⚜ Chapitre 17 : Palais mortel ⚜

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Paris, mois de juin

Céleste

Aux côtés de Constance et de plusieurs lavandières, je nettoyai un des draps blanc de la garnison, mais un mouvement trop brusque me le fit déchirer. Je jurai dans ma barbe et plongeant mon poing dans l'eau fumante du lavoir. J'entendis Constance rire, mais moi je n'avais pas le cœur à cela. Deux semaines... Deux semaines depuis notre sortie chez le père Simon, et il ne s'était passé depuis... Rien. Absolument rien : Tréville et les mousquetaires ne trouvaient rien sur l'Ange de la Mort, la trace en forme de « G » que j'avais trouvé ne servait à rien, et la boutique du père Simon avait été vidée de ses poisons et désertée. Aucune nouvelle officiellement de Milady non plus, mais je savais qu'elle faisait équipe avec Alec et qu'ils cherchaient de toute leurs force des indices. Qu'ils ne trouvaient pas. J'enrageai. Et mes menstrues n'arrangeaient rien, j'étais à fleur de peau.

Une seule bonne nouvelle dans ces périodes creuses : le Dauphin avait survécut. Un jour d'après-dîner, la reine s'était soudain redressée, portant une main à son ventre. « Il a bougé, il a bougé ! » s'était-elle écriée d'une voix aiguë, presque hystérique. Nous avions tous été soulagés par cela, du capitaine de Tréville au Cardinal, en passant par Constance, moi et les mousquetaires, particulièrement Aramis, qui s'était rendu à la cathédrale pour y faire une prière en l'honneur du Créateur.

Me tirant de mes souvenirs, Constance vint à mes côtés, et me prit les mains pour m'apprendre comment laver le linge sans le déchirer. Mais je me défis de son étreinte et me relevai.

- Je ne suis pas douée pour ça, me justifiai-je.

- Elle n'a pas tort, se moqua une lavandière en passant près de nous.

Je la foudroyai du regard, mais elle ne le vit pas, trop occupée à faire son travail.

- Est-ce que ça te dérange si je rentre au palais ? demandai-je à mon amie.

Je vis la déception passer dans les yeux de Constance. Désespérée par mon mutisme de ces derniers jours, elle m'avait encouragé à sortir, et m'avait invité à rendre visite aux lavandières de l'hôtel des mousquetaires.

- Tu es sûre ? me demanda-t-elle.

- Si les cadets ne veulent pas se retrouver avec des draps déchirés, il vaut mieux, grimaçai-je. Désolée.

Constance secoua la tête.

- Ce n'est rien, vas-y...

Je saluai les lavandières et pris la poudre d'escampette. Je marchai rapidement jusqu'au palais, perdue dans mes sombres pensées, échafaudant des plans pour trouver des indices. Pourquoi ne pas fouiller la chambre de Charlotte ? J'y avais déjà pensé, mais je n'avais jamais trouvé l'occasion. Peut-être qu'il serait effectivement temps de mettre cette idée à exécution...

Je montai les marches quatre à quatre, maudissant Constance pour m'avoir obligé à mettre une grosse robe vert mousse qui me donnait encore une fois l'impression d'être énorme. D'un pas rapide, je rentrai dans le palais, puis ralliai les appartements de la reine. J'y croisai Louise, qui se dirigeait vers les jardins. En me voyant, elle afficha une mine positivement surprise.

- Oh, Colombe ! fit-elle en souriant. Je pensais que vous étiez avec Madame Bonacieux...

Je pris sur moi pour lui faire un sourire à mon tour :

- Constance a essayé de m'apprendre à laver des draps, mais j'ai vite abandonné...

- C'est sûr que ce n'est pas une activité pour une femme de votre rang, acquiesça Louise en hochant doucement la tête.

L'Espionne du Cardinal - Livre IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant