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La soirée était déjà entamée depuis un long moment déjà et Rafael n'avait pas encore quitté son imposant bureau situé au centre de Madrid.

Cette dernière réunion l'avait épuisé moralement et physiquement. Les français n'étaient vraiment pas des collaborateurs faciles à convaincre. Mais une fois de plus son charme et sa persuasion avait fonctionné, lui valant un fructueux contrat avec de nouveaux investisseurs.

Un message de Samantha le fit sortir de ses pensées.

« Rendez-vous chez toi ce soir? »

Rafael expira avec lassitude en posant la tête au fond de son siège.

« Pas ce soir » Répondit-il après que ses yeux se soient arrêtés sur cette petite carte posée sur son bureau.
D'un geste lent, le milliardaire s'empara de cette dernière pour la scruter avec minutie.

« Bar Del Diego ? Quel étrange endroit pour travailler . » songea t-il en grimaçant avant de reposer avec nonchalance la carte sur le bureau.

***

Eugenia n'en pouvait déjà plus. Elle détestait le vendredi soir parce qu'il annonçait le début du weekend et une effervescence au bar Del Diego.

Il était à peine 21h et il y avait un monde fou. Essentiellement des hommes qui ne cessaient de l'appeler ou de la siffler.

— Hé ma minette, donne moi un autre verre ! Hurlait un homme.

— Et moi je veux la même chose mais sans glaçon ! En hurlait un autre.

Vivement que la soirée se termine. Elle n'avait qu'une chose en tête retrouver son frère. Son état semblait se détériorer ces derniers jours. Et elle ne supportait plus d'être loin de lui.
Une voix lui dictait de démissionner et de rester à son chevet pour le soutenir et l'aider à aller mieux.
Mais si elle faisait ce choix, Eugenia fermait une porte à leur rêve de visiter la Bolivie et surtout elle n'aurai plus de quoi payer leur loyer et les dépenses qui en découlaient.

Un sentiment d'impuissance la fit penser à la proposition de Bartolomeo. Mais rapidement elle chassa cette idée invraisemblable de sa tête.

Le bruit d'un verre brisé la fit sortir de ses pensées. Encore un ivrogne qui avait perdu l'équilibre.

Eugenia attrapa un ramasse poussière et de quoi éponger le liquide puis elle contourna le bar pour se diriger vers l'endroit ou le verre s'était rompu.

La jolie brune était penchée à l'avant avec la petite pelle au bout des doigts quand elle sentit une main baladeuse se poser sur ses fesses. Elle se figea immédiatement et se redressa.
Un jeune homme d'environ son âge s'était approché beaucoup trop près d'elle pour poser des mains dégoutantes sur son postérieur.

— Je... Ne faites pas ça s'il vous plait. Se défendit elle effrayée.

— Faire quoi? Susurra t-il en encerclant par la taille avec ses bras pour la plaquer tout contre lui.

Tremblante, Eugenia tenta de s'extirper de son emprise.

— S'il vous plait. Relâchez moi.

— Tes yeux m'ont envouté ma jolie, je suis bien content de te voir ailleurs que derrière ton bar. Ajouta t-il avec une haleine alcoolisée.

— Monsieur, j'ai du travail alors...

— Bouge pas ma jolie. S'amusa l'ivrogne en faisant glisser ses mains dégoutantes vers le visage d'Eugenia.

La jeune femme tentait bien que mal de lui résister et puis maladroitement en voulant l'éloigner elle fit tomber sa paire de lunettes sur le sol, l'entendant glisser à travers la salle.

— Eugenia ! Hurla son patron. Je te paye pas pour batifoler avec les clients.

Bien qu'elle n'aimait pas le ton que Diego son boss, avait employé avec elle, la jeune femme était soulagé qu'il intervienne. Elle réussit enfin à s'extirper des bras de ce client aux mains baladeuses. Et fut soulagée de le voir s'éloigner vers les toilettes.

Honteuse et déboussolée, Eugenia ramassa rapidement les éclats de verre sur le sol.

Encore un soir ou personne n'était intervenu, songea t-elle. Et tristement elle s'y était habituée.

Elle jeta un oeil sur le carrelage en damier sombre pour y chercher sa paire de lunettes. Elle avança tête baissée jusqu'à les retrouver aux pieds d'une table occupée.

Eugenia tendit le bras pour s'en emparer et sentit un regard brulant sur sa peau.

Elle relava la tête.

Son coeur en fut transpercé.

Un homme au regard sombre était assis sur une chaise et baissait la tête pour l'observer avec dureté.

Eugenia était incapable de détourner le regard et il lui sembla que son souffle se coupait.

La beauté de cet homme était sans pareil et la virilité qu'il émanait de lui n'était pas à mettre en doute.

Rougissante jusqu'aux oreilles, Eugenia se releva rapidement en se cognant la tête contre la table.

— Pardonnez moi. Bafouilla t-elle en s'enfuyant vers le bar, totalement envoutée par la beauté de cet homme qu'elle rencontrait pour la première fois.

    Rafael ne savait pas réellement pour quelle raison il s'etait rendu dans ce bar bon marché. Certainement par curiosité de voir ce que cette petite fille aux yeux clairs était devenue.

Il venait à peine de s'installer à cette table quand il aperçut cette jeune serveuse aux cheveux noués par un ruban jaune, plaquée contre son grès à un ivrogne aux pensées équivoques. Le beau brun tourna la tête de part et d'autre, personne ne réagissait.

Son sang se glaça, il se redressa pour intervenir le point serré quand la voix gueulante du chef des lieux sifflèrent un prénom qu'il connaissait bien.

Eugenia.

C'était donc elle.

La petite fille avait bien changé pour laisser place à une jeune femme visiblement mal dans sa peau et peu confiante. De loin il pouvait détailler sa tenue camouflant un corps mince mais pas dénoué de formes.

Et puis quand il la vit approché vers lui le visage plongé sur le sol, il se demanda ce qu'il lui prenait de se déplacer à quatre pattes sur ce sol crasseux.

Lentement, elle releva la tête pour arrimer son regard perçant au sien. Rafael fut pris d'une secousse inhabituel à l'intérieur de son coeur dur comme de la pierre.

Elle ne le regardait pas, elle l'admirait. Il pouvait apercevoir ses pommettes viraient au rouge.
Pendant un instant il essaya de sonder ses pensées, il y lut une infinie tristesse parsemé de douleurs et d'un manque d'amour abyssal. Tout comme pour lui.

Eugenia mit subitement fin à ce moment suspendu en s'enfuyant tête baissé derrière le bar. Il avait pu l'entendre bafouiller quelques mots le laissant découvrir une voix à l'infini douceur.

A cet instant précis, Rafael comprit qu'il allait l'épouser sans pourtant connaitre les motivations qui le poussait vers ce mariage.

Eugénia - Un milliardaire comme épouxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant