Chapitre 25 (2/2)

2.6K 306 36
                                    

Swann m'intima de les suivre alors qu'elles s'engageaient dans les escaliers. Je lui emboîtai le pas, les yeux rivés sur la porte et la représentation qu'il en était fait des Elémentaires. Ici, les dragons que j'avais rencontré à Paris semblaient mesurer des dizaines de mètres en comparaison des frêles silhouettes des soldats de l'ANH. L'artiste s'était de toute évidence laissé emporté par son imagination.

Une fois en bas, il ne fallut pas longtemps aux filles pour repérer le reste de notre escouade, et elles s'empressèrent de se diriger vers eux. Tous vêtus d'un costard élégant, ils formaient un groupe impressionnant. Mélange de virilité et de classe qui fut bientôt annihilé par les cris et les rires grossiers qui s'échappaient de leurs bouches. Seul Eren paraissait peu à l'aise à en juger par la manière qu'il avait de tirer sur son col, ce qui me rassura quelque peu. Je n'étais pas la seule à ne pas me sentir à ma place. En nous voyant arriver, Nao et Eban se mirent à siffler tandis qu'Eren et Horace éblouis par ce qu'ils voyaient, écarquillèrent les yeux. Sans grande surprise, les yeux d'Eren n'en avaient que pour Cali, dont il s'était beaucoup rapproché depuis qu'ils s'entraînaient ensemble. Horace, lui, semblait plutôt captivé par les courbes sensuelles de Jin.

— On commençait à croire que vous alliez manquer le discours ! s'exclama Soen en nous gratifiant d'un grand sourire.

Visiblement, il avait fini lui aussi par céder aux charmes de ce gala et semblait ravi d'être là, vêtu d'un costume noir légèrement trop étroit pour son corps de géant. Un orchestre jouait un air discret qui ne m'était pas familier et qui semblait laisser le public de marbre.

— On ne danse pas avant le discours, m'informa Eban en me voyant plaindre les musiciens du regard.

Discours qui serait prononcé par les Melchior. Du moins, Lucian Melchior et sa femme, car d'après Eban, Aaron ferait comme chaque année office de figurant. La salle se remplissait rapidement et je reconnus sans mal tous ceux qui partageaient mon réfectoire depuis près de deux mois : les membres des escouades d'élite. Parmi eux, on apercevait également des civils dépourvus de tatouages militaires. De simples humains. Ils semblaient beaucoup plus guindés que les soldats dont j'avais l'habitude. Aucun doute possible, c'était là tout ce qu'il restait de la haute société. Des gens qui avaient atteint le sommet non pas avec une mutation, mais grâce à de l'argent et des jeux de pouvoir.

L'atmosphère changea radicalement lorsqu'en haut des escaliers se dessinèrent les silhouettes des Melchior. La musique s'arrêta et le temps parut un instant suspendu tandis que tout le monde se tournait vers eux dans un silence religieux. J'avais déjà vu leur visage à la télévision et sur des affiches de propagande, mais c'était autre chose de les voir en vrai. J'avais beau les haïr de toute mon âme, ils dégageaient une prestance presque surnaturelle qui forçait le respect. Aaron n'était pas en reste sur ce terrain-là non plus. Il n'était pas simplement impressionnant, il était également sexy à se damner dans son smoking noir. Tandis qu'ils descendaient, Aaron balaya la pièce du regard et s'arrêta un instant sur notre petit groupe. Puis sur moi. Et mon cœur s'emballa.

Traître.

Ce n'était pas le moment de perdre mes moyens ! Ma main se referma d'instinct sur le nouveau pass qui ornait mon poignet, comme si je sentais soudainement le besoin de le cacher au reste du monde. Mes yeux, eux, se contentèrent de suivre cette illustre famille jusqu'à l'estrade de l'orchestre où les attendait un micro et plusieurs drones en guise de caméraman. Puis le discours commença et mon cerveau se concentra exclusivement sur Aaron. Il cachait plutôt bien son jeu, mais je le connaissais désormais suffisamment pour savoir qu'il détestait se retrouver là, au cœur de l'attention. Son air légèrement crispé, presque agressif, et son regard glacial n'étaient pas là uniquement pour le spectacle, il était réellement contrarié.

Aloys (Tome 1) : lightning and shadowWhere stories live. Discover now