Chapitre 3

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Le lundi matin, James arriva dans sa salle de bonne humeur. Ce week-end lui avait fait du bien. Il ne se mentait pas et savait que sa soirée de samedi y était pour quelque chose. Après beaucoup d'embarras, il avait su parler avec Sam de façon naturelle. Il espérait que dorénavant le comportement de ce dernier serait plus doux.

- Bonjour Mr Heartson, dit Peter tout sourire, quand il entra dans son amphithéâtre, suivi de Sam et des autres étudiants.

- Bonjour Peter, répondit James avant de s'adresser à son ami. Sam...

Une étudiante se retourna, surprise d'entendre que son professeur l'appelait Sam comme tout le monde, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent.

Sam lui répondit avec un hochement de tête. James ne s'était donc pas trompé, tout allait pour le mieux.

- Je vais vous rendre aujourd'hui l'analyse que vous avez écrite sur le film du Cercle des poètes disparus. Je vous rappelle d'ailleurs que j'ai préféré vous faire voir le film avant de vous faire lire l'œuvre, car c'est le film qui est à l'origine du livre, donc plus juste. Mais avant de vous rendre les copies, je voudrais faire partager le point de vue de l'un d'entre vous. Sam, tu veux bien dire ce que tu en as pensé s'il te plaît ?

- Euh... Je crois que ce n'est pas nécessaire monsieur, répondit Sam.

- Au contraire, ce que tu as écrit est très intéressant. Alors, qu'en as-tu déduit ?

- Bien. Je pense que les élèves de Kitting ont mal compris le sens du mot liberté qu'il a voulu leur inculquer.

- Pourquoi ?

- Ils ont voulu l'appliquer pour tout ce qui les entourait, ne comprenant pas que nous avons la liberté dans ce que nous pouvons seulement. Neil aurait pu choisir de convaincre son père de lui laisser jouer la pièce de théâtre, mais il a pensé que la liberté ne lui serait jamais due et il y a vu une impasse. Kitting voulait que ses élèves soient libres, au sens libres penseurs. Que l'on choisisse d'aimer une chose ne signifie pas que l'on peut avoir la force d'affronter ce qui est contre nous pour y accéder. Ses élèves ont mal saisi cette liberté et c'est pourquoi le film se solde en partie par un échec, à mon avis.

- Et ton avis est très bon, reprit James avant de s'adresser au reste des étudiants. Est-ce que vous avez la liberté de vouloir changer le monde ? Bien sûr. Est-ce que vous avez la possibilité de le faire ? Vous pouvez essayer. Mais ne soyez pas anéantis si vos choix ne sont pas concrétisés par une victoire. Si je dis que j'aime avoir la liberté de porter des tutus, cela ne veut pas dire que je peux venir donner mes cours avec. Ou si je le fais, je prends le risque de perdre mon travail. Vous comprenez ? Sam a su lire le message de Mr Kitting, mais chacun peut y voir autre chose. Vous devez avoir votre opinion sur une œuvre quelle qu'elle soit, sans entrer dans un moule d'analyse préfabriqué. Quand une personne se trouve devant le tableau des tournesols de Van Gogh, il peut y voir de simples tournesols, un autre peut y voir une représentation humaine, ou encore la vie qui défile par les différents états de la fleur. Là est la liberté de penser. Ne critiquez pas les autres sur ce qu'ils pensent, car vous-même vous pourriez voir votre liberté attaquée. Par cela je veux dire que c'est à vous de recevoir le message qu'il vous plaît après avoir vu ce film. Je voulais cependant vous faire part de cette analyse qui me semble très proche de ce qu'a voulu nous faire partager le scénariste du film. Ainsi, Sam tu obtiens un vingt à ton devoir, tout autant pour son bon sens que pour le style de l'écriture. Félicitations.

James ne l'avait pas noté par favoritisme, mais réellement parce qu'il avait été bluffé par son analyse aussi bien construite et écrite. Selon lui, elle mériterait d'être ajoutée à la fin du film tellement les mots étaient justes.

Une main sur le cœurWhere stories live. Discover now