Adieux.

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Delphini, Albus et Scorpius étaient de retour à Flagley-le-Haut. À peine arrivés à la résidence, ils entendirent une voix féminine les interpeler.

- Delphini !

La sorcière fit volte-face. Éléonore courait en sa direction, les yeux pleins de larmes. Elle se jeta dans ses bras, laissant Delphini bouche bée.

- Je suis tellement désolée, j'ai été si stupide !

La jolie serveuse relâcha son emprise et contempla son amie avec émotion. Scorpius lança un regard dubitatif à Albus, qui haussa les épaules, ne comprenant pas ce qui se passait. Les deux garçons s'éloignèrent pour laisser plus d'intimité aux sorcières. Delphini ne savait que faire. Elle avait pris soin d'éviter Éléonore pendant si longtemps que la revoir lui faisait une impression étrange. Elle ignorait si elle était heureuse de faire face à ce visage familier, ou profondément gênée. Sûrement ressentait-elle les deux à la fois.

- Éléonore...je ne m'attendais pas à te voir ici, murmura-t-elle. Écoute, je...j'ai quelque chose d'important à faire. Je n'ai pas le temps de...
- Ça ne prendra pas longtemps, la coupa Beaufort. Je voulais seulement te dire que...
- Nous devrions peut-être aller ailleurs, dit Delphini en jetant un coup d'œil aux résidents qui regardaient la scène d'un air curieux.
- Oh. Oui, tu as certainement raison.

Delphini fit signe aux deux garçons de les suivre. Ils se rendirent à l'appartement de la jeune Jedusor qui se trouvait à quelques minutes de St Oswald. Albus et son ami restèrent dans le salon, tandis que les deux filles se dirigèrent vers la chambre à coucher. Delphini referma soigneusement la porte derrière Éléonore.

- Je sais que tu ne veux certainement plus de moi Delphi mais...
- Ce n'est pas vraiment ça, répondit la sorcière la gorge nouée. J'ai été très occupée ces derniers temps. À vrai dire, je n'ai pas vraiment réfléchi à ce qui c'était passé. Cela m'importe peu.

Bien sûr, elle mentait. Éléonore avait occupé chacune de ses pensées ces derniers mois. Mais il était hors de question de lui confesser cela, c'était inutile. Delphini était troublée par sa propre attirance. Ce désir grandissant était pareil à une maladie destructrice. Il la faisait douter de ses choix, pourtant elle était persuadée qu'il ne s'agissait là que d'une simple attirance purement physique. Si ce n'était que ça, elle pouvait aisément décider de laisser Éléonore derrière elle et prendre le risque de ne plus jamais la revoir. Mais il n'en était rien. Delphini, bien qu'elle n'en montra rien, était déchirée par le choix qui s'imposait à elle. Elle savait pertinemment qu'il n'y avait pas de futur dans lequel elle serait aux côtés de son amie et où son père serait en vie, et cela lui brisait le cœur.

- Répète-moi ça, mais en me regardant dans les yeux. Peut-être que je te croirais alors.
- Éléonore je...

Delphini n'eut pas l'occasion de finir sa phrase. Les lèvres de la serveuse s'étaient posées délicatement sur les siennes. Après une seconde d'hésitation, la sorcière aux cheveux d'argent lui rendit son baiser. Doucement d'abord, puis avec plus de fougue. Sans qu'elle s'en rende compte, ses mains s'étaient mises à parcourir le corps brûlant de son amie. Elle pouvait sentir son souffle saccadé au creux de son coup, humer son délicat parfum. Le monde venait de s'arrêter, il n'existait rien d'autre qu'elles et leurs corps entrelacés.
Lentement, Éléonore éloigna son visage de celui de Delphini. Elles se regardèrent un moment, peinant à retrouver un rythme de respiration normal, les joues rosies par leur échange langoureux.

- Delphi, ça fait un moment que je voulais te dire quelque chose, dit timidement la française en entortillant une mèche de cheveux autour de son index.

Son amie continuait de la regarder avec attention, le souffle court.

- Je voulais te dire que je...
- Moi aussi.

Éléonore se stoppa net. Elle n'en croyait pas ses oreilles. Jamais elle n'aurait pensé que ses sentiments étaient partagés. Delphini s'était toujours montrée si froide, la serveuse avait même douté parfois de sa capacité à ressentir quoi que ce soit. Pourtant elle était là devant elle, et lui avait rendu son baiser. Et là voilà qui venait de lui avouer la réciprocité de son amour. Car oui, c'était le mot. Les deux jeunes femmes s'aimaient d'un sentiment amoureux pur, dénué de tout intérêt, de toute malveillance. La jalousie pas plus que la possessivité n'avaient jamais gagné leur esprit. Seule la bienveillance régnait. Le malheureux accident survenu quelques mois plus tôt n'était rien face au futur radieux qui s'offrait à elles. Éléonore était aux anges.

- Je vais partir, Éléonore, déclara Delphini avec difficulté.

Le sourire radieux de la serveuse s'effaça instantanément.

- Comment ça, partir ?
- J'ai un voyage important à faire. Je ne sais pas si je reviendrai. Et même si c'est le cas...les choses risquent d'être quelque peu différentes. Je suis désolée.
- Je viendrai avec toi. J'ai de l'argent de côté, on pourra se débrouiller.
- Non, dit sèchement Delphini.

La jeune femme s'était redressée et ouvrit la porte.

- Tu devrais rentrer chez toi.

Des larmes embuèrent les yeux de la belle Éléonore. Elle se leva fébrilement, sans oser protester, ne comprenant pas ce qui venait de se passer. Avait-elle fait quelque chose de mal ? La jeune femme n'eut pas sa réponse. Son amie la raccompagna jusqu'à la sortie sous les regards étonnés d'Albus et Scorpius. Sur le pas de la porte, Delphini regarda une dernière fois Éléonore qui pleurait en silence. Elle était si triste qu'elle en avait la nausée, mais refusait de laisser transparaitre quoi que ce soit.

- Je suis vraiment désolée, murmura-t-elle avant de fermer doucement la porte.

La jeune Jédusor se retourna vers les garçons qui guettaient le moindre geste de sa part. Lentement, elle sortit le retourneur de temps de sa poche. Les deux sorciers s'approchèrent d'elle, et alors qu'elle tourna la boucle de l'objet pour retourner à l'année espérée, une unique larme vint rayer sa joue.

L'AugureyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant