Renarde et flocon de neige

Chapitre 9

Point de vue de Lou

Ça fait maintenant trois mois que les cours ont commencé, nous sommes en décembre. Les vacances de Noël ne vont pas tarder mais sa complice tarde à faire pleuvoir ses flocons. J'attends la neige avec impatience.

De son côté notre invitée, « la rouquine » comme l'appelle Adam, s'est très bien intégrée. Elle est devenue un membre à part entière de notre groupe. Tout le monde a l'air de l'apprécier. Néanmoins j'ai toujours cette question qui me trotte dans la tête depuis le jour où Violette s'est accrochée avec notre professeur de philosophie. Je ne voulais pas la questionner ; je ne la connaissais pas encore assez pour me permettre de le faire.

J'ai prévu de lui parler ce soir à la bibliothèque. Elle m'y accompagne à chacun de mes passages. La lecture semble avoir fini par sérieusement la charmer elle aussi.

Ça y est, c'est la fin du cours de philosophie du vendredi qui reste une torture pour notre enseignant comme pour Violette. Je ne change pas mes habitudes et me rends à la bibliothèque avec ma rousse favorite sur les talons. Je repose le livre que j'avais emprunté et en prend un nouveau. Violette, quant à elle, est toujours dans la lecture de son dernier bouquin. Je m'installe sur la chaise en face de la sienne et comme à chaque fois, pas un seul mot ne sort de nos bouches. Mes yeux n'arrêtent pas de faire des allers-retours entre les lignes du livre et Violette.

— Qu'est-ce qu'il y a ? me questionne-t-elle en me regardant l'air soucieuse.

— Qu... Quoi ? M... Mais rien voyons... Tout va bien, bégayé-je en cherchant une justification.

— T'es sûre ?

— Oui, oui. Ne t'inquiète pas.

— D'accord, si tu le dis.

Elle finit par lâcher l'affaire, se replongeant dans sa lecture. Je suis vraiment au fond du gouffre là. En être réduite à devoir lui mentir... Ce qui est tout à fait logique si l'on est un tant soit peu rationnel. Ce que je ne suis visiblement pas.

— Si... En fait il y a bien quelque chose...

Elle pose immédiatement son livre sur la table, rapproche sa chaise de la mienne dans un vacarme affreux et attrape l'une de mes mains. Ce qu'elle fait désormais assez souvent quand elle remarque que quelque chose me perturbe. Je commence à connaitre toutes ses habitudes même si cela ne fait que peu de temps que j'ai fait sa connaissance. C'est devenu habituel mais ça ne m'empêche pas de rougir à chaque fois que je sens sa peau au contact de la mienne.

— Dis-moi tout, m'intime la rousse.

— Eh bien, tu vois la fois où tu t'es disputée avec Valery ?

Elle attend que je poursuive en m'interrogeant du regard mais j'hésite.

— Dis-moi Violette...

— Oui ?

— Qu'est-ce qu'il s'est passé entre toi et Valery ?

Elle prend un air grave et se redresse sur la chaise proche de la mienne.

— Je ne suis pas sûre d'avoir envie d'en parler ou que tu veuilles vraiment entendre ça.

— Tu peux y aller ne t'inquiète pas, lui assuré-je.

— Je suis sérieuse Lou.

Un silence de quelques secondes s'écoule durant lequel je ne la lâche pas des yeux, définitivement déterminée à écouter son histoire.

— Il t'a appelée par un surnom étrange... Et je me demandais pourquoi tu avais réagi de cette façon quand il t'a traité de fuyarde ?

Son air enfantin se mue en un regard dur et sévère qui me fait frissonner. Je sens son corps se crisper et les muscles de sa mâchoire se contracter instantanément.