1.2 - Frère

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— Tu as de l'eau ? grommelai-je en me redressant.

Sans attendre la réponse, j'attrapai ma masse de cheveux humides pour les décoller de ma nuque trempée. Ils tombaient jusqu'au bas du dos, fierté toute féminine typique de l'extrême sud : grand-mère Ayesse les avait encore jusqu'à la taille, bien que les siens soient désormais blancs comme le sel. J'entrepris de les tresser, mais j'étais lente, avec mes doigts gonflés de chaleur.

Quelques rayons de la lune rousse passaient par la fenêtre, posant un éclat gris sombre dans la pièce. Le rideau brun qui nous protégeait le jour du soleil avait été retiré et reposait sur l'unique chaise de Juter.

— Chut. Tu as entendu ? demanda mon frère dans un murmure.

Je ne remarquai pas sa tension, et grognai pour toute réponse. La nuit était suffocante, trop pour laisser mes longs cheveux lâchés. Mon ruban se révélait introuvable ; je le cherchais par terre, à tâtons, mes doigts sur les dalles rêches, alors que je tenais la fin de ma tresse de l'autre main.

— Vaelle ! Réponds-moi.

— Entendu quoi ? demandai-je tout haut. Tu as vu mon ruban ?

— Moins fort !

Mon frère se leva dans un ensemble de mouvements secs et hésitants. Je me tendis. Malgré la brume du sommeil et du vin, je commençai à comprendre que quelque chose n'allait pas.

— Juter, que se passe-t-il ? chuchotai-je.

— Écoute, je vais voir dehors. Je... je te retrouverai plus tard, d'accord ?

— Mais pourquoi ?

Il enfila sa tunique avec nervosité. La chaleur m'étouffait, rendant chacune de mes respirations brûlantes et lourdes. Difficiles.

— Juter, tu... tu vas où ?

Il rassembla quelques affaires dans un sac, m'enjamba et se dirigea vers la porte.

Puis la lumière fut.

Blanche.

Pure.

La chambre se révéla crûment. La chaise de bois sec, fendue sur un de ses pieds. Les coupes d'argile brun bon marché, l'outre de mauvais vin, l'assiette émaillée. Mon ruban reposait au pied de la chaise, contraste pâle sur les dalles sombres.

Debout près de la porte, mon frère ne bougeait plus.

— Que se passe-t-il ? Juter !

Bien qu'engourdie, j'avais commencé à deviner. Dans l'Archipel, seules les Mille Voix pouvaient commander à la lumière : elles Parlaient et le monde se pliait à leur Voix.

Je me levai, oublieuse du ruban malgré la sueur qui faisait coller ma tunique à ma peau irritée. Mes cheveux retombèrent autour de mon visage, rideau étouffant. Mon frère ne bougeait toujours pas, face à la porte, me tournant le dos. Ce n'était pas normal.

J'avançai vers lui et lui touchai l'épaule.

— Juter  ?

La porte s'ouvrit d'un coup. Je reculai, dans un mélange de peur et de surprise.

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La Voix de la Vengeance [sous contrat éditions Plume Blanche, sortie 2024]Tempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang