#Chapitre 39

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- Tu sais, Will, commence ma meilleure amie avec hésitation, je suis ravie que tu cherches enfin à développer ta féminité... mais plus que te maquiller pour masquer tes cernes, tu devrais dormir.

Décidément, c'est le mot d'ordre depuis le début de la semaine. Je ne compte même plus le nombre de remarques de cet acabit que j'ai reçu depuis la rentrée. Même Karen est allée jusqu'à me convoquer dans son bureau pour que nous « discutions ». En vérité, plus qu'une discussion, j'ai eu le droit à un interrogatoire en règle sur mon rythme de vie, mes insomnies et surtout, une multitude de questions pour s'assurer que je ne frisais pas le burn-out. Ce qui n'a pas empêché Karen de rester sur sa faim face à ma grande loquacité qui se résumait plus ou moins à de vagues « hum » et quelques hochements de tête de temps en temps. Finalement, vaincue, elle a fini par me délivrer de ce traquenard et je me suis empressée de déguerpir avant qu'une dernière interrogation fuse dans sa tête.

- J'en prends note, soufflé-je à l'adresse de Jaz.

Celle-ci se pince les lèvres comme si elle retenait un autre commentaire. Sans surprise, il ne met guère de temps avant d'être énoncé à voix haute.

- Je suis sérieuse, Willow. Au début, je ne disais rien quant à tes réveils paniqués en pleine nuit, mais je commence sérieusement à m'inquiéter. Ça remonte à quand la dernière fois que t'as réussi à dormir plus de trois heures consécutives ?

Bien trop longtemps.

Mais je le garde pour moi. A la place, je rétorque plus durement que je ne l'aurais souhaité :

- Ça va, je t'assure.

- T'es sûre de ça ? s'énerve-t-elle. Tu crois qu'on n'a pas remarqué ton petit manège avec ta subite envie de te maquiller ? Ou encore que tu t'es une fois de plus endormie en cours d'économie ? Sans parler du fait que Charline nous a rapporté que c'était également le cas en français. Tout comme on peut aussi aborder cette histoire de voile où, selon Adam, tu as failli vous faire chavirer tellement tu étais distraite, si tu veux. N'oublions pas non plus ce malaise que tu as failli faire à Eos avant-hier... Et j'ai toute une liste d'autres petits événements comme ça, Will.

- Je manque un peu de sommeil, y a pas mort d'homme ! protesté-je.

Jasmine s'adoucit.

- Cela n'empêche en rien que nous, on s'inquiète pour toi. Je n'ai rien dit à personne à propos de tes cauchemars parce que tu me l'as demandé, mais je commence à me dire que c'était une très mauvaise idée de garder ça pour moi... Tu as besoin d'aide.

- Alors quoi ? m'emporté-je. Tu vas aller tout raconter aux autres ? Vas-y ! ne te gêne pas ! Mais n'attends pas de moi que je te fasse confiance à nouveau alors.

Aussitôt ces mots franchissent mes lèvres que je les regrette. Je devine à la mine horrifiée de ma colocataire qu'elle aussi est choquée par ma véhémence. Et surtout, qu'elle est terriblement blessée. Je sais qu'ils ont raison, mais c'est au-dessus de mes forces. Alors je fais l'autruche. Je refuse de prêter attention aux premiers signes de faiblesses que mon corps m'a transmis, affirmant à tout va que je me sens bien alors que je suis au bord de l'implosion, rompant à petit feu sous la pression.

- Je ne pensais pas à eux, confesse piteusement mon amie, mais plutôt à Karen. C'est son boulot de régler ce genre de problème et elle veut t'aider, seulement tu ne la laisses pas faire. Si tu n'arrives pas à lui en parler, peut-être que je peux le faire à ta place ?

- Non, tu ne peux pas. Ecoute, c'est gentil de ta part de te faire du souci pour moi, mais je gère, je te le promets. Je règlerai le problème très vite.

L'Ecole des Neuf Muses [TERMINE]Where stories live. Discover now