Chapitre 2 (2/2)

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Sans trop savoir comment, je me retrouvai dehors, ma main attachée à celle d'Arthur qui me tirait en avant. Le ciel azur était zébré par des centaines de taches noires de toutes les tailles. On aurait dit des oiseaux, mais leurs corps étaient plus massifs et là où auraient dû se trouver des plumes, il n'y avait qu'une peau lisse sur laquelle couraient de fines lignes de feu. On aurait dit des bouts de charbons ardents portés par des ailes disproportionnées. L'un d'eux fondit sur une fille qui hurlait sans raison, recroquevillée sur le sol, et alors qu'il lui plantait ses griffes dans le dos, je compris qu'il s'agissait en fait de ces petits dragons aussi connus sous le nom d'élémentaires de feu. Nous les classions par catégorie pour tenter d'appréhender ce qu'ils étaient, mais ce terme était bien vague pour décrire l'horreur qui lacérait la peau de cette fille. Feu, Terre et Eau, voilà les trois catégories qui existaient, elles référaient à leur capacité, mais ils n'avaient pas toujours besoin de s'en servir, leurs griffes et leurs crocs étaient bien assez mortels comme ça.

J'eus à peine le temps de m'écarter d'elle, que l'animal répandit un jet de flamme sur sa proie qui hurla de plus belle en se débattant vainement. Ses cris déchirants retentirent pendant quelques secondes, transperçant mon corps de part en part. L'odeur de chairs brûlées me prit à la gorge, ma tête se mit soudain à tourner et mes jambes lâchèrent. Arthur me rattrapa avant que je ne touche le sol et passa l'un de mes bras sur son épaule. Je le vis remuer les lèvres dans ma direction, mais mon cerveau était incapable de traiter l'information. Je n'entendais plus que les cris, et les hurlements de douleur de la pauvre fille qui brûlait vive à quelques mètres de moi. Puis l'élémentaire se redressa vers la foule paniquée, à la recherche d'une nouvelle proie et mon sang se glaça de terreur.

J'aurais voulu courir et hurler à m'en déchirer les tympans, mais mon corps ne répondait tout simplement plus. J'étais submergée par la peur et seul Arthur me permettait d'avancer, de fuir le carnage. D'instinct mes amis s'étaient dirigés vers la place où se trouvait le métro et le spectacle macabre qui se déroulait devant nous, nous cloua sur place. Mon cœur s'arrêta un instant et mon ventre se noua douloureusement. Là, gisaient déjà des centaines de personnes, toutes très jeunes, probablement des étudiants, certains avaient le corps partiellement brulé, d'autres étaient mutilés et les quelques personnes encore vivantes luttaient à mains nues pour éviter de subir le même sort. Derrière, en partie caché par les bâtiments, se trouvait le portail qui avait amené ces créatures dans notre monde. Sa lumière éclatante, aussi aveuglante que celle du soleil m'obligea à détourner les yeux.

Des créatures blafardes, aussi petites que des nourrissons, s'attaquaient à tous ceux qu'ils voyaient. L'une d'elles s'approcha, il fixait notre groupe avec intérêt, jaugeant chacun d'entre nous de ses yeux cruels. Il ressemblait vaguement à un enfant, un enfant difforme, d'une maigreur maladive, pourvue de dents pointues, d'un nez écrasé, de longues oreilles tombantes et de deux yeux globuleux, noirs comme la nuit. Son visage, tout comme ses mains étaient couverts d'un sang poisseux. Je vis Hugo se tendre, prêt à se défendre contre l'ignoble créature, mais au lieu de se jeter sur lui, la chose remua la chose qui lui servait de main, et l'instant d'après un énorme pavé se décrocha du sol et heurta Hugo à la tête. Inès hurla au moment où son petit ami s'écroula sur le sol, alors qu'une mare de sang s'étendait déjà sous lui. Puis la chose bondit à une vitesse hallucinante, ses longues griffes se plantèrent dans les bras chétifs de la jeune femme et ses crocs s'enfoncèrent dans sa gorge. Tout se passa très vite, si bien que notre amie n'eut pas le temps de crier ou d'appeler à l'aide. Seul un gargouillis écœurant s'échappa de ses lèvres avant que son corps ne s'affaisse sur lui-même. Sans vie.

Je sentis Arthur et Elena me tirer en arrière. Leurs visages étaient aussi livides que le mien, mais contrairement à moi, eux semblaient en parfaite possession de leurs moyens. Le reste de notre petit groupe commençait à reculer quand j'aperçus le corps d'Hugo se soulever maladroitement. Il nous jeta un bref regard. Son visage était couvert de sang, et des larmes ruisselaient abondamment sur ses joues. Pourtant ce n'était pas de la douleur que je vis dans ses yeux, seulement le désespoir et la culpabilité. Puis un autre pavé vint s'écraser sur son crâne, et l'impact lui écrasa le visage contre le sol. Cette fois-ci, il ne se relèverait pas, la force que cette chose exerçait sur les pavés était démentielle.

Aloys (Tome 1) : lightning and shadowWo Geschichten leben. Entdecke jetzt