Chapitre 27

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Emna choisit tout d'abord de finir son repas avant d'aller s'installer devant son ordinateur sur lequel deux pages étaient ouvertes côte à côte : une de traitement de texte et une de recherches internet ; la première servirait à prendre en notes ce que dirait Colette et la seconde à essayer d'en savoir plus si cette bonne dame refusait de lui expliquer. Enfin, la jeune femme se décida à retrouver le numéro de celle qu'elle était censée appeler sa belle-mère dans son journal d'appels et, lorsqu'elle l'eut retrouvé, glissa vers la droite pour appeler.

Après deux sonneries seulement, une voix masculine décrocha et Emna pensa tout de suite qu'elle avait dû se tromper de numéro tout en se demandant comment elle avait bien pu faire vu qu'un seul numéro inconnu l'avait appelée ce jour-là.


- Excusez-moi, j'ai dû me tromper...

- Emna ? C'est toi ?


Cette intonation et ces mots, cette combinaison fit disparaître tous les doutes qu'avait Emna quant au fait qu'elle se soit trompée. C'était son père qui avait répondu. C'était son père qui avait répondu avec cette façon bien à lui de lui répondre lorsqu'elle l'appelait, pleine de surprise dédaigneuse mélangée à un brin de fierté déçue.


- Je voudrais savoir ce que tu as.


Être froide n'était pas la meilleure idée du monde mais Emna ne pouvait pas s'en empêcher, avait toujours du mal à rester calme lorsqu'elle parlait avec son père, avait toujours en tête la façon dont s'était déroulé le divorce de ses parents car, si elle avait pu protéger Cédric de tout cela, personne n'avait pu être là pour elle.


- Une leucémie myéloïde chronique. Ma moelle osseuse produit trop de globules blancs et une grande partie ne se sont pas développées correctement et sont donc anormaux. Les médicaments n'ont pas fonctionné donc j'ai besoin d'une greffe.


Emna écoutait silencieusement et elle eut l'impression de se retrouver une dizaine d'années en arrière lorsque, collégienne, elle n'arrivait pas à apprendre ses dates d'histoire pour le diplôme national du brevet et que son père avait pris un temps monstre pour lui expliquer des anecdotes sur chacun des événements pour qu'elle-même les retienne mieux. Tout cela semblait si loin, maintenant. Dans ce qu'il venait de lui expliquer, c'était surtout le mot « leucémie » qui appeurait Emna. Comme beaucoup trop de personnes sûrement, la jeune femme ne pouvait qu'imaginer un cancer incurable même si, au vu de ce que son père lui avait dit, cela n'avait rien à voir.


- Est-ce que tu risques de mourir ?


La question était partie toute seule sans qu'Emna n'y ait réellement pensé, mais c'était de toute façon une question qu'elle aurait posée ; elle se connaissait assez pour le savoir.


- Pas de la maladie en elle-même mais il y a des chances qu'une maladie opportuniste s'en occupe. C'est un peu comme... le SIDA si tu veux.


Emna savait à quel point l'exemple du SIDA que lui avait donné son père avait dû être compliqué pour lui qui pensait depuis toujours que cette maladie n'existait que chez les personnes homosexuelles. C'était vraiment un idiot doublé d'un abruti fini. Parfois, la jeune femme regrettait réellement de ne pas s'être battue dès sa naissance contre ces idées qui n'ont pas lieu d'être. Au moins avait-elle obtenu les réponses qu'elle voulait.

Le TrucWhere stories live. Discover now