» chapitre vingt-et-un.

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"- C'est vrai ça, je n'ai jamais vu ton père."

Felix sourit avant de répondre au brun devant lui.

"- C'est normal, il est décédé il y a six mois."

Changbin écarquille les yeux et plaque une main sur sa bouche. Felix continue de lui sourire.

"- J-Je suis désolé d'avoir dit ça, je savais pas...

- C'est pas grave, je sais que tu ne savais pas.

- Pardon pardon pardon-"

Felix pose son doigt sur la bouche de Changbin et lui adresse un clin d'œil avant de prendre ses mains.

"- T'es sûr de vouloir m'en parler ? Tu sais, je ne t'oblige pas..."

Changbin tient les petites mains de Felix dans les siennes. Ils se regardent fixement et Felix sourit.

"- Oui, je me sens prêt. Je te fais confiance maintenant."

Changbin esquisse à son tour un sourire et pose une main sur la joue de son cadet. Celui-ci rougit doucement, puis il prend la parole.

"- Mon père était propriétaire d'un petit café du quartier, qui a fermé depuis. Il avait pour habitude de m'y emmener quand je n'avais pas école. Il était mon modèle, j'étais son idole. Felix a des étoiles dans les yeux. J'ai eu une période de ma vie ou j'étais renfermé, dans mon coin, et je n'accompagnais plus mon père au travail. Remarque, j'étais au lycée donc je n'avais plus vraiment le temps non plus. Même dans cette période, il arrivait à me faire sourire. C'était le don qu'il avait et qui me manque le plus."

Changbin écoute attentivement chaque mot que prononce Felix, happé par l'histoire. Il ne pourrait en rien l'interpeller, il ne veut que l'écouter et comprendre.

"- C'était un samedi, à la fermeture du café. Je n'avais pas accompagné mon père ce jour là, il avait été seul toute la journée. Je m'étais dit qu'il aurait sûrement aimé que je vienne en surprise avec de quoi manger, parce qu'à ce moment là ma mère travaillait énormément et surtout la nuit. Donc elle commençait dans les alentours de dix-neuf heures. Changbin hoche la tête. Je me suis approché du café, c'était très calme à l'extérieur. Ce qui n'était pas vraiment normal vu la rue commerçante dans laquelle s'était installé mon père. Je suis entré et des dizaines de personnes grouillaient dans la salle, au même endroit. Et j'ai su."

Les yeux du plus jeune s'embuent peu à peu. Changbin continue de tenir ses mains et s'approche de lui pour passer une main dans son dos. Felix sourit et continue de parler.

"- Je me suis approché des gens qui m'ont laissé passer. Certains murmuraient, d'autres étaient toujours penchés sur..."

Les larmes coulent peu à peu sur le visage du roux. Changbin le prend dans ses bras et le berce doucement.

"- Il-Il était juste étendu par terre, il n'y avait pas de traces de luttes s-sur les parties de son corps apparentes...et son visage n'indiquait au-aucune souffrance. Je me souviens avoir hurlé « papa », son prénom aussi. Les gens n'en revenaient pas, ils essayaient de me faire sortir du café. J-Je ne voulais pas. Je voulais y croire..."

Changbin caresse doucement le dos du roux qui pleure maintenant à chaudes larmes. Depuis le décès de son géniteur, il n'en a pas parlé. Ni à sa mère, ni à ses proches. Il a refoulé pour ne plus y penser, mais il sait très bien que c'était une mauvaise idée.
S'ouvrir à Changbin lui fait du bien. Depuis six mois, il n'a pas dit mot sur le drame qui a foudroyé sa famille. Ce n'était pas par manque de confiance aux autres, mais plutôt par manque de confiance en lui. Il avait eu peur de se libérer de ce poids en balançant tout ce qui lui pesait sur le coeur, car il ne voulait pas céder à sa faiblesse : pleurer. Il détestait pleurer, surtout en présence des autres. Il avait honte de son visage inondé de larmes, de ses mains tremblantes et de sa voix fébrile et cassante.
Le noiraud entoure son cadet de ses bras mais ne le serre pas trop pour qu'il puisse continuer à lui parler. Il reprend d'ailleurs :

★ GRENADINEWhere stories live. Discover now