient de poser son bol sur la table basse. Avant que je comprenne ses intentions, deux mains chaudes se glissent entre le vieux cuir et ma peau. Je me fige.

Qu'est-ce qu...

Il me soulève, un bras sous mes jambes, un bras sous mon dos. Une vague de froid me fait frissonner, mais cette raison est vite remplacée par une autre. J'ai la tête contre son torse que je devine chaud à travers son t-shirt.

Oh.

Orel m'emmène à travers le couloir. Je n'ose pas trop ouvrir les yeux de peur qu'il me voit. J'arrive quand même à les entrouvrir pour me rendre compte que nous ne sommes nulle part autre que dans sa chambre. Il me dépose sur le matelas, et une grosse couette me tombe soudainement dessus, me recouvrant de la tête aux pieds. Je l'entends chuchoter.

- Ah merde.

Je peux de nouveau respirer car il dégage ma tête et replace bien la couverture. Puis, il fait demi-tour sans demander son reste, ferme la porte, et me laisse seule dans sa chambre.
Dans son lit.

Dans son lit. Je suis dans son lit.

La couette sent infiniment bon, tout comme les oreillers. C'est le parfum d'Orel, tout simplement. Je ne me suis jamais sentie aussi bien dans les draps de quelqu'un d'autre.
Je m'enroule de plus belle dans sa couverture et hume encore son odeur. Mon cœur et mon corps se réchauffent.
La dernière fois que je me souviens avoir mis les pieds dans cette chambre, ce n'était pas très joyeux. Orel avait eu une réaction violente à laquelle je ne m'attendais pas. Il m'avait même demandé de quitter la pièce. Repenser à ce moment me noue l'estomac. Je me force à chasser ces pensées et à plutôt me concentrer sur mon sommeil.
Le cocon dans lequel je suis enveloppée est si doux que je m'endors rapidement pour encore quelques heures.

Sous InfluenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant