Tempête

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CHAPITRE V

Mon regard scrutateur sonde rapidement les élèves déjà levés autour des bureaux. Je soupire de frustration lorsque je remarque que Juvia est déjà partie. Furtive, discrète et presque translucide, elle m'échappe comme de l'eau qui s'écoule. Rebelle: elle se glisse entre mes doigts.

Une main forte se pose fermement sur mon épaule et je reconnais la poigne et la chaleur naturelle qui émane de Natsu.

– Y a tournoi ce midi, on y participe avec Erz' et Gajeel, ça te dit ? J'm'enflamme déjà ! Son visage est souriant et ses muscles transpirent d'impatience.

Habituellement, je n'aurais pas hésité à l'accompagner, mais aujourd'hui, ma priorité reste Juvia. Je me perds quelques secondes dans mes pensées et réfléchis aux lieux où elle aurait pu s'isoler, j'en viens même à oublier la présence de mon ami à mes côtés. Les différents endroits défilent dans mon esprit: le square, le toit, l'infirmerie? Mon dévolu se porte sur le toit, là où on se sent le plus proche du ciel.

– 'Pas le temps ce midi..demain ?

Je n'entends même pas la réponse que je devine déçue de mon meilleur ami, bien trop occupé à tracer vers le toit du bahut. Mes pas sont pressés. Depuis la dernière fois, Juvia me fuit et aujourd'hui, je compte bien la coincer.

C'est essoufflé que j'ouvre brusquement la porte qui mène à l'extérieur. Et comme prévu, Juvia est assise sur le rebord du toit, les pieds dans les airs et son bento à la main. Ses cheveux virevoltent au gré du vent et le temps de reprendre mon souffle, je reste pantois face à son dos.

– T'es là... Je souffle, soulagé.

Son visage se tourne, mes yeux rencontrent les siens, et ses gestes se font précipités.

– Je ferais mieux d'y aller. Marmonne-t-elle en commençant à ranger ses affaires dans son sac.

Mon pouls s'accélère subitement et je commence à paniquer, parce que j'ai la triste impression que c'est la seule fois où elle ne me filera pas entre les doigts. Je m'avance vers elle prudemment.

– Attends. Reste. S'il te plaît. Je crois que j'ai une idée. Mon ton est presque autoritaire et mes paroles sonnent comme un ordre.

Avec, j'essaye de la convaincre de rester ici. De me raconter son histoire pour me laisser une chance de comprendre. Nos corps se rapprochent. Ses cheveux frôlent mes joues, et ses yeux m'ensorcèlent.

– Mais avant, il faut que tu me parles de ce tatouage. Je lui dis en posant mon regard sur l'encre gravé sur ses doigts fins.

Mes doigts titillent les siens, légèrement, doucement, calmement. Son toucher est électrique et pendant quelques secondes on reste comme ça, figés dans l'espace temps.

Puis sa main s'en va, et mon cœur avec. Ses lèvres s'entrouvrent et c'est d'une voix presque murmurée qu'elle entame ses explications.

– Il est apparu à mes trois ans, à la mort de ma mère. Avant, c'était elle qui l'avait. Je suis une descendante de Luculia, Grey. C'est mon destin.

Je reste muet devant le spectacle qu'elle m'offre, son visage brisé mais magnifique, sa voix chancelante, sa malédiction familiale.

– Elle apparaît souvent ? Ma voix se veut douce.

Juvia hoche la tête, elle semble plus ouverte à la discussion qu'auparavant. Et inconsciemment, mon corps se détend.

– Dès qu'elle sent une vulnérabilité chez les personnes que je fréquente ou..quand je commence à me déconcentrer.

La croqueuse de larmesWhere stories live. Discover now