Chapitre 5

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Ouvrant les yeux, j'essayai de calmer le marteau piqueur qui résonnait dans ma tête. J'avais trop bu, je suppose.

La vision d'un Loukas en manteau s'offrit alors à moi. Je ne savais pas qu'il était rentré, n'étant pas là  lors de mon arrivée tardive de la nuit dernière.

- Tu vas quelque part ?

- J'ai quelque chose de prévu avec maman. Mais rendors-toi...

Il s'était approché puis penché sur le lit.

- Je devrais être de retour vers 13-14 heures. Si tu es sage et restes au lit, je ramènerai des croissants et ce sera brunch. Restes au lit, ok?

Il m'embrassa à pleine bouche et partit en claquant la porte à la vitesse de la lumière. Il faut croire que je serais encore seul dans l'appartement aujourd'hui.

Mais pensait-il réellement que je resterais dans le lit toute la matinée ? Tant pis, un peu de ménage ne fera  de mal à personne. 10 minutes plus tard je me levai. Comme si j'allais lui obéir ! Je m'ennuie déjà, surtout qu'il n'est que 10h !

Une fois levé, je fis le lit et me dirigeai vers la cuisine.

La grande baie vitrée laissait passer les doux rayons du soleil. Mon café à la main, je m'appuyais sur celle-ci et contemplais le paysage. Notre petit appartement surplombant la ville offrait un panorama sur le village et son côté forêt. Mais surtout, il donnait sur l'appartement officiel de Loukas.

La forêt paraissait calme. Je posais alors mon regard sur l'appart de mon compagnon. Et je compris que c'était le calme avant la tempête. Avisant deux femmes postées devant son appartement, je plissai les yeux.

Sa mère fut simple à reconnaître. Cependant, elle était accompagnée... Une chevelure longue et blonde, plutôt jolie... Je n'avais jamais été simplet. Ni naïf. Loukas arrivait à un âge où on lui demanderait le mariage et la descendance. J'en arrivais rapidement à la conclusion que ce matin belle-maman allait lui présenter cette jeune femme. Pauvre Loukas... Il n'était même pas au courant sinon il m'en aurait parlé. Ça allait lui tomber dessus.

Partagé, je ne savais pas comment prendre la nouvelle. Cela aidera-t-il Loukas à nous reconnaître ou inventera-t-il une autre excuse ?

Une nouvelle ombre se joignit aux deux femmes. Il me fut aisé de reconnaître cette silhouette que je serrais dans mes bras depuis une décennie. J'étais curieux de sa réaction, je l'avoue.

Observant la scène, je ne pus pas en croire mes yeux. Non seulement, il décocha un sourire colgate à la gêneuse mais en plus, il posa ses lèvres sur les siennes devant les yeux attendris de sa mère.

_________ Que signifiait ce cirque? Mes jambes se dérobèrent refusant de me porter plus longtemps.

La douleur d'une brûlure me ramena alors à moi-même. La tasse n'avait pas résisté à ma chute et le café formait une flaque sur le sol et mon bras était au milieu des éclats de porcelaine. Sans même esquisser un geste je restais là, au sol. Cette douleur me ramenait à la réalité. J'en ressentais le besoin.

Cette femme, qui était-elle? Pas une amie... Pas une connaissance... Sa copine? Mais c'est moi son compagnon... Il l'avait présentée à sa mère qui semblait approuver la jeune femme. Ils allaient ce matin se retrouver à son appartement.
Une seule hypothèse me venait à l'esprit.
Mais ça ne pouvait pas être vrai.

Je le connaissais, jamais il ne ferait ça. Jamais il serait sorti avec quelqu'un d'autre dans mon dos, n'est-ce-pas ? Je commençai alors à rire tel un fou. Je n'étais même plus capable de garantir la moindre chose. J'ignorais qui était la personne derrière la vitre. Cela ne pouvait pas être Loukas; cela ne pouvait pas être mon homme.

Mais diable, jusqu'où comptait-il aller? Sentant les larmes montées, je me frottai vigoureusement les joues. Hors de question de pleurer. Rien n'était sûr. Tout était encore possible. Malgré tout, trop d'histoires et de problèmes étaient apparus ces derniers jours pour que je puisse rationnellement faire face à cette nouvelle information. Cette scène fut la dernière goutte qui fit déborder le vase.

Sans même me préoccuper des débris sur le sol je me levai. Dans un élan de colère, je retournai la table. Le bruit du vase se cassant me fit un bien fou. J'éprouvais le besoin de détruire. Je rasais de mon bras le bar dans la cuisine. Arrivé dans la chambre, je me saisis du cutter pour faire une longue cicatrice au draps et matelas.
Tout cela était-il vrai ? Tous ces moments ensemble dans ce lit, cette cuisine; une illusion, des mensonges, un rêve tournant au cauchemar ?

Ma tête était trop pleine. Je n'arrivais plus ni à réfléchir ni à gérer tout ça.

Trop.
C'était trop.
Je ne savais plus comment faire.
Plus l'on avançait, plus j'avais l'impression que notre relation soit disant longue, belle et profonde nous sautait au visage.
Tout semblait avalé par le Temps et l'incompréhension, les beaux souvenirs du début happés par la dureté de notre présent.
Tout semblait s'effriter au fur et à mesure. Un vent se levait emportant tout sur son chemin.

Dans ces moments de doutes, le même besoin s'exprimait: le retour à l'eau. La solitude m'étant indispensable, je portais mon choix sur la salle de bains plutôt que la piscine municipal.

Mon reflet dans le miroir me parut si pitoyable. Il me semblait que je tombais dans un gouffre sans fond et que ma main tendue ne rencontrait rien lui permettant de se retenir; seulement du vide, rien que du vide.

Sans même prendre le temps de retirer mes vêtements, je me mis en position foetale sous le jet froid de la douche. Les filets d'eau parcourant mon corps, cette froideur s'immisçant dans mon corps, mes cheveux mouillés collant ma nuque...
Pendant un temps j'oubliais tout, concentré seulement sur ces sensations. Le blanc. Plus rien. _________________________________________________________

Dès que je posai un pied hors de la cabine, je me sentis étouffer. Je devais sortir, fuir cette maison. Ce foyer ?

Sans prendre la peine de me sécher, j'enfilais les premiers vêtements que je trouvais. Une paire de baskets et je fuyais mon propre refuge comme un voleur. Une longue déambulation dans les rues commença. J'ignorais les regards curieux. Il fallait dire que je devais faire pitié à voir.  Peu à peu, les nuages arrivèrent et la lumière du jour baissa. Je n'avais aucune notion de l'heure.

Brusquement, je sentis quelque chose heurter mon épaule. N'y prêtant aucune attention, je poursuivais ma route.

- Eh toi ! Une main se posa violemment sur mon épaule.  -Alors on s'excuse pas?

Je me tournai vers le guignol qui semblait déterminer à s'interposer sur mon chemin. Bon je lui laissais 30 secondes pour me lâcher et s'en aller. Je n'étais pas d'humeur.

Au lieu de ça l'inconscient cria et me coinça vers le mur.

Il venait de signer son arrêt de mort. J'avais besoin de me défouler et d'extérioriser tout ça. S'il devenait l'exécutoire de ma colère il ne pourrait s'en prendre qu'à lui-même. C'est lorsqu'il me saisit par mon bras brûlé qu'il scella son sort.

Sans plus me retenir, j'envoyais mon poing dans sa joue puis après un changement de pied d'appui, je le ramenais vers moi appuyant sur son coude. Je saisis alors son bras de ma main libre libérant la seconde. Finissant la technique, j'appuyais sur son coude pour l'emmener près du sol. Mais j'étais trop en colère pour me retenir et sans même lui laisser le temps de toucher le sol j'envoyai mon pied dans son estomac puis dans sa tête. Son nez saignait.
Ayant depuis longtemps dépasser la limite, casser mon frein, je continuais de le frapper. Dans un rage meurtrière, je faisais abstraction de tout...

Choix (BxB)Where stories live. Discover now