VIII

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Pourquoi j'ai accepté de venir, je déteste le sable !

Manjiro n'a pas l'air plus dérangé que ça, en même temps, c'est pas comme s'il avait déjà semblé dérangé par quelque chose d'autre que la présence de Sanzu dans son champ de vision

Il se tient appuyé contre sa moto, observant la mer en silence, je me suis assise dans le sable, à quelques mètres de lui, les yeux rivés sur l'horizon

Plus le soleil disparaît plus je me sens bizarre, ici, rien a changé, comme si Baji n'étais jamais mort et qu'on avait continué de venir mais Baji n'est plus là, et la chose qui me terrifie le plus arrive, je l'oublie, son visage devient moins précis, sa voix à disparu de ma mémoire et ses baisers salés par la mer ne semble être plus que les fantasmes d'une collégienne en manque d'amour. À la place, il y a Manjiro, Manjiro que je repousse autant que je le laisse m'approcher, Manjiro et ses baisers sucré semblable à la caresse du vent.

- Sen ? Ça va ? On peut rentrer si tu veux

Je sors de mes pensées, levant les yeux vers le jeune homme en remarquant au passage que le soleil avait maintenant disparu

- Je ne veux pas m'attacher une nouvelle fois. Je réponds simplement, retournant mon attention sur l'océan

Il vient s'asseoir à côté de moi

- Les robes te vont bien, tu devrais en mettre plus souvent

Je jette un coup d'œil rapide à ma tenue, une petite robe marron pale que m'avais offert ma mère sous prétexte que je ne suis pas assez féminine

- Il fait juste trop chaud pour mettre un jogging... et puis j'ai un short en dessous

Un silence s'installe, quelques secondes seulement puisque rapidement il reprend

- L'un de mes meilleurs amis est mort le jour d'halloween

Je me fige, mes muscles se crispant d'un coup et je murmure

- Le 31 octobre 2005... ?

Il se tourne vers moi alors que je reprends

- Baji Keisuke, long cheveux noirs, yeux marrons

- Du genre à brûler des voitures quand il a faim et à faire vingts fautes d'orthographe par mots

Je reste muette, sous le choc

- Alors c'est toi, la fille pour qui il disparaissait presque tous les soirs

J'attire mes jambes contre ma poitrine, mordant mon pouce en sentant l'anxiété monter presque aussi vite que mes larmes

- C'est pour toi et ton putain de gang qu'il est mort. Je murmure d'une voix légèrement tremblante

Il allait répondre, mais je me lève, retirant rapidement le sable de ma robe et récupérant mes chaussures en reprenant

- Ramène-moi chez moi

- Sen

- Ramène-moi Mikey !

J'ai crié. Il se fige, puis, silencieusement, me ramène.

Ce n'est qu'au moment où je retire mon casque qu'il murmure

- C'est pas s'qui devait se passer... je voulais juste traîner avec des gens forts

- Baji n'était pas assez fort pour toi ?

Il met plusieurs secondes à répondre

- Il était mon meilleur ami

- Il était mon seul ami

Je lui colle le casque dans les mains et tourne les talons. Il ne cherche pas à me retenir, me faisant silencieusement comprendre que, comparé à ce que je pensais, je ne suis pas si importante que ça pour lui.

Arrivé dans mon appart, je me réfugie dans la salle de bain, fondant en larme pendant que mes idées noires ricochent contre les murs blancs.

J'ai envie de faire disparaître cette fille dans le reflet, pleurant, pitoyable face à sa propre bêtise, face à son égoïsme.

Elle est si faible, si détestable, si brisé.

Je veux crier, lui hurler dessus qu'elle n'est rien qu'une gamine inutile, la faire disparaître même si pour ça il faut que je me brise la voix

Et, alors que mes larmes cessent lentement de brouiller ma vue, je fais juste face à une fille qui fait de son mieux malgré tout.

Je me fais face, à moi, et à ma douleur.

Je sèche mes larmes et serre les poings. Je vais m'en sortir, je m'en sors toujours, après tout, je suis un monstre et les monstres ne pleurent pas

𝒟ℯ𝒶𝒹 ℳ𝒶𝓃Where stories live. Discover now