Le vide de ses yeux (b×b)

chapitre 21

PDV Adrien :

Pourquoi tremble t-il autant ? Pourquoi son regard s'est-il figé à la seconde où Manon est entrée dans le réfectoire ? Et surtout pourquoi ma petite amie dévisage t-elle mon colocataire de cette manière ?

Beaucoup de questions mais aucune réponse. De toute évidence, ils se connaissaient depuis bien plus longtemps qu'ils ne l'ont laissé paraître. Rien n'a l'air normal dans leur façon de se regarder, Ely semble en avoir peur, au point d'en trembler et d'éviter son regard comme la peste alors qu'elle, s'avance, un sourire aux les lèvres.

Pourtant, mon colocataire n'a jamais été du genre à baisser les yeux pour un rien. Bien au contraire, mon regard s'était ancré tant de fois dans le sien que je pouvais à présent décrire très clairement la teinte exacte de ses iris.

Il ressemblait à un petit chiot apeuré et elle s'apparentait à un tigre affamé devant sa proie. Pourtant, lui n'était pas un chiot et elle n'avait rien d'un tigre.

Hélas, il ne restait qu'une place, celle à côté de mon colocataire, à deux sièges de la mienne. Manon s'y assit et commença à tous nous saluer un par un.

J'avais beau beaucoup l'aimer, mon cerveau répétait la scène en boucle et ce regard méprisant et cruel ne pouvait pas lui appartenir. Comment pouvait-on dévisager un soit-disant inconnu de la sorte ? Je me demande ce que Ely a bien pu faire dans le passé pour qu'elle le déteste autant même si je vois mal mon colocataire faire du mal à quelqu'un.

Alors qu'une expression angoissée déformait le visage d'Ely, ses muscles s'activèrent pour l'une des premières fois en dix minutes. Il se leva en délaissant complètement le plateau auquel il n'avait pas touché depuis l'arrivée de ma petite amie.

Il avait beau avoir la tête baissée, il ne sembla pas remarquer le croche patte fourbe que Manon venait de lui faire. Sa mâchoire se contracta sous la douleur qu'il avait certainement ressenti à cause de son genou. Je le rattrapa par la taille in extremis et le reposa sur sa chaise du mieux que je pus. Bon après vu sa taille, c'était pas sorcier de le soulever et de le faire atterrir sur un siège juste à côté de moi mais laissez moi le raconter comme ça.

Après ça, Manon sembla déçue...déçue ? Pourquoi tirait t-elle cette tête ? L'avait t-elle fait exprès ? Tu en doutes encore ? Ne l'as-tu pas vue glisser son pied devant celui d'Ely ? Si mais ma petite amie ne ferait jamais ça. Il faut croire que tu ne la connaissais pas si bien au final. Dois-je te rappeler que vous ne sortez ensemble depuis à peine deux mois et demi ? Non c'est bon j'ai compris. Tant mieux, maintenant regarde là, penses-tu la reconnaître cette personne hautaine et méchante qui semble avoir pris possession de la petite amie que tu chérissais tant cet été ? Impossible, ça ne peut pas être elle. Si et tu le sais, maintenant, accepte la vérité et maintiens vite son regard.

Je jetai un dernier coup d'œil furtif à Ely, ses yeux semblaient éteints comme son visage qui affichait une expression vide. Quoique pas tout à fait vide, c'est ce qu'il semblait essayer de faire paraître. En observant bien, on pouvait voir ses sourcils se froncer et sa mâchoire se contracter. Bon, tout compte fait, ce n'était pas un simple coup d'œil.

Mes yeux se détournèrent à contrecœur de ceux d'Ely et s'ancrèrent dans ceux de Manon. Plus on la fixait intensément et plus ses yeux paraissaient intéressant. On n'y décelait aucune bienveillance ou positivité, juste le néant. Elle a beau le cacher avec des tonnes de fard à paupières coloré, ses iris n'en restent pas moins dénués de tout. Ils sont juste là avec leurs couleur pâle et froide par moment.

Je n'avais jamais remarqué la froideur de ses yeux car j'étais obnubilé par la chaleur de son sourire. Pourtant, rien n'est plus faux qu'un sourire et rien n'est plus vrai que les expressions que les yeux reflètent.