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Assise sur le sable, je contemple les lueurs orangées qui colorent le ciel. Aucune idée, aucune pensée. Mon esprit est occupé à admirer le crépuscule.

J'ignore combien d'heures se sont écoulées, mais mon coeur est plus serein. Apaisé par cette douce brise du soir qui commence à se lever.

D'un geste lent et paisible, je me redresse et enlève les grains de sable qui se sont collés à mon jogging. J'ai faim, et j'ai besoin de rentrer pour me réconcilier avec mon père. Je sais très bien qu'il s'inquiète pour moi. Je dois le rassurer.

Je jette un dernier regard aux magnifiques reflets de la mer devant moi, avant de me tourner pour rejoindre le mobil home.
Sauf qu'assis cinq mètres derrière moi, je croise le regard cacao de Clay.

Accroupi sur le sable, sa mine paraît préoccupée.

Qu'est-ce qu'il fait là ?
Est-ce qu'il s'est disputé avec sa barbie ?

Troublée, je baisse la tête pour éviter ses yeux  qui me fixent un peu trop intensément, et passe à côté de lui.

Il se lève à son tour, pour venir marcher à côté de moi.

—Ça va ? me demande-t-il d'une voix calme et détachée.

—Très bien, et toi ?

Il enfouit ses mains dans les poches de son short, et détache enfin ses yeux de moi.

—Moi aussi.

On parcourt le petit chemin de terre en silence, jusqu'à qu'on arrive à la piscine.

Entourée de nombreux lampions jaunes et oranges, la partie bar sur notre droite est très animée.
La piscine aussi est remplie, plusieurs personnes s'y baignent.

Des bras musclés me poussent brusquement dans l'eau, je lache un cri sidéré.

—Clay !

Il tombe avec moi en rigolant de tout son coeur.
Je réussis à sortir la tête de l'eau pour le fusiller du regard.

—Connard.

Il passe une main dans ses cheveux pour les recoiffer, en souriant de toutes ses dents.

—Allez amuse-toi un peu !

Sa chemise beige est trempée et colle ses pectoraux. Il fait un pas vers moi mais je pivote pour sortir de la piscine.

—J'ai pas envie de m'amuser avec toi, je grogne. Laisse-moi tranquille.

Ses bras puissants rattrapent ma taille, et me forcent à me tourner vers lui. Une boucle brune est retombée sur son front, alors que ses yeux brillent de malice.

—Et tu veux faire quoi avec moi ? dit-il d'une voix rauque.

Je prends conscience de ses mains qui sont toujours sur mes hanches.

—Clay ! je peste en lui donnant une tape sur le torse. Va jouer avec ta copine.

—Elle ne m'intéresse pas. C'est toi que je veux, et tu le sais.

Ses yeux intensément marrons tentent de me charmer, mais je ne me laisse pas faire.
Je le bouscule en arrière.

—Garde ton baratin pour ta barbie et laisse-moi rentrer.

Il ne bouge pas.
D'un regard sérieux, il lève la main et attrape une de mes mèches.

Je reste figée alors qu'il l'enroule autour de son index. Mon cœur émet des battements plus rapides, je ne comprends pas pourquoi.

—Tu me plaît, souffle-t-il d'une voix chaude.

—J'ai un petit ami je te rappelle. Tu sais celui que tu ne supportais pas.

—Celui qui t'a largué pour aller vivre à Sydney ? se moque-t-il. Celui qui ne t'a même pas appelée pour la mort de ta mère ?

Les battements de mon cœur s'affolent. Comment il sait ça ?

Je réalise alors qu'Anna a dû parler de ma vie privée à Djibril, qui a dû le répéter à Clay.
Je vais la tuer.

Le visage grave, Clay plante ses yeux dans les miens.

—T'as raison, résonne sa voix devenue froide. Reste avec les souvenirs de ton ex. Moi j'en ai ma claque.

Il lache brusquement ma mèche, sort de l'eau énervé, avant de disparaître derrière le bar.

Déstabilisée par ses paroles, je me résous à faire pareil. Je quitte la piscine pour me rendre au mobile home.

Ma tortue fétiche serrée au creux de ma paume, je tente de me calmer en observant le paysage qui m'entoure.
Le trajet est agréable. Les petits sentiers sont bien tracés avec des galets blancs et de grands palmiers de part et d'autre.

Je me surprends à prendre le temps pour rentrer, en contemplant les personnes attablées à leurs terrasses en train de discuter avec joie et légèreté. Ça sent bon les vacances. Tous ces rires, ces jolis éclats de joie, et ces mines détendues.

Le fait que les sentiers soient faiblement illuminés rend l'atmosphère plus chaleureuse. Je devrais peut-être m'ouvrir un peu plus et profiter de cette vraie déconnexion du monde.

Lâcher prise comme le font toutes ces personnes ici. Ne plus me torturer l'esprit par l'absence de nouvelles de William depuis le nouvel an, ni par la mort tragique de ma mère il y a cinq mois.

Quand j'arrive au mobil home, Anna se lève de sa chaise longue et se dirige vers moi de manière inquiète.

—Ça va ?

Mon père et Djibril se tournent du barbecue qu'ils préparaient pour me regarder. Les spatules figées dans leurs mains, leurs yeux s'écarquillent lorsqu'ils me voient trempée de la tête aux pieds.

Je baisse les yeux, gênée.

—Une baignade nocturne, ma chérie ? me sourit mon père.

—C'est ça papa, je bredouille en rentrant à l'intérieur pour me changer.

Ma meilleure amie reste plantée la bouche grande ouverte, en essayant de comprendre aussi pourquoi je rentre mouillée.

•Ѡ•

Black stars (Terminé)Where stories live. Discover now