🏮 Les deux calebasses (FxF)

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Conte traditionnel chinois

Il était une fois, dans un petit village niché entre la mer et la montagne à quelques centaines de li de la capitale de l'empire où se couche le soleil, une femme qui vivait seul avec sa fille unique. La jeune femme, prénommée Xian, était réputée pour être une fille courageuse et travailleuse, qui ramassait chaque jour du bois dans la montagne et pêchait dans la mer pour nourrir sa minuscule famille.

Par un beau jour d'été, Xian partit comme à son habitude dans la forêt aux pieds de la montagne pour y chercher du bois pour la cuisine. Il commençait déjà à faire chaud, mais il en fallait plus pour la décourager. Comme elle le faisait chaque jour, elle ramassa autant de bois qu'elle pouvait en porter, puis elle s'installa un instant à l'ombre pour souffler un peu et boire l'eau de sa gourde. Quelque part au-dessus de sa tête, un éclat de lumière attira son attention et elle leva les yeux avec curiosité pour découvrir deux petites calebasses étonnamment lisses. Elles étaient loin d'être mûres mais elles paraissaient si jolies que Xian se dit qu'elles feraient des bols solides pour leur maison lorsqu'elles seraient prêtes à être séchées. Elle pourrait même les décorer avec un peu de peinture, ou son couteau.

Résolue et enchantée par la perspective de ces petits bols qu'elle imaginait déjà, elle rangea sa gourde et prit ses outils pour essayer d'arracher les plantes avec leur racine, de manière à pouvoir les installer dans le jardin de leur maison. Cela lui demanda d'énormes efforts, car les racines étaient épaisses et plongeaient loin dans la terre, mais Xian était déterminée et elle y parvint enfin, non sans s'écorcher les mains. Elle ajouta les plantes à son fagot de bois puis s'en retourna chez elle, où elle les planta. Chaque jour elle les arrosait et les calebasses prirent si bien dans le jardin qu'elles devinrent de plus en plus belles, et toujours aussi parfaitement lisses.

Un jour, quelques semaines plus tard, un homme venu du sud passa devant la maison et les aperçut. Il resta longuement à les admirer et, quand Xian sortit de la maison pour les arroser, l'étranger demanda à les acheter, allant jusqu'à proposer des sommes dignes de la famille impériale.

- Je ne souhaite pas les vendre, répondit doucement la jeune femme, quel que soit le prix que vous proposez. Je les ai plantées pour ma mère. Mais pourquoi les désirez-vous à ce point ?

- Ton honnêteté mérite une récompense, répondit le voyageur. Tu aurais pu faire monter les prix et m'en demander plus cher encore - j'aurais payé. Cependant, si tu ne souhaites pas t'en séparer, c'est ton choix et je le respecte. À ta place, j'en ferais de même. Vois-tu, ces calebasses ont des propriétés enchantées. Celle de gauche s'appelle Sèche-la-Mer car elle pourrait te permettre de vider l'océan en peu de temps. Celle de droite se nomme Brise-la-Montagne car elle est si dure que tu peux briser d'immenses rochers avec. Passé le mois d'août, elles seront mûres et efficaces. Prends-en bien soin et utilise-les avec sagesse !

Un peu surprise, Xian remercia l'homme pour ses bons conseils, lui offrit à boire puis lui souhaita bonne route lorsqu'il repartit. Plus encore, elle prit soin de ses calebasses jusqu'à ce que le mois d'août se soit écoulé et qu'elles soient tout à fait mûres. Alors elle les cueillit et décida de voir si ce que le voyageur lui avait dit était vrai. Elle rangea soigneusement Brise-la-Montagne et descendit sur la plage avec Sèche-la-Mer. Avec précaution, elle plongea la calebasse dans l'eau, près de l'endroit où la rivière se jetait dans les vagues et, à son grand étonnement, les vagues reculèrent de plusieurs li, dévoilant du sable humide et des poissons surpris qui se tortillaient. Immédiatement, la jeune femme vida la calebasse et la mer recouvrit la bande de plage.

Effrayée parce qu'elle avait fait, Xian voulut rentrer chez elle et soigneusement enfermer les deux calebasses là où personne ne pourrait s'en servir pour faire une bêtise. Mais avant qu'elle ne puisse tourner les talons, une silhouette apparut au creux des vagues. C'était un homme très grand et très musclé, qui tenait un trident à la main et semblait couvert d'écailles. Il s'approcha de Xian et la salua poliment.

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