Chapitre XIII - La puissance de l'Aigle

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Maureen s'était rhabillée sans un mot et était partie sans même le regarder. Il en avait fait de même et s'était présenté à la porte arrière de la véranda le regard perdu, sale et débraillé. Frank et Nancy avaient été les premiers à le voir. Nancy s'était précipitée sur lui pour éviter tout contact avec les invités. Frank l'avait suivie déconcerté.

Le regard furibond, elle demanda sèchement « Tu te fiches de ma gueule ? c'est quoi cet air d'épouvantail ? t'es soûl? »

Armand répondit avec mépris « Et oui ma douce je suis ivre et au septième ciel. Les joliesp'tites serveuses faciles me réjouissent que veux-tu. » Frank pouffa de rire. Nancy le gifla violemment. Armand vacilla.

« Garce » lui dit-il en se caressant le menton. Il se détourna et fit mine de partir.

Frank le retint et demanda à Nancy de les laisser seuls. Il poussa Armand dans l'obscurité vers un des murs blancs de la villa et lui proposa de partager un joint. Il s'adossa confortablement au mur, le visage tourné vers la lumière de la Véranda.

Armand se tint debout, à distance, observant le visage rouge en sueur de Frank et la lueur fugace d'un petit briquet argent estampillé des armes rouges de la République. Les serres entrecroisées de l'Aigle Républicain semblaient danser sous ses doigts malhabiles. « La puissance de l'aigle est dans son envol... » pensa Armand «... non dans ses serres, ces tenailles affreuses qui emprisonnent et tuent. » La beauté de l'envol, la majesté des ailes déployées au-delà des cimes, l'ivresse libre, c'était ça l'aigle.

Frank allumale joint et rangea le briquet dans la poche arrière de son pantalon. Il aspira d'un coup sec et lui tendit la drogue en disant - « Dernière ligne droite mon vieux. Encore une heure ou deux et on ira tous se coucher. »

Armand avait pouffé de rire sans pouvoir se contrôler. Il avait envie d'hurler et de se jeter contre les murs. Il avait mal. Le départ de Maureen, la certitude de ne plus jamais la revoir, son inévitable mort, tout le mettait au supplice. Il lui avait répondu l'air réjouit « J'ai baisé comme un bête, j'en peux plus. J'veux m'coucher tout d'suite. »

Frank avait rit. « Pas étonnant que Nancy t'ai giflé. Hahaha, ça me fait bien plaisir. Ça lui pendait au nez à cette salope avec ses grands airs. »

Armand le regarda interdit. Nancy s'était donc servit de lui pour faire carrière, chose que Frank n'avait pas su faire. Il sourit d'un air entendu et dit : « Ouais, moi il me faut du changement, l'inspiration tu comprends ça demande des sacrifices. Nancy j'en avais marre. »

Frank avait encore rit en aspirant un bouffée de fumée. « Je pense avoir une chance avec la fille du juge. On ne s'est pas quitté depuis le diner. Elle me plait bien. »

Armand se tut. Pauvre Frank encore une illusion qui allait mal se terminer. Il lui prit le joint des doigts, aspira goulument et dit « Bon faut qu'on y aille ou Nancy va péter un plomb. »

Frank écrasa le joint contre le mur et dit « t'en fais pas, je ne la laisserai pas te toucher. Viens, allons voir à quelle sauce tu vas te faire manger. »

Armand le suivit docilement à l'intérieur de la véranda vers la lumière chaleureuse d'un feu de bois qui brulait doucement au centre de la salle. La scène était belle, le carnage n'en n'allait être que plus brutal.

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⏰ Last updated: Jan 28, 2019 ⏰

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Une mort annoncéeWhere stories live. Discover now