Neuf.

617 60 12
                                    

Salam.

...ses mots sonnent faux

Je suis debout face à ce miroir, dans ma longue robe couleur émeraude. Nous revenons d'une fête chez la famille de Samir c'était les fiançailles de sa soeur Syrine. Elle était belle dans son caftan blanc orné de fil dorée. C'était la fête à la maison ma belle mère était heureuse Samir aussi et Syrine encore plus. Il y avait ses tantes, ses cousines, ses voisines, ses amies... les rires et les chants frappaient les murs de la grande maison familiale.

Nous sommes à des kilomètres de chez moi, de chez nous dans un tout autre pays. Nous sommes au Maroc et d'ailleurs nous y sommes depuis bientôt un an. Ma vie a complètement changé.

Samir - t'attends quoi pour te changer ?

- je t'attendais, tu peux m'aider avec la robe ?

Samir - bien sûr.

Il s'approche de moi et retire d'abord l'épine qui permet à mon voile de tenir. Doucement il dévoile mes cheveux pour me contempler à travers le miroir, un sourire s'esquisse sur son visage. Il dépose un baiser sur le creux de mon cou avant de faire descendre le zip le long de mon dos.. il sourit puis m'enlace d'où il est avant de me retourner doucement pour m'embrasser.

Samir - je vais prendre ma douche en haut je te laisse dans cette salle-de-bain, on se voit tout à l'heure ?

J'acquiesce le sourire aux lèvres puis il disparait derrière les grandes portes en bois. Aussitôt, mon sourire s'efface j'ai de plus en plus de mal à faire semblant. Une larme coule le long de ma joue droite laissant sur celle-ci des traces de mon mascara. Je suis une femme triste.

Depuis bientôt un an Samir a décidé qu'on vivrait dans son pays d'origine. Sa mère est tombée malade alors elle souhaitait rentrer sur ses terres et Samir pour s'occupait d'elle m'a fait le même souhait. Au début ça ne devait être que temporaire un mois ou deux m'avait-il dit. Puis l'état de sa mère s'est aggravé alors nous avons du prolonger notre séjour. Ne voulant pas passer pour une ingrate, une belle-fille indigne et sans coeur face à la maladie de sa belle-mère j'ai accepté et de toute façon je n'avais pas vraiment le choix. Je m'inquiétais aussi du sort de ma marâtre la voyant alitée fatiguée le visage pâle et une perte de poids folle.

Les semaines sont passées, après une grande période de fatigue Nassima allait mieux doucement elle reprenait sa vie en main jusqu'à ce qu'elle fut presque totalement guérit. Le moment était alors parfait pour rentrer je pensais que Samir s'était préparée à ça mais au contraire il venait d'entamer un commerce avec son oncle. Quand je lui ai fait part de notre retour il m'a dit que son oncle avait encore besoin de lui que ce n'était pas le bon moment, qu'il fallait attendre encore un petit moment. Alors comme une femme obéissante j'ai écouté mon mari je ne voulais pas le contrarier alors j'ai patienté.

Et puis voilà cinq mois déjà et j'apprends un jour en nettoyant le sol du couloir de notre maison qu'un mariage se prépare.

Samir - Hafsa t'es toujours pas sous la douche ?

Il vient d'entrer soudainement je le regarde et sourit pendant qu'il fouille dans l'un de ses sacs, il m'a complètement fait sortir de mes pensées.

- si j'y vais.

Samir - je vais prendre un peu de temps je vais passer du temps avec Sarah.

- pas de soucis à plus tard.

Il s'en va aussi vite.

Le mariage qui se préparait était celui de Samir, Sarah étant ma co-épouse.

C'était une des voisines qu'avait connu Samir au paravant quant il était adolescent. Ils se sont retrouvés à notre retour. Oui, je venais d'apprendre le mariage de mon mari pendant que j'étais à genoux à frotter le sol jusqu'en avoir les paumes rougis par l'effort. Quelle humiliation.

Un mois plus tard on ne parlait que de ça " la nouvelle femme de Samir". Quelle chance avait-elle ! Elle avait le droit d'être appelée par son prénom suivi de celui de Samir, elle avait le droit de recevoir un tas d'éloges et puis surtout on ne parlait plus que de leur magnifique histoire d'amour d'adolescent amoureux qui se retrouvent des années plus tard. Mon j'avais eu droits à des surnoms qui me rappelaient sans cesse la couleur de ma peau comme si elle était un problème.

Je ne savais plus si j'étais sa première ou sa deuxième femme, tout ce que je retenais c'est que j'avais appris ce mariage dans les bruits d'un couloir. Il ne m'avait jamais demandé mon avis et comme l'idiote femme obéissante que j'étais je l'avais accompagnée tout au long de ce mariage. De la demande de main jusqu'à l'aménagement de cette dernière, à l'étage du haut.

J'ai souffert et je souffre encore. Je priais chaque fois sans oublier de demander au Seigneur de guérir mon coeur de l'attendrir de faire disparaître toute trace de tristesse de haine d'envie mal placée ou même de rancoeur. Et chacune de mes prières finissaient en larmes sur le tapis de notre chambre. Je n'avais qu'un souhait c'était de rentrer chez moi le plus vite possible loin des messes basses des regards et des rires moqueurs, loin du manque de considération que l'on m'accordée chaque jour sans cesse.

Et puis j'ai remercié Dieu d'avoir une co-épouse aimable et bienveillante, c'était paradoxalement une des meilleures choses que j'avais pu connaître ces derniers mois. C'était plus qu'une simple femme qui partageait mon foyer c'était aussi une amie bien que j'en suis restée méfiante. Je me souviens encore de ces mots qu'elle m'avait confié peu de temps après qu'elle emménage chez nous, justement au fameux deuxième étage :

« j'étais tellement heureuse quant il m'a dit que tu étais d'accord ! que ce mariage ne te causait aucun soucis ! Dieu a entendu mes prières c'est tout ce que je souhaitais ! »

J'ai souris gracieusement face au mensonge que je venais d'apprendre. Comment pourrais-je en vouloir à cette jeune femme qui venait d'épouser l'homme qu'elle aimait ? Comment pourrais-je en vouloir à cette jeune femme à qui on avait caché la vérité ? Elle l'aimait et je ne pouvais lui en vouloir. Cependant, plus les jours passaient et plus je redécouvrais l'homme que j'avais épousé des années auparavant.

Le temps passait encore j'avais appris à vivre avec, à dormir seul le soir, à le voir embrasser la joue d'une autre, à le voir sourire amoureusement en croisant le regard d'une autre j'avais apprit à prendre sur moi à patienter et je me disais que tout ça serait finit une fois que nous serions rentrés. A ce moment là nous sommes ici depuis huit mois maintenant.

On est alors venu demander la main de Syrine elle aussi voulait connaître l'amour elle était jeune belle et diplômée infirmière depuis peu c'était une femme qui savait s'occuper d'un foyer, une fille de bonne famille comme tous le monde le dit si bien puisqu'elle s'occupait de sa mère de l'entretien de la maison de la cuisine elle était parfaite et je suis la première à le dire. Avec Syrine on s'entend très bien elle s'est souvent confié à moi concernant Anas, celui qui voulait l'épouser et d'ailleurs elle m'avait envoyé tâter le terrain avec son frère voir comment il réagirait si sa petite sœur venait à se marier. Et voila qu'à tout juste notre neuvième mois au Maroc on organisait le mariage de Syrine.

Décidément ce n'est jamais de tout repos. Et plus les jours avançaient plus je me sentais prisonnière de ma propre vie.

-

Hafsa.

Disparue - HafsaWhere stories live. Discover now