Chapitre 18

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En arrivant dans le hall des urgences il se mit à crier à l'aide. Des infirmiers accoururent aussitôt avec un brancard et l'emmenèrent à la maternité. Ils la firent entrer dans une salle où on lui interdit l'accès, et une horde de médecins accoururent. Il se mit à marcher dans le couloir et observa les larmes aux yeux tout le sang qu'il avait sur les mains et sur ses vêtements.

Pourquoi tout à coup ça dégénérait de la sorte? Jusque là tout se passait bien! Alors qu'est-ce qui n'avait pas marché? L'accouchement n'était pas prévu pour avant quatre semaines au moins, et d'où venait tout se sang? Pendant au moins une quinzaine de minutes il tourna comme un fauve en cage, jusqu'à ce qu'un médecin sorte.

- Que se passe-t-il, s'il vous plait?

- La situation est vraiment critique, nous craignons de ne pas pouvoir sauver les deux. Il y a eu un décollement placentaire. Elle a pratiquement perdu toutes les eaux, et si nous ne retirons pas rapidement le bébé il va mourir asphyxié. Or ce décollement prématuré a entrainé de graves lésions de l'utérus, et si nous ne stoppons pas immédiatement l'hémorragie la mère risque de se vider de son sang. Nous sommes à court de temps et il est peu probable que nous arrivions à sauver les deux. Nous allons vous demander de choisir qui de la mère ou du bébé sauver en priorité afin de...

- La mère, sauvez la mère! cria Lucas, désespéré.

Le médecin retourna dans la salle, et Lucas se laissa choir le long du mur, sans chercher à nettoyer ses larmes?. Pourquoi cela devait-il se passer ainsi? Qu'est-ce qui n'avait pas marché? Tout allait si bien, pourtant! Il venait de faire une demande plus ou moins officielle à la femme qu'il aimait, et maintenant il risquait de la perdre. Cette soirée avait été tellement heureuse, alors pourquoi fallait-il que les choses tournent ainsi?

Il avait fait de Rémy sa priorité, mais il savait très bien qu'elle aurait choisi de sauver le bébé. Elle lui en voudra sûrement quand tout ça sera fini, si jamais elle s'en sortait et pas le bébé. Mais il ne pouvait se résoudre à perdre la femme qu'il aimait. Des enfants, ils pourraient réessayer d'en avoir plus tard. Certes il se faisait une joie à l'idée d'accueillir leur fille, mais sa femme était prioritaire. Sa femme...

Il ne savait pas combien de temps il avait passé là, assis par terre, à observer les ampoules du plafond de ce couloir d'hôpital cruellement désert. Et ses portes qui ne s'ouvraient pas! Le sang qu'il avait sur les mains et les habits avaient séché, et ses larmes s'étaient taries.

Il se sentait complètement vide. Comme un pantin délaissé. Il était si abattu qu'il ne bougea même pas quand le médecin vint lui annoncer la fin de l'opération. Rémy était hors de danger, mais ils avaient perdu le bébé. Et les séquelles causées par les lésions étaient telles qu'elle ne pourrait plus jamais avoir d'enfant, et c'était irrévocable. Pour l'instant elle était aux soins intensifs, alors il ne pouvait pas aller la voir.

- Vous devriez appeler vos proches et aller prendre une douche, lui conseilla le docteur avant de partir.

Mais il ne bougea pas le petit doigt. Rémy était saine et sauve, il en était soulagé. Mais elle ne pourrait plus avoir d'enfant. Elle n'allait pas non plus pouvoir serrer Sarah dans ses bras. Son plus grand rêve était à l'eau. Elle allait sûrement lui en vouloir à vie d'avoir sacrifié leur fille pour la sauver elle, mais il préférait ça.

Il se leva enfin. Il se souvint qu'il n'avait pas tenu son téléphone. De toute façon il n'avait pas envie de déranger Bruno à une heure pareille. Il décida de rentrer se changer avant de revenir, espérant que Rémy ne se réveille pas avant son retour.

En voyant les draps maculés de sang en entrant dans la chambre, il serra les poings. Il n'avait rien pu faire. Il était resté là en pauvre spectateur. Il arracha avec rage tous les draps et couvertures jusqu'à ce que le matelas soit complètement nu, et les balança avec ses habits dans un sac poubelle qu'il comptait brûler plus tard. Il il retourna ensuite le matelas, avant de passer dans la salle de bain.

Il retourna ensuite à l'hôpital, et attendit qu'il fasse jour avant d'appeler Bruno pour l'informer de la situation. Il lui demanda en venant de passer à l'appartement chercher Vlad. Elle serait peut-être contente de le voir au réveil.

Entre temps elle était sortie des soins intensifs, et avait été transférée dans une chambre, mais elle mit un certain temps avant de se réveiller. Et son premier geste fut de toucher son ventre encore rond.

- Mon bébé! fut sa première parole. Où est mon bébé? demanda-t-elle d'une voix faible en tournant la tête dans tous les sens.

- Rémy, calme toi, fit-il la gorge nouée. Le bébé est...

Les paroles restèrent calées dans sa gorge, et une larme roula sur la joue de Rémy.

- J'ai perdu notre bébé, c'est ça? demanda-t-elle en fondant en larmes. J'ai... Perdu notre bébé! Pourquoi? Pourquoi ça devait se passer comme ça?

- Chuuut, calme toi! essaya Lucas.

Mais elle éclata en sanglots de plus belle. Lui même ne pût retenir quelques larmes en la voyant ainsi, mais les essuya rapidement et la prit dans ses bras. Il fallait qu'il soir fort pour deux. Il fallait qu'il arrive à l'apaiser. Il la berça tendrement contre son épaule le temps qu'elle se calme.

Elle essuya ses larmes et se redressa dans son lit. Elle retira ensuite la bague qu'il lui avait offerte la veille et la lui tendit. Ça lui brisa le coeur. Alors elle ne voulait plus de lui?

- Pourquoi tu me la rends? demanda-t-il.

- J'ai perdu notre bébé. Je n'ai pas pu te donner cet enfant que tu espérais tant. Et je ne pourrai probablement jamais en avoir. Pourquoi voudrais-tu encore m'épouser après ça?

- Mais parce-que je t'aime! s'écria-t-il. Je t'aime, et ce depuis bien longtemps! Si j'ai tenu à t'offrir cette bague, c'était parce-que je voulais que tu saches que je veux t'épouser, pas juste à cause du bébé! Et je veux toujours t'épouser! Bébé ou non.

- Tu... Veux de moi même si je ne pourrai jamais être mère? Même si je ne pourrai jamais te donner d'enfant?

- Bien sûr que si! la contredit-il. Tu es déjà mère, tu sais! Même si tu ne lui as pas donné naissance, nous avons un fils formidable. Tu es la seule figure maternelle que Vlad ait. Et nous avions décidé que nous l'adopterions officiellement une fois mariés, tu te souviens? Et même sans ça, le fait que tu ne puisse pas avoir d'enfant ne change rien au fait que je t'aime. Et ça, tu vois, c'est la seule raison nécéssaire pour que je t'épouse. Alors, je réitère ma demande.

La porte s'ouvrit et Debby entra, accompagnée de Bruno qui tenait leur bébé et Vlad. Lucas prit la bague, et pour la deuxième fois en vingt-quatre heures, mit un genou à terre devant Rémy.

- Rémy Baroma, tous ces gens pourront témoigner de la femme formidable que tu es. Le genre de femme qui travaille sans relâche, une femme qui donne de l'amour à tout le monde sans rien attendre en retour. Tu es de celles que, lorsqu'on rencontre, on ne veut plus perdre. De celles qu'on aime sans s'en rendre compte, sans même le vouloir. Je suis tombée amoureux à nos débuts, quand il n'était question que de désir. J'ai ensuite eu la chance de t'avoir à mes cotés de longs mois pendant lesquels mon amour n'a fait que grandir. Et aujourd'hui je ne peut me résoudre à te perdre. Je n'ai pas su protéger cet être qui nous était cher à tous les deux. Mais je suis prêt à te donner tout l'amour du monde. Ça n'a pas d'importance que tu ne puisse pas enfanter. Car avec Vlad nous sommes prêts à te donner deux fois plus d'amour que tu n'en a jamais reçu. Alors s'il te plait, Rémy, acceptes-tu de devenir ma femme, et la mère de Vlad?

Si en premier lieu il crut qu'elle refuserait, ses doutes furent balayés lorsqu'elle lui dit oui en versant des larmes. Mais des larmes de bonheur cette fois. Il était conscient qu'il ne pourrait jamais lui faire oublier le traumatisme de la perte de Sarah, lui même ne pourrait jamais l'oublier. Mais il allait tout faire pour qu'elle ne manque jamais d'amour.

Deux fois plus d'amourWhere stories live. Discover now