15- Sauver la vie

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Les paupières de Shireen sont lourdes. Elles semblent peser une tonne. D'ailleurs il est bien difficile pour la sorcière de les ouvrir, mais lorsqu'elle y parvient, c'est un visage familier qui lui fait face.

- Ne bouge pas, susurre la voix grave et douce à la fois de Amaï.

La belle tente d'ouvrir la bouche, d'en sortir un son, mais même sa mâchoire est récalcitrante et refuse d'articuler quoi que ce soit.
Un son de tissus que l'on essore lui parvient aux oreilles, un mélanges d'herbes bienfaitrices inonde la pièce d'un parfum tonifiant et chaleureux. Lavande, bois de santal, hibiscus, feuilles de cassis et d'autre encore offrent une délicieuse fragrance après les odeurs de feu et de carcasses brûlées.
Amaï applique un gant de toilette sur le front de sa belle. Il fredonne l'air d'une très ancienne comptine, apaisant ainsi Shireen. Son état est grave, le mercenaire le sait bien. Sa sorcière a utilisée une très grande partie de sa magie, au point d'avoir frôlé la mort. Il utilise des gestes doux, amples et délicats pour s'occuper de Shireen, il lui caresse la main, prend le temps de déposer quelques baisers sur son cou, sur ses lèvres, sa poitrine.
D'autres voix s'élèvent un peux plus loin et la sorcière sent son cœur bondir en reconnaissant Félix et sa mère, Monique. La dame a retrouvée la mémoire, visiblement pour le plus grand bonheur de son fils qui n'arrête pas de discuter avec elle.
Le temps passe lentement, son corps inerte et endoloris est parfaitement immobile dans le lit moelleux qui l'accueil. Son corps, à moitié dévêtu en raison de la chaleur écrasante, sue. Amaï s'empresse de l'éponger, de le couvrir de ce parfum vivifiant, comme si la vie de Shireen en dépendait.
Mais le pire est passé.
Il ne reste plus qu'à attendre, a espérer que son état s'améliore rapidement, que Wardrüna ne soit pas trop meurtrier pendant ce temps.

- Tu serais surprise par les hommes d'aujourd'hui, dit Amaï d'un ton légèrement amusé.

Il arrête quelques instants sont travail de nursing, soupire en fermant les yeux, assis sur un tabouret bas. Près de sa belle, une note de nostalgie s'échappe lorsque leur regards se croisent.

- Le temps est assassin, il prend nos proches, change les nouvelles générations a un tel point que j'ai de la peine à reconnaître les humains, continue le mercenaire, un peu plus grave dans son ton.

Passant une main rugueuse mais délicate sur la cuisse de Shireen, il dévore des yeux cette femme qu'il a tant pourchassé.

- Autrefois ils se déchiraient pour un bout de terre, il étaient brave et vaillants, se battants avec force et honneur. Nous n'avions pas peur de mourrir car l'éternel et le paradis étaient notre salut, la raison de ne pas avoir crainte de la fin.

Un léger sourire, plus emprunt de tristesse que de joie s'étire farouchement sur les lèvres gercées du mercenaire.

- Aujourd'hui, ils font face ensembles, vivent les uns à côté des autres, s'entraident, commercent en paix... sauf leur dirigeants. C'est un monde plus dure que le nôtre. Ceux de maintenant, le peuple, il vit sans savoir que les forts se moquent d'eux. Pas d'honneur, pas de raison de se battre et de mourrir pour un quelconque idylle, n'y même pour soi. Pas de vaillance, ni de bravoure, simplement l'obligation de devoir obéir, la peur au ventre, l'envie de fuir ce monde étrange, l'égoïsme à l'état pure. Ils ne donnent pas, ils prennent.

La tirade prononcée par le mercenaire effleure encore plus la sensibilité de la sorcière. La peine de l'homme sans âge se lit sur son visage et ça, Shireen n'avais jamais connu cela. Elle sait désormais qu'un immense changement c'est opéré au fil des siècles, elle sait aussi que c'est désormais à eux deux de Se transformer, d'évoluer, de devenir d'autre personnes, ou plutôt de trouver de nouveaux objectifs pour changer de vie.
Les hommes ne sont plus les même, le monde meurt, les créatures fantastiques ont disparus et sont parties dans un univers loin de ses créature bipèdes et pleines de resources.

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