Chapitre 6.

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Wafia-Hearthburn

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Wafia-Hearthburn

Putain. Ça doit faire au moins 10 ans que je n'ai pas enfilés de chemise. Ma mère a tenu à ce que je m'habille bien ce soir, voilà pourquoi je me retrouve emprisonner dans cette chemise d'un blanc immaculé. Peut-être mon seul vêtement non-taché. Mon reflet dans le miroir me nargue. T'es ridicule. Mes cheveux sombres sont propres, mais emmêlés, mon jean noir troué aux genoux casse le côté "chic", la chaîne que je porte à mon cou pend négligemment, mes vans défoncées accompagnent le jean.

Ma mère est en cuisine depuis 18 heures. Il est bientôt 20 heures et Jean, Clarisse et Jules ne devrait pas tarder à arriver. Lorsque je descends, la table est joliment dressée. Une nappe blanche habille le bois taché, les chaises sont couvertes de draps rouges.

Dans la cuisine, je retrouve ma mère. Elle est en train de régler la température du four. Je remarque qu'elle porte une robe noire qu'elle a resserrée à la taille avec une ceinture. Ses cheveux sombres sont réunis en un chignon bas, tandis que ses yeux sont légèrement maquillés. Ça faisait une éternité que je ne l'avais pas vu si bien habillé, et malgré les cernes qui soulignent ses yeux, elle rayonne.

Quand elle se tourne, ma mère sursaute en me voyant appuyer sur le chambranle de la porte, ne m'ayant pas entendu. Elle détaille ma tenue, puis sourit. Avec ma mère, nous n'avons jamais eu besoin de parler, nous pouvons rester des heures sans parler. Peut-être parce que quand mon père était là, le moindre bruit le rendait fou. Et quand il était fou, rien ne pouvait l'arrêter.

-Tu es beau, mon fils, souria ma mère

Je me contentai d'un mince sourire. La sonnerie retentit dans toute la maison et comme à chaque fois que des gens viennent ici, je suis en stresse complet. Ma maison est propre et bien rangée, certes, mais la peinture qui s'écaille et les moisissures au plafond me rende honteux. Surtout quand ce sont mes amis qui viennent.

Un homme d'une cinquantaine d'années entra dans la salle à manger. Ses cheveux poivre et sel s'accordent avec sa barbe bientôt totalement blanche. Il a de grands yeux bleu électrique qui ressemble au bleu des montures de ses lunettes. Il n'est pas spécialement grand, ni spécialement musclé. Mais il est large d'épaules.

Derrière lui, une jeune fille d'une quinzaine d'années le suit de près. Ses longs et bouclés cheveux roux contrastent avec le bleu de ses yeux, qui eux même contrastent avec le dégradé vert estompé sur ses yeux. Elle est très grande, plus grande que son père. Au côté de la rousse, un grand jeune homme aux yeux eux aussi bleu, analyse la pièce. Il a un sourire d'enfant, alors qu'il ne doit pas être beaucoup plus jeune que moi. La ressemblance entre les trois est flagrante et leurs yeux y sont sûrement pour quelques choses.

-Bonsoir, sourit chaleureusement ma mère en faisant une accolade aux trois invités

Je reste appuyé à la porte de la cuisine, les bras croisés, un pied sur le mur, le regard meurtri, près à dérouiller Jean ou ses gosses dès la moindre erreur. Le fameux Jean s'approche de moi et je ne peux m'empêcher d'afficher un rictus moqueur quand il me tend sa main, que je n'attrape pas en retour. Je ne compte pas lui faciliter la tâche, donc j'espère qu'il est près à pagayer pendant longtemps.

Heureusement pour lui, Jean comprend rapidement que je ne serrerais pas sa main en retour, et remet sa main dans sa poche. Il est rapide à la déduction, c'est un bon point.

-Jean, Clarisse, Jules, je vous présente mon fils, Ethan.

La rousse et son frère me saluent d'un geste de la main de l'autre côté de la salle, tandis que Jean ne réagit pas, ayant bien compris que ça ne servait à rien. Ses deux gosses ont sûrement dit bonjour par politesse. Parce qu'à en voir l'expression quelque peu dégoûter de Clarisse en voyant les moisissures aux murs, je comprends facilement qu'elle et son frère préféreraient passer la soirée chez eux. Et en vrai, je les comprends. J'aurais fait ça si ce n'était pas chez moi.

Mais j'ai promis à ma mère de les rencontrer. Donc, je vais les rencontrer.

Nous nous installons à table, ma mère et moi d'un côté, les trois de l'autre. J'ai préparé cette après-midi, en m'ennuyant en cours d'histoire, tout un tas de question pour ce charmant Jean. Peut-être que ses gosses y passeront aussi.

-Alors, Ethan. Qu'est-ce que tu fais dans ta vie ? T'es encore au lycée, c'est ça ?

-Je suis en Terminal.

-Oh... Le bac à la fin de l'année ! Ça va les cours, tu gères ?

-Non.

Des réponses courtes. Précise. Pour bien qu'il comprenne que je ne veux pas de lui dans ma vie.

-Et tu sais ce que tu veux faire plus tard ?

-Je suis chez moi ou dans le bureau d'une putain de conseillère d'orientation, bordel !?

Ma mère pose sa main sur mon genou, sa demande silencieuse pour que je me calme. Jean comprend qu'il n'utilise pas la bonne technique et commence à discuter avec ma mère. La rousse participe à la conversation des deux adultes tandis que le brun me fixe comme ci je n'étais qu'un vulgaire objet de vitrine.

Son regard azur, fixé sur moi, me déstabilise. Mais je ne le montre pas. En revanche, je lui montre bien mon agacement. Puis, quand je constate qu'il ne capte pas mes signaux, je me mets à le fixer aussi. Mon regard est froid, glacial même, dur. Je n'ai pas des yeux d'une couleur incroyable, mais l'air glaciale qu'ils dégagent impressionne facilement. Et bingo, le brun ne tient même pas trente secondes avant de détourner les yeux.

Faible.

Quand ma mère se lève de table pour aller étendre le four qui annonce la fin de cuisson de la dinde, je me redresse de ma chaise, pose mon regard sur Jean et annonce, d'une voix forte et claire :

-Alors, Jean. Dis-moi tout. Qu'est-ce que tu lui veux, à ma mère ?

Jean fait les gros yeux, ses deux morpions affichent des mines horrifiées, comme-ci je venais d'offrir mon âme au diable devant eux. Bah quoi ? Ils ne s'attendaient toute de même pas à ce que je les laisse rentrer aussi facilement dans ma vie et dans celle de ma mère, si ? C'est mignon, la naïveté, quand même...

Ma question déstabilise Jean, et c'est bien le but. Je veux le pousser à bout. Et peut-être que là, s'il n'a pas agi de trop comme de la merde, il aura une place dans nos vies. Mais ça, ce n'est pas encore sûr. Je pourrais changer d'opinion entre temps, vous voyez. Je ne sais pas. On verra en fonction de mon humeur...

-Je...euh...je ne sais pas quoi te répondre, Ethan..., bafouille Jean

-Ah oui ?

Jean se la joue victime et petit être fragile. Mais il ne se doute pas une seule seconde de ce qui l'attend... J'ai toujours une carte dans ma manche. Et là, ma carte, c'est un As.

Je suis du genre à m'en battre les couilles de tout, c'est un secret pour personne. Mais je suis du genre agent secret du FBI quand il est question de protéger ma mère et ses fréquentations. Je n'ai pas été foutu de la protéger de mon père, je dois la protéger du reste du monde. Et ceux, qu'importe la personne ou à quel point ma mère y est attaché. Elle a assez souffert.

-J'ai pourtant cru comprendre que tu avais divorcé quatre fois, qu'aucun de tes mariages n'a durée plus de trois ans et qu'à chaque fois, tu étais celui qui demandait le divorce. C'est quoi, le truc ? Tu te lasses vite ? T'aimes bien t'amuser avec les femmes ?

Jean ne répond rien. Un sourire mauvais prend place sur mes lèvres.

Échec et mate, l'intrus.

BROKENOù les histoires vivent. Découvrez maintenant