Chapitre 33 - Anna

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Je bouillonnais. C'était à la fois terriblement satisfaisant et terriblement frustrant de pouvoir suivre une conversation qui vous concernait sans que les antagonistes ne soient au courant.

— Je ne comprends pas ce que tu veux dire, affirma Mme Rosenberg, visiblement confuse.

— Anna Gates était ma voisine, avant l'Epidémie. Elle était sûrement bien trop jeune pour s'en souvenir. Je l'ai vue grandir, et disons qu'elle était une enfant assez spéciale.

Effectivement, je ne m'en souvenais pas.

— C'est-à-dire ?

— Un jour, elle apprenait à faire du vélo sans les petites roues. Je la regardais par la fenêtre, se dandiner sur son vélo de manière tout à fait... excitante.

Beurk ! En plus de tout ça, Decker était un pédophile notoire. J'avais envie de lui envoyer une bonne droite, mais me retins de toutes mes forces, curieuse d'apprendre la suite de son récit.

— La petite est tombée sur le bitume et s'est sévèrement entaillé les genoux, du sang coulait le long de ses jambes. Elle est partie en pleurant retrouver ses parents en passant par le jardin dont la pelouse était sèche comme un désert, répandant du sang sur le gazon.

Ce fut Mme Rosenberg qui poursuivit, les yeux brillants :

— Et là où était tombé le sang, l'herbe était redevenue verte.

— Exactement.

— Fascinant.

C'était donc de là, que je tenais mes affreuses cicatrices sur les genoux. Mais cela n'expliquait pas la suite. Pourquoi moi ?

Mais ils remontèrent les marches en discutant de mes aptitudes et refermèrent la porte à clé derrière eux, nous coinçant ainsi à l'intérieur, la lumière éteinte.

Hades partit la rallumer et nous commençâmes à parler de ce qu'il venait de se dire.

Wanka s'exclama :

— C'est dans la boite !

Avec son portable dans les mains et un sourire radieux, il rejoua la vidéo depuis le début.

J'étais répugnée et en colère. Mais aussi dans l'incompréhension. Moi ? Une figure de la Résistance ? Mais dans quel but ? J'avais juste été spontanée et crié la première chose qui m'était passé par la tête. J'étais loin d'avoir les épaules pour être le pilier de quoique ce soit. La vie m'avait certes endurcie, mais surtout brisée. Je ne me sentais pas à la hauteur. Et puis cette phrase n'avait rien de spécial. "Voilà qui ils sont". Cela ne voulait rien dire, cela venait juste du cœur. C'était peut-être pour ma spontanéité que les gens avaient apprécié.

Avec ma force surhumaine et la colère pour la décupler, j'enfonçai la porte du sous sol qui céda dans un vacarme assourdissant et retomba lourdement sur le sol. Nous étions toujours invisibles et nous dirigeâmes alors vers la maison de Decker. Il nous fallait des aveux.

Mme Rosenberg était partie, et il était seul chez lui. Les gardes n'avaient pas été difficiles à neutraliser, et étaient partis en fumée grâce à Ash lorsque nous pénétrâmes à l'intérieur de la luxueuse villa.

Un tourne disque diffusait une musique classique très connue, même des centaines d'années après. Monsieur était devant la glace, en train de se raser lorsque l'un d'entre nous renversa un vase - apparemment cher - sur le sol qui se brisa en mille morceaux. Decker se coupa la joue sous le coup de la surprise, et le sang se mit à perler le long de son visage. Il l'essuya lentement avec une serviette blanche qui se tâcha de sang, et clama à voix haute :

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