Chapitre 50 ⋅ Les fruits de la passion

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Les cours de l'après-midi avaient été suspendus exceptionnellement en vue du match. Si l'idée principale était de libérer les volleyeurs de l'équipe masculine, et par extension la fanfare et les pom-pom girls qui les accompagnaient à chaque rencontre, cette décision du proviseur ne profita pas seulement à ces derniers – oh ça non. Mahiru en fit rapidement le constat depuis son siège dans les gradins du gigantesque Gymnase Central de Kobe, où le noir et le bordeau l'emportaient sur l'arc-en-ciel d'autres couleurs qui parsemaient le public. Certains première et deuxième année s'étaient même procuré des mégaphones et des hachimakis aux couleurs d'Inarizaki, tandis que d'autres agitaient des éventails avec les noms des divers volleyeurs de l'équipe. Les iris de Mahiru s'arrêtèrent un instant sur celui d'une élève de première année un peu plus bas, où scintillait le nom « Atsumu » entouré d'une dizaine de cœurs, et elle s'en détourna dans un reniflement agacé.

— J'avais oublié que ce débile avait des fans, grommela-t-elle bien malgré elle, attirant ainsi le regard confus de Kinako installée à ses côté.

— Quel débile ? Atsumu ? s'enquit sa meilleure amie, et elle acquiesça après une seconde incrédule.

— Qui d'autre veux-tu que ce soit ?

— Je sais pas, à t'entendre quasi tous les garçons de ce lycée sont débiles donc bon...

La reporter ouvrit la bouche pour protester, ne serait-ce que par fierté, avant de ravaler sa réplique au souvenir de toutes les fois où elle avait douté des capacités intellectuelles de ses camarades masculins. Le comble, c'est qu'entre Hiroto qui courait après les filles malgré les râteaux et Suna qui assommait sa copine avec des ballons de volley-ball, elle mentirait en disant avoir changé d'avis depuis.

Elle secoua la tête et poursuivit sa diatribe.

— Non, là je parle du débile suprême. Tu sais, celui qui, quand on lui demande d'appeler l'ascenseur, crie « Ascenseur ! » avant de rigoler comme une baleine.

— Ah oui, le débile dont tu es amoureuse et avec qui tu vas en date le soir, donc, traduisit son amie dans un sourire, et les joues de Mahiru s'enflammèrent.

— Je vais pas en date avec lui, nia-t-elle aussitôt en détachant avec un peu trop de fermeté pour que ce soit sincère, ce qui ne dupa pas Kinako.

— Au temps pour moi. C'est évident qu'il t'a invitée à le retrouver à six heures au Mont Maya du soir pour faire des confitures.

Cette fois, la brunette tourna un regard blasé vers sa meileure amie, dont le sourire s'élargit un peu plus en réponse. Elle poussa alors un soupir agacé, qui servait également à exhaler un brin ses émotions étouffantes – au moins aussi étouffantes que la chaleur dans ses joues – et tourna la tête pour rompre le contact visuel. En contrebas, les silhouettes des techniciens s'agitaient autour des différents filets montés pour cette première phase de qualification. Un instant, ce fut plus fort qu'elle de chercher des yeux la silhouette élancée d'Atsumu et son sourire qui la faisait toujours bêtement chavirer, avant qu'elle ne se ressaisisse dans un battement de cils. Et son attention revint difficilement sur Kinako :

— T'avais compris depuis le début, c'est ça ?

— Ah ben, t'es plus détendue depuis quelques jours, et tu l'insultes beaucoup moins, enfin... sauf quand la jalousie te guette. Ça veut dire quelque chose.

— Humpf, je suis pas jalouse, se renfrogna la reporter dans une moue boudeuse.

— Tout comme tu ne vas pas en date avec lui, oui, j'ai compris.

Mahiru plissa les yeux dans sa direction, mais ne répondit pas, incapable de trouver la réponse adéquate à ses taquineries. Pire, même, elle sentait la nervosité l'envahir à la mention de sa probable jalousie qu'elle n'était pas tout à fait sûre de pouvoir nier. Pour autant sa meilleure amie ne s'y attarda pas, lui donnant plutôt un léger coup de coude dans l'épaule.

Salade de Fruits |HQ!!|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant