Chapitre 9

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Le diner est agréable, Lukas, Cléo et Mélya sont attablés avec moi. Ils m'apprennent qu'en plus d'être apparemment immortelle, je devais surement être la fiancée d'un démon d'après les rumeurs. Ce qui nous fait bien rire. Mélya m'informe qu'Eryk fait partie de la garde du palais, mais qu'il préfère loger au camp plutôt qu'au château. Il souhaite créer une barrière entre vie privée et travail. Rester sur place lui donnerait l'impression de ne jamais quitter son poste. Ses supérieurs ont accepté sa requête parce qu'il y a déjà énormément de gardes sur place. De plus Eryk à des aptitudes assez impressionnantes donc ça a joué en sa faveur quand il a fait sa demande. Je me montre curieuse et me renseigne sur leurs natures. Lukas m'explique que le pouvoir principal d'Eryk est de charmer ses victimes. Sa magie se manifeste par une volupté orange qui s'enroule autour de ses proies, elles en oublient ce qu'elles voulaient faire et sont hypnotisées par lui. Je comprends mieux l'aura de sensualité qu'il dégage. Alors je m'intéresse aux autres. Le pouvoir de Cléo se rapproche de la lumière du soleil, elle peut guérir, mais bruler également. Lukas compte bien explorer plus en profondeur ses aptitudes, il pense que son pouvoir sera basé sur la nature parce qu'il peut déjà faire pousser des arbustes. Mélya est restée très vague, d'après ce que j'ai compris on n'arrive pas à déterminer l'étendue de son pouvoir et elle ne préfère pas en parler. Je la trouve très mystérieuse.

Alors que Mélya est tournée vers moi, je surprends Lukas en admiration devant cette dernière. Si j'avais des doutes, à présent je suis presque sûre qu'il aime bien la jeune femme alors qu'elle le regarde à peine. Cléo parlait à Lukas à ce moment précis et a remarqué son manège, elle en profite pour lui donner un coup de coude dans les côtes. Cependant, son rappel à l'ordre ne change rien, alors elle me regarde en levant les yeux au ciel et en levant les bras vers le ciel. Elle en sait plus que moi et me le fait comprendre par deux haussements rapides des sourcils et un petit sourire en coin.

Je demande à mes amis s'ils ont une idée de l'entrainement que je devrais subir ce soir. Comme j'aurais dû m'en douter, Éros est imprévisible. Cléo pense à ajouter que "ça donne du piment...". Je fais comme si je ne voyais pas où elle veut en venir, c'est pourquoi elle décide de me convaincre que les surprises sont agréables, sinon on tombe dans la monotonie. Le diner se termine sur des sujets légers, on rit pas mal surtout quand Lukas bafouille pour parler à Mélya. Cléo m'a fait quelques regards complices comme si l'on partageait un secret à présent.


Après le repas je passe par ma chambre pour me rafraichir le visage et prendre mes armes, cette fois je prends mes trois poignards et mon épée, je ne me ferais pas prendre a deux fois par un coup bas. Par la fenêtre je regarde l'horizon, le soleil continue lentement sa descente vers le ciel. Nous ne sommes pas encore au crépuscule alors je décide qu'une promenade me fera le plus grand bien. Ça ne fait qu'une journée que je suis ici et j'ai l'impression que ça fait déjà des jours.

Je sors du bâtiment et décide d'aller sur l'allée de gravier donc je prends droite du camp pour aller vers le palais que je n'ai pas encore eu l'occasion de voir, j'aurais le temps de faire un aller-retour en prenant mon temps si Lukas ne m'a pas menti sur les cinq minutes de marche entre le camp et le palais. Je croise quelques animaux sur le chemin. Le ciel commence à prendre des teintes rosées qui embellissent la forêt. Au fur et à mesure, le soleil décline et de plus en plus d'ombres apparaissent autour de moi, je repense au Senka, mais je ne sens aucune présence autour de moi, personne ne m'observe.

Finalement, les arbres se parsèment jusqu'à ce que j'arrive face au palais. Il doit se trouver à une centaine de mètres. Il est imposant, mais très élégant, fait de briques crème. L'allée de gravier se poursuit jusqu'à l'entrée, en face de laquelle se trouve une fontaine qu'il faut contourner pour monter la dizaine de marches qui donnent sur le porche. Je ne m'approche pas plus et décide d'observer de loin. Les jardins sont à se damner. Il y a quelques points d'eau qui se rejoignent par des cascades sur la droite du château. Ils sont entourés d'arbres, dont un saule pleureur qui doit offrir une intimité et une fraicheur appréciable en été. À la gauche du chemin sont dispersés des millions de buissons fleuris, de fleurs et d'arbres fruitiers qui sont placés et taillés astucieusement avec des formes irrégulières. La meilleure description serait un désordre ordonné. De petites lueurs bleutées apparaissent avec l'arrivée de l'obscurité, on dirait des lucioles, je suis hypnotisée. J'aperçois une jeune femme assise sur un banc en pierre entre deux arbres, elle ne m'a pas remarqué donc je recule afin de me cacher derrière des arbustes. Elle a la peau très pale et un air innocent. Ses cheveux contrastent avec la blancheur de son visage, ils sont noirs de jais. Ce qui m'attire le plus dans cette vision, ce sont les aptitudes qu'elle déploie, des filets de brumes rose et noir volètent autour d'elle. On dirait des tentacules qui cherchent quelque chose. Elle reste assise comme si ça ne lui demandait aucun effort. La porte du porche s'ouvre, je tourne alors la tête vers la personne qui en sort, c'est Éros. J'ai encore du mal à me dire que c'est le prince. Il descend les marches et les tentacules s'enroulent autour de lui. Il se dirige vers la jeune femme, je vois ses lèvres bouger, mais je n'entends rien. Les tentacules s'éloignent et disparaissent, la femme se lève et dit quelque chose à son tour. J'ai l'impression que je ne devrais pas assister à cette scène, pourtant je n'arrive pas à détacher le regard. Ils parlent encore quelques minutes puis la jeune femme se jette sur le jeune homme et l'embrasse à pleine bouche. J'écarquille les yeux et je rends compte que je fais du voyeurisme, c'est pourquoi je recule lentement vers la forêt, son obscurité me rassure en me recouvre bientôt complètement. Je ne suis plus à vue et au moment où je m'apprête à me retourner une branche craque, Éros met fin au baiser en posant ses deux mains sur les bras de la jeune femme et il regarde dans ma direction. Je suis pétrifiée, mais il ne me voit pas, il a dû entendre cette satanée branche. La jeune femme réclame l'attention de son prince, il la regarde à nouveau, je fuis en direction du camp.

Le Joyau de NostrariaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant