4. Margot : Maxens

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Ma jumelle, puis Maxens. Deux personnes qui avaient réussi à rallonger ma durée de vie. Deux personnes qui avaient occupés une place énorme dans mon cœur. Deux personnes qui allaient mourir.

Mais je n'y pensais plus. A l'hôpital, je n'y pensais plus. Je pensais essentiellement à m'amuser avec Maxens. On jouais des tours aux infirmières, on allait dans les chambres des autres en se faisant passer pour des médecins, on allait s'acheter plein de sucreries... Ma sœur et mes parents venaient régulièrement me voir. A chaque fois qu'ils venaient, mon père ou ma mère fondait en larmes, et ça en devenait énervant. Ne pouvait-il pas être content du temps présent, au lieu de penser au futur ? Ma jumelle, au moins, remarquai mes progrès et me félicitait. Je l'ai présenté à Maxens, qui a été très étonné. Il se plaignait de voir double ! Nous nous étions mis à rire, tous les trois. Cette joie me manque, maintenant.

Après qu'ils soient partis, Maxens m'avait supplié pour revoir ma sœur. Je ne comprenais pas pourquoi il insistait autant. A présent, je me demande s'il pouvait voir l'avenir. Savait-il qu'il ne l'a reverrai jamais ? A ce moment-là, je n'y ai pas fait attention, et nous avons repris nos occupations.

Mais j'avais remarqué rapidement des changements : la première fois que je l'avais vu, il était plus costaud. A présent, il était de plus en plus maigre. Il vomissait, il avait mal au ventre, il avait quotidiennement de la fièvre. Il ne mangeait plus et il était constamment fatigué. A chaque fois, il voulait partir jouer avec moi. Les médecins l'en empêchaient. J'aurais dû l'écouter, l'emmener jouer avec moi, le laisser vivre pleinement les derniers instants de sa vie ! Mais je ne pouvais pas. Le voir devant moi, traînant de la patte pour avancer, me rendait indéniablement triste. J'essayais de me cacher. J'essayais de ne pas montrer la douleur qui me mitraillait de partout. Mais c'était tout simplement trop dur. Le voir souffrir alors que j'aurais dû être a sa place me rendait malade.

Jusqu'à cette nuit.

Cette nuit, ce moment dans la vie où on sent que c'est fini. Que tout s'arrête. C'était horrible. Le vivre pour soit moi-même, c'est supportable. Le vivre pour quelqu'un qui nous est cher, c'est déchirant.

Je l'ai entendu murmurer mon nom. C'est comme ça que je me suis réveillée. Quand j'ai entendu sa voix chevrotante, j'ai eu mal. Je suis sortie en quatrième vitesse de mon lit, et je me suis précipitée vers le sien. Il respirait rapidement. Il ne comprenais pas ce qui lui arrivait. Que pouvais-je faire ? J'étais paralysée.

- J'ai mal, chuchotait-il d'une voix cassée, qu'est-ce qui se passe ?

Je restais muette. Que pouvais-je lui dire ? Je ne faisais que le regarder, là, ce petit enfant que la vie n'avait pas gâté. Ces cheveux blonds encadraient son visage, tandis que ses yeux bleus me regardaient d'un air perdu. Il leva sa main et caressa doucement ma joue.

- Pourquoi tu pleures ? J'aime pas quand tu pleures. C'est à cause de moi ? Me disait-il tout en suffoquant.

- Non mon ange, ce n'est pas de ta faute ! Ecoute moi. Tu vas faire un voyage, tu auras des ailes, de grandes et magnifiques ailes blanches. Tu pourras voler au dessus des pays et des océans ! Tu pourras monter dans les nuages, et marcher dessus ! Tu pourras voir tout les soirs d'extraordinaires couchers de soleils ! Mais pour ça, il faut d'abord que tu sois fort, très fort d'accord ? Tu vas avoir un peu mal au début, mais après ça ira, et tu pourras faire tout ce que tu voudras, d'accord ?

- Et tu viens avec moi ? Hein ? Tu viens avec moi ?

Sa petite voix frêle me faisait mal au cœur, mais je m'empêchai de le montrer.

- Non, pas tout de suite, j'ai quelques petites choses à faire avant, d'accord ? Après je te rejoindrai, c'est promis !

- D'accord. Je t'attendrai, alors.

Sa voix s'était calmée. Il avait arrêté de s'agiter. Sur son visage, un sourire s'était dessiné. Il avait fermé les yeux. Il ne bougeait plus. Maxens ne bougeait plus.

Une petite larme avait coulé sur son visage, me laissant muette.

J'étais là, impuissante, les yeux fixés sur ce petit être qui était parti au ciel.

Dans le videOnde histórias criam vida. Descubra agora