33 - Le gâteau d'anniversaire

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JUILLET 2019


Les séances avec le docteur Solomons étaient éprouvantes mais avaient le mérite de me faire du bien. Enfin, je comprenais le bordel dans ma tête. C'était comme si toutes les pièces s'emboîtaient. J'avais la même sensation qu'à la fin d'un roman d'Agatha Christie, quand je comprends enfin tous les éléments, tous les indices et que je devine enfin qui est le tueur. Chaque détail relevé pendant la lecture fait enfin sens et permet d'éclairer le résultat final. C'était pareil pour moi. Je comprenais chacune de mes réactions, de mes peurs et elles s'inscrivaient dans un tout. J'étais terrifiée à l'idée de retomber amoureuse parce que je n'arrivais pas à concevoir l'amour autrement qu'avec mon ex. Je ne savais pas faire. Je n'avais aimé que lui. Faux ! aurait dit le docteur Solomons avant d'ajouter: vous n'avez voulu aimer que lui ! La peur de l'abandon et de la solitude gagnait toujours dans mon cerveau. Et dès que je pouvais peut-être envisager d'ouvrir un peu plus mon cœur, mon cerveau reprenait le dessus et je tuais cette possibilité dans l'œuf. Le docteur Solomons me faisait parler, m'emmenait vers les idées qu'il voulait que je dise pour que je me rende compte par moi-même que ces peurs étaient toxiques et infondées. Il me faisait dire qu'il y a toujours une part de risque dans l'amour. La souffrance fait aussi partie de l'amour et c'est d'ailleurs ça qui rendait l'amour si beau. Il n'y avait de raisons d'en avoir peur. 

Ce docteur m'épatait. Son nom faisait rire Sana et Olivia qui étaient en plein dans le visionnage de la série Peaky Blinders et qui s'imaginaient que mon psychologue était le fameux personnage Alfie Solomons. Toujours est-il qu'il n'avait rien d'un criminel juif mais que les séances avec lui étaient salvatrices pour moi. Enfin, j'avais compris et je pouvais avancer. Mais il restait un problème, je voulais avancer certes, mais c'était avec Julien que je voulais le faire. Malheureusement, ce dernier roucoulait toujours avec Alicia, sa copine, pour laquelle Sana n'avait toujours pas trouvé d'autre qualificatif que gentille.


Nous fêtions ce mois-ci les deux ans d'Omar. Sana et Ahmed avaient décidé d'organiser un déjeuner un dimanche pour tous nous réunir et partager ça avec eux. La relation entre eux était toujours aussi particulière. Ahmed donnait toujours la priorité à la musique mais son fils prenait de plus en plus de place dans sa vie. Sana était en colère de manière perpétuelle contre lui pour un oui ou pour un non mais quand il était là, elle ne disait rien.

David nous a donc reçu dans sa grande maison pour passer la journée ensemble et fêter l'anniversaire du petit. Nous étions tous de la partie: David et sa femme qui nous accueillaient, Sana et Ahmed forcément, Tonton, Papy qui semblait de plus en plus fatigué ces derniers temps, Olivia et moi, Nour qui revenait de voyage, Tito, Julien et sa copine. Sana m'avait demandé si ça me posait un problème qu'Alicia soit là. Bien qu'au fond de moi, bien sûr que ça me posait un énorme problème, j'ai affirmé que non, au contraire, j'avais hâte de la rencontrer. Qu'est-ce que je pouvais dire d'autres ? Julien était le parrain d'Omar et il avait le droit d'avoir une vie, et notamment amoureuse.


 T'en fais trop là meuf ! Avait dit Sana avec un air amusé. T'es pas crédible.


Le rendez-vous était fixé à 12h30 mais j'étais arrivée plus tôt pour aider Sana et Sabine pour les préparatifs. Tonton, David et Papy étaient déjà là mais ils buvaient un pastis sur la terrasse au soleil. Cela faisait râler Sabine. Nous avons installé une grande table sur la terrasse avec plusieurs parasols pour profiter de l'extérieur toute l'après-midi. Tout le monde est arrivé petit à petit. J'appréhendais l'arrivée de Julien, j'avais tellement peur qu'il lise sur mon visage mes regrets et ma jalousie naissante vis-à-vis de sa copine. J'étais en train de discuter avec Ahmed quand la sonnette de la porte d'entrée a retenti. Il ne manquait plus que Julien, le Big et Alicia. A coup sûr, ils allaient arriver ensemble et mon cœur a commencé à s'emballer. C'est à cet instant que mon téléphone s'est mit à vibrer dans la poche dans ma main. C'était mon grand-père.

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