SAVEUR AMERE

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Ploc Ploc.

C'est quoi ce bruit ?

Ploc, ploc, ploc. 

Grêle. 

Ploc, ploc...

Allez, je vais me rendormir. 

PLOC. 

Je bats des cils, fatigués, les yeux tiraillés par le sommeil et je dois les refermer avant de les rouvrir plus difficilement encore. 

TOC TOC. 

Changbin ? Je ne suis pas sûr alors je ne bouge pas. Les toc toc restent pendant de longues minutes puis finissent par s'éteindre. Je n'entends plus rien. Je me lève quand même, dégageant ma couette et fais le tour de mon lit pour aller à ma fenêtre. Je frôle la crise cardiaque lorsque j'ai tiré le rideau. Changbin était dos à la fenêtre, soit en train de dormir ou de regarder le ciel étoilé. J'ouvre la fenêtre et il manque de tomber mais je l'en empêche en le soutenant par le dos d'une main. 

- Qu'est-ce que tu fais là ? je demande froidement. 

- Je voulais m'excuser.

- T'excuser ? je n'ai pas d'excuses à entendre de ta part. 

- Désolé, Jisung... 

Changbin parait vraiment désolé et à la fois sérieux. Ses mèches de cheveux retombent sur ses yeux et lui donnent l'impression d'être juste un psychopathe venu à ma fenêtre. Bien heureusement pour moi, Changbin n'est pas un psychopathe. Enfin, je crois ? 
Changbin s'invite de lui-même à l'intérieur de ma chambre sans me demander mon avis et me fait un câlin. Je suis d'abord déstabilisé par ce câlin soudain et au prix d'efforts intenses d'éviter de trembler comme pris de spasmes, je réussis à rendre un câlin à Changbin. Mes mains s'agitent tellement à cause du stress. Avec mon voisin, nous sommes restés un petit moment enlacés puis nous nous sommes séparés. Changbin va s'asseoir sur mon lit sans demander mon avis non plus et il grimace. Il se penche avant de me tendre mon cellulaire. 

- Tu l'as jeté ou il est tombé ?

- Les deux. 

- Ah super. 

Je m'assois ensuite à côté de lui et baisse la tête. 

- Tu voulais me parler du coup. 

- C'est bon, ça va... 

- Bof. Pour un gars qui va bien, je trouve ta voix étrangement grave et rauque puis tes yeux ont l'air tout rouge. Et t'arrêtes pas de trembler, donc...

- C'est parce que tu m'as fait un câlin tout à l'heure !

- C'est qu'un câlin mec. Mais tu voulais vraiment me parler donc je ne lâche pas l'affaire. La voiture de ton père est d'ailleurs plus garée devant la maison, il travaille encore ?

- Non il est partit, ma mère et lui se sont disputés.

J'ai sorti ça d'une traite et Changbin ne paraît même pas étonné. A-t-il vécu ça lui aussi ? ça m'étonnerait, sa famille a l'air tellement heureuse... Je l'envie presque. Changbin se contente de hocher la tête, les bras croisés. 

- Et ma soeur est rentrée tard avec son copain donc ça a vite dégénéré. Mon père a pris ses cliques et ses claques, voilà... 

Sur le moment, le dire m'a soulagé d'un poids et à la fois, je devais avoir une expression neutre sur le visage. Alors que je suis presque à deux doigts de pleurer. 

- Tu sais Changbin... je supporterai pas que mes parents se séparent et pourtant, il faut que j'accepte que le divorce peut arriver à tout moment... 

- Oui, c'est juste. Accepte. De toute façon, ça ne servirait à rien de faire une crise pour que tes parents restent ensembles, ça ne fera que... qu'attiser les flammes. Ce sont les décisions des parents et non les nôtres. S'ils veulent se séparer, c'est bien pour eux, je respecte leur choix. A contrario, je sais que c'est dur à accepter mais même si ça fait bizarre au début quand tes parents viennent tout juste de se séparer. Je parle quand tu vas être en "garde alternée". Dans tous les cas, ne t'immisce pas dans leur choix. Ou tu le regretteras vraiment toute ta vie. 

- Tu... Changbin... tu as vécu la même chose...?

- Parlons d'autre chose s'il te plaît. 

Par cette phrase, j'ai senti qu'il avait dressé un mur entre nous que je ne pourrais ni briser ni franchir. C'était je crois un des seuls mystères que j'avais pu trouver chez Changbin. Moi non plus, je ne lui disais pas tout. Cela faisait un peu plus d'une semaine qu'il avait déménagé, voire deux. 

- Désolé, Changbin.

- Je crois qu'on passe notre vie à s'excuser.

Changbin rit un peu, doucement bien sûr, mais c'était mignon. Il avait réussi à détendre l'atmosphère. Je me sens bien avec lui. Jusqu'à ce que je me rende compte par le regard interloqué qu'il m'adressait que j'étais en train de pleurer à nouveau. Les larmes silencieuses roulent sur mes joues et s'écrasent sur ma couette. J'avais le cœur plus lourd qu'avant et le cerveau embrumé. Changbin me fixe tristement et me caresse la joue de ses doigts. Je frissonne à son contact. 

Avait-on établi des règles pour le contrat du flirt ? je ne crois pas non. 

- Dis Jisung.

- Oui ?

- On peut franchir une limite ?

- Laquelle ?

- Celle-là. 

Changbin m'adresse un dernier regard avant de fermer les yeux et de m'embrasser. Ses lèvres ont effleuré les miennes comme une tendre caresse, puis elles se sont délicatement rencontrées. Le goût de mes larmes se mélangèrent au baiser qui devint salé et amer. 
Je ne sais pas combien de baisers nous avions échangé cette nuit-là mais ce qui est sûr, ce sont des myriades de papillons qui ont explosé dans mon ventre dans une danse folle et le toucher de Changbin, ces effleurements et son souffle, qui m'ont brûlé ma peau sensible, frissonnante et avide de ce contact à présent. 

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nda : l'auteure est morte en écrivant ce merveilleux chapitre, bisous

𝗰𝗼𝘀𝗺𝗼𝗻𝗮𝘂𝘁 ₍ᐢ ̥ ̮ ̥ᐢ₎ ᵇⁱⁿˢᵘⁿᵍOù les histoires vivent. Découvrez maintenant