Cours particuliers - Livaï & Mikasa

Chapitre 2 - premier cours

Le lendemain, le major Erwin, se dirigeant vers le caporal-chef, ne put s'empêcher de remarquer un air presque serein sur son visage. Il n'était pas sûr de l'avoir déjà vu comme ça.

"Bonjour Livaï, tu as l'air... reposé."

Ça se voyait tant que ça ? se demanda Livaï. Il reprit rapidement son air détaché habituel.

"C'est vrai que j'ai mieux dormi que d'habitude."

"J'aimerais que tu entraînes Mikasa. Cours particuliers tous les soirs. C'est notre meilleur élément et il ne manque plus grand-chose pour qu'elle atteigne ton niveau."

Il devenait à présent difficile pour Livaï de conserver son air détaché. Après leur discussion d'hier soir, il ne voulait pas avoir affaire à elle à nouveau, du moins pas tout de suite. Comment était-il censé faire preuve d'autorité avec elle maintenant qu'il s'était montré vulnérable ? Et qu'est-ce que c'était que cette histoire d'atteindre son niveau ? Son ego en avait pris un coup mais il peinait à trouver une excuse valable pour refuser.

"Pff, quelle idée... C'est un bon élément mais elle est trop impulsive et indisciplinée."

"Justement, j'aimerais que tu l'aides à se canaliser, à prendre du recul. Tu es l'exemple idéal."

Livaï poussa un soupir de mécontentement mais il sentit bien qu'il n'avait pas trop le choix.

"Je vais essayer mais je pense que ça ne tiendra pas longtemps."

"Ce sera déjà bien. Merci Livaï."

Il fallait maintenant que Livaï trouve Mikasa pour le lui annoncer. Il l'aperçut au loin avec ses amis mais il préférait attendre qu'elle soit seule pour en discuter. Il s'approcha dans sa direction quand il la vit quitter le groupe.

"Mikasa..." dit-il d'un ton rauque qu'il essayait de rendre autoritaire.

Elle se retourna, surprise. Elle ne s'attendait pas à le revoir si rapidement. Est-ce qu'il voulait reparler de leur discussion d'hier soir ? Elle remarqua que malgré son air indifférent chronique, son expression était un peu différente de d'habitude. Il ne put s'empêcher de remarquer qu'elle avait aussi un air plus serein que la veille. Cette conversation aurait donc eu un effet sur elle aussi ?

"Erwin veut que tu t'entraînes plus. Rendez-vous ce soir à 18h au terrain d'entraînement."

Elle n'eut pas le temps de réagir, il avait déjà continué son chemin. Elle passa donc la journée à se demander sur quoi elle allait bien pouvoir travailler et avec qui. Elle n'avait pas envie de se retrouver à nouveau seule avec lui après leur échange un peu embarrassant d'hier soir. Non, ce devait être une session en petit comité avec d'autres soldats et Erwin au commandement.

Quelle ne fut pas sa surprise en arrivant le soir et en trouvant Livaï seul sur le terrain. C'était donc bien ce qu'elle redoutait : un cours particulier. En la voyant arriver, il lui fit un signe de tête mais il ne savait pas par où commencer. Elle était déjà très douée et il ne voyait pas trop ce qu'il pouvait lui apprendre à part à être plus disciplinée. Comme il ne disait rien, c'est elle qui prit la parole :

"On attend d'autres personnes ? Le major ne va pas participer ?"

"Non. Ça te pose un problème ?"

Pourquoi faut-il toujours que je sois sur la défensive ? Il regretta immédiatement.

"Non... Je me demande juste sur quoi on peut travailler..."

Je me demande aussi... Mais je ne peux pas lui dire ça évidemment.

"Sur quoi penses-tu devoir travailler ?"

Il lui laissait la porte ouverte ?

"Ma gestion des émotions," dit-elle spontanément alors qu'elle le regrettait déjà.

Livaï eut un petit ricanement moqueur mais se dit qu'elle était plutôt lucide et perspicace.

"Effectivement, et par conséquent ton analyse des situations critiques et ton obéissance aux ordres," dit-il sur un ton un peu arrogant.

Ce n'est pas parce qu'il lui avait un peu raconté sa vie hier soir qu'il fallait qu'elle oublie qu'il était son supérieur. A ce moment, ils repensèrent tous les deux à leur attaque sur le titan féminin, quand il lui sauva la mise mais qu'il se blessa ensuite parce qu'elle n'avait pas fait ce qu'il demandait. Habituellement, il aurait remué le couteau dans la plaie et fait culpabiliser son soldat mais pas aujourd'hui. Bon sang, elle avait vraiment réussi à le ramollir avec leur discussion d'hier soir. En réalité ce n'était pas la première fois qu'il la traitait différemment : après s'être blessé à cause d'elle il lui avait dit que ce n'était rien alors qu'il aurait pesté contre n'importe qui d'autre. Pour quelle raison, il n'en était pas sûr, mais cela devait cesser. Mikasa repensa aussi à cette fois où il dut la retenir pour ne pas qu'elle s'élance après Annie qui avait enlevé Eren et se sentit honteuse. Mais il ne pouvait pas comprendre sa relation avec Eren. Pour sortir de cette gêne et le remettre un peu à sa place, elle lança sur un ton de défi :

"Peut-être, mais je ne vois pas comment travailler ça là maintenant. Du combat rapproché serait plus utile."

Toujours frapper puis réfléchir après... en même temps je n'ai pas envie de polémiquer pour le moment, pensa-t-il.

Il se rapprocha d'elle et tous deux se mirent en position pour s'affronter à mains nues. Elle semblait avoir vraiment gagné en rapidité au fil du temps car elle parvenait à éviter tous ses coups. Il faillit même se faire surprendre par l'une de ses attaques mais réussit à bloquer son bras dans son dos. Alors qu'ils étaient l'un contre l'autre, il pouvait distinguer chaque détail de son corps : sa musculature, ses formes, sa respiration. Pourtant ce n'était pas la première fois qu'elle était si proche ; il se rappelait très bien de l'avoir attrapée lors de la poursuite du titan féminin et plus tard pour l'empêcher de partir sauver Eren. Mais cette fois, son ressenti était différent des moments passés mais aussi de ses interactions avec d'autres personnes. Il sentit comme un besoin pressant de lâcher Mikasa, comme s'il avait peur qu'elle le brûle irrémédiablement, mais en même temps il se sentait happé par ce qui émanait d'elle - son odeur, sa chaleur.

De son côté, elle ne pouvait s'empêcher de penser que même si elle était contrainte, elle se sentait comme en sécurité contre lui, comme lors de ces deux fois où il l'avait secourue. La situation devenait tout de même gênante et elle commençait à regretter cette suggestion du combat rapproché. C'est alors que, sentant qu'elle ne réagissait pas à son blocage, il relâcha progressivement son étreinte. Elle se retourna alors et aperçut une lueur tout à fait nouvelle dans son regard, sans arriver à déterminer de quoi il s'agissait. Se sentant comme pris sur le fait, il détourna le regard et dit sur un de ces tons désabusés qui étaient sa spécialité :

"J'espère pour toi que tu réagiras plus que ça la prochaine fois que tu croises un ennemi."

"J'analysais la situation comme vous me l'avez demandé. Vous ne m'avez pas laissé le temps de riposter."

Décidément, elle a de la répartie. Il tenta de dissimuler son air amusé. Puis il se rendit compte qu'elle l'avait à nouveau déstabilisé. Et comme la veille, il voulut y couper court.

"Je pense que ça ira pour aujourd'hui. Nous reprendrons demain."

Elle ne s'attendait pas à ça mais cela l'arrangeait car elle ne voyait pas vraiment non plus où cela pouvait mener. Mais c'était le deuxième soir de suite qu'il interrompait leur échange un peu brutalement et cela la contrariait un peu, sans trop savoir pourquoi.