Prologue

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« Think you're so criminal »

Replié sur moi-même au maximum, j'essaie de me faire le plus petit possible entre le buisson et le mur de l'immeuble derrière moi. Mes genoux me broient la poitrine tellement je les serre contre moi, totalement crispé, mais hors de question d'abandonner. À bout de souffle d'avoir couru le plus loin possible, je tente de retenir au maximum ma respiration de peur d'être repéré.

La peur a envahi entièrement mon être à cet instant précis.

Parce qu'il n'est pas loin, je le sais, je l'entends. Il est là, tout près de moi et je suis mort de trouille. Je n'ai pas eu le temps de donner le signal, j'aurais dû donner le signal mais tout est arrivé tellement vite. Je l'ai vu au loin, cagoulé, habillé tout en noir et armé. Je ne sais pas qui il est mais il venait forcément régler ses comptes.

J'étais seul en bas ce soir et j'ai eu peur parce que je n'aurais pas dû être tout seul merde. Alors j'ai couru, aussi vite que je pouvais, j'ai couru parce que j'ai eu peur, peur de mourir. Je suis trop jeune pour mourir même si vivre une vie comme la mienne ce n'est pas réellement vivre mais je ne peux pas mourir maintenant, pas comme ça.

Une simple détonation a résonné entre les murs du quartier. Un simple bruit qui pourtant peut tout faire basculer. Mes pas ont continué de frapper le sol à toute allure tandis que je priais pour ne pas être touché, pour ne pas m'écrouler sur le bitume froid de la cité. Et maintenant, planqué derrière ses buissons, je suis dans un tel état de choc que je ne pense même pas que je sentirais si j'étais blessé. L'adrénaline a un effet incroyable sur notre corps alors peut-être que je suis en train de me vider de mon sang sans m'en rendre compte et que quelqu'un me trouvera là, demain matin, dans une mare de sang.

Paralysé. Le mot est même trop faible pour décrire mon état. Mes oreilles bourdonnent, je ne vois pas à 50 centimètres et j'ai l'impression de manquer d'air. Mais je dois survivre.

Les pneus d'une voiture crissent sur le sol humide du quartier mais je ne bouge pas. Il fait totalement nuit et c'est sûrement pour cela que je ne vois pas cette personne arriver à côté de moi. Ce n'est que lorsque sa main se pose sur mon épaule que je sursaute et me retiens de hurler de toutes mes forces. Pour autant, mes réflexes sont encore bien présents puisque j'attrape le poignet de l'individu et le tord brusquement.

« - Calme c'est juste moi. Dépêche-toi de sortir de là, les keufs vont débarquer il faut que tu rentres chez toi. »

En reconnaissant sa voix, je lâche immédiatement le poignet et souffle longuement. Il m'aide à me relever et je me contente de hocher la tête, encore dans un état second.

« - Ça va aller ?

- Ouais, ouais je crois. Je prononce faiblement alors que mes jambes me maintiennent à peine debout.

- Ok. Dépêche toi de rentrer, de te coucher. Oublie pas, t'as rien vu et tu sais rien c'est clair ? Me rappelle cette voix si familière sur un ton pourtant très sec. »

Toujours les mêmes instructions, toujours le même système, je connais tout ça par cœur depuis le temps. Je me contente donc de hocher la tête en espérant que cela se voit malgré la pénombre et commence à avancer vers mon immeuble. Mais à peine 3 pas plus loin, je m'arrête net quand j'aperçois une masse au sol. Le bruit du coup de feu résonne encore dans mes oreilles et me glace le sang. Ce corps inerte me prouve que non ce n'est pas moi qui ai reçu la balle. Je tente d'identifier la personne mais dans cette obscurité c'est impossible. Très vite, une main se presse dans mon dos.

« - Grouille toi je t'ai dit, on a pas le temps.

- Mais... c'est qui ? J'interroge comprenant la gravité de ce qui se passe. »

Je n'obtiens aucune réponse à ma question et me contente d'avancer lorsque la personne me pousse un peu plus encore. Les sirènes résonnent au loin et les lumières bleues apparaissent, brisant la pénombre.

Je vois rapidement quelques lumières s'allumer aux quatre coins des tours qui m'encerclent et je comprends que je dois fuir pour sauver ma peau. La police et les pompiers doivent certainement rouler à toute vitesse dans les grandes rues de la ville et dans moins de 2 minutes ils seront là.

« - Rentre et enlève cette expression horrifiée de ton visage. Ne prends pas un air coupable, tu n'es pas coupable. »

Je me jette alors sur la porte de mon immeuble et tape automatiquement le code d'entrée pendant qu'il s'éloigne en courant direction l'immeuble d'à côté. Je grimpe les escaliers, l'ascenseur étant comme toujours hors service, à toute vitesse et arrive avec le peu d'énergie qu'il me reste au quinzième et dernier étage. Sans réfléchir, j'ouvre le plus discrètement possible la porte d'entrée et la referme lentement. Les sirènes se sont arrêtées et j'en déduis qu'ils sont tous en bas, dans moins de temps qu'il n'en faut pour me remettre de mes émotions, tous les immeubles autour seront réveillés pour être interrogés c'est certain. Alors je traverse doucement le petit couloir en L de l'appartement et ouvre la porte du fond. J'enlève mes vêtements que je lance un peu partout dans ma chambre et me jette dans mon lit.

Je reste là, à fixer le plafond jauni par la fumée et le temps, encore sous le choc de cette soirée. Je voudrais juste partir, partir très loin de tout ça, loin de ma vie. Dans quelques instants je vais me retrouver face aux flics, une fois de plus dans ma vie, et je vais leur mentir, une fois de plus. Et une nouvelle fois je vais prier très fort pour ne pas finir en garde à vue, pour ne pas revivre ses longues heures d'interrogatoires, cette cellule misérable et la pression des agents. Mais surtout, je vais espérer très très fort ne pas être mêlé à tout ça et pouvoir éviter la prison. Je me suis toujours juré de tout faire pour ne pas couler, essentiellement parce que je ne peux pas me le permettre.

Je sursaute quand, à peine 30 minutes plus tard, de grands coups sont frappés contre la faible porte de l'appartement qui menace de céder à tout instant.

« POLICE ! »

Je respire un grand coup mais ne bouge pas, à quoi bon, ils viendront me chercher dans tous les cas. Que l'enfer commence.

« I'm the bad guy,
I'm only good at bein' bad, bad »

- Billie Eilish, Bad Guy

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Bonsoir !

J'espère que vous allez bien ! Voici le prologue d'une nouvelle histoire qui traine dans un coin de ma tête depuis plusieurs années maintenant mais à laquelle je n'avais pas de temps à consacrer. J'ai mis du temps avant de réussir à poser des mots sur l'idée que je m'en étais faite. Le confinement de 2020 m'a beaucoup aidé finalement mais je ne me sentais pas prête à partager cette histoire avant de réellement savoir où j'allais.

Aujourd'hui, je suis quelque peu stressée de vous partager le prologue de cette histoire qui me tient beaucoup à cœur. J'espère que ce prologue vous a plu et que l'histoire vous plaira. Je posterai le premier chapitre dans les prochains jours.

Prenez soin de vous.

À bientôt.

M.

#Infiltrefic

INFILTRÉWhere stories live. Discover now