Chapitre 11

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Une fois dehors, la morsure du froid se fit aussitôt ressentir. Je remontai le col de mon manteau en réprimant un frisson. Tandis que nous marchions, j'eus la tête qui tournait. Tous ces bruits, cette agitation que je pouvais deviner malgré ma cécité. C'était beaucoup d'un seul coup, pour quelqu'un qui venait de rester dix-huit jours enfermé chez elle. Oui, j'avais pris le temps de compter correctement et j'en étais à dix-huit jours sans mettre le pied en dehors de chez moi.

J'avais toujours été introvertie et j'aimais beaucoup passer du temps toute seule. Mais là, je battais tous les records. J'avais conscience que je m'étais renfermée sur moi-même, volontairement coupée des autres et du monde. Je me disais que je me rattraperais lorsque j'aurais retrouvé ma vue.

— Je dois reconnaître que ça fait du bien de marcher au grand air, finis-je par avouer.

Reed prit une grande et longue inspiration.

— Ça ne vaut pas l'air écossais, mais c'est toujours mieux que celui de ton appartement, me charria-t-il.

Je secouai la tête en riant.

— Tu m'as dit qu'on doit aller où, depuis le rond-point ? m'interrogea-t-il.

— À droite, direction le centre-ville.

Il tourna et m'attira contre lui pour que je le suive. Tout en avançant, je me fis la réflexion que nous avions le même rythme de marche, la même cadence chaloupée. Aussi, me promener en me tenant à lui me semblait comme quelque chose de tout à fait naturel, je n'avais pas besoin d'adapter mon pas au sien.

Un scooter passa à côté de nous en faisant vrombir son moteur et je sursautai, agrippant un peu plus le bras de Reed. Le cœur battant, je mis une main sur ma poitrine.

— Bon sang. La trouille que j'ai eue. Et on n'est pas encore arrivé, me plaignis-je.

— Ne t'en fais pas, je ne laisserai pas un vilain scooter te faire du mal et utiliserai mes pouvoirs pour qu'il disparaisse avant qu'il ne tente quoi que ce soit.

— Très drôle, rétorquai-je en lui donnant un coup d'épaule.

Le reste du trajet se fit sans trop d'encombres et nous atteignîmes le restaurant en un morceau. Le serveur nous installa à une table et je l'entendis déposer un menu devant moi. Je le pris dans mes mains et le tendis dans le vide.

— Je n'en aurais pas besoin.

— Vous savez déjà ce que vous allez prendre ? rit-il.

Je soupirai un coup et ce fut Reed qui répondit à ma place.

— Elle ne peut pas lire la carte, parce qu'elle ne voit pas. Je lui ferai la lecture moi-même, merci.

L'homme se confondit en excuses et s'éloigna, nous laissant seuls.

— C'est pour ce genre de choses que je suis bien chez moi.

— Sauf qu'on est sorti de l'immeuble pour essayer de faire en sorte que tu te souviennes de quelque chose. Autant en profiter. Une envie précise ? me demanda-t-il en se référant au repas.

— Bof, je sais pas. J'ai pas très faim. À la limite, je prendrais un dessert quand t'auras fini de manger.

— Ça te dit qu'on en choisisse plusieurs et que ça soit notre dîner ? me proposa-t-il alors.

Un grand sourire prit place sur mon visage et je frappai dans mes mains avec enthousiasme.

— C'est une super bonne idée ! m'exclamai-je.

Quand le serveur revint s'enquérir de notre commande, je fus vraiment déçue de ne pas pouvoir voir sa tête lorsque Reed lui annonça ce que l'on prendrait.

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